L'Amour et la paix, vaudeville en un acte, d'Hector Chaussier et Bizet, ballet de Richard, 23 floréal an 5 [12 mai 1797].
Théâtre de l'Ambigu Comique.
Il ne faut pas confondre l'Amour et la paix, de Chaussier et Bizet, avec la Paix et l'amour, de Jouy, musique de Le Mierre.
La paix dont il s'agit est la paix de Campo Formio entre la France et l'Autriche, dont les préliminaires ont été signés à Léoben le 29 germinal an 5 [18 avril 1797] et dont le traité a été signé le 26 vendémiaire an 5 [16 octobre 1797]. Chacun des deux événements a été largement salué par les théâtres.
Courrier des spectacles, n° 127 du 24 floréal an 5 [13 mai 1797], p. 3 :
[Le critique se garde bien de donner son avis sur la pièce : après en avoir fait l'analyse, il ne parle ni de succès, ni d'échec, mais, après avoir nommé les auteurs, il fait une liste de trois défauts qu'il relève dans la pièce, tous trois très politiques : l'inutilité d'une attaque contre le pape quand la victoire est acquise, l'attaque contre les journaux, la scène des pancartes qui semble dire que la paix entre les clans est faite, alors que, pour le critique, la réconciliation est encore loin : « Jettons un voile sur les erreurs, mais ne fraternisons jamais avec le crime et ses suppôts ». Par contre, la Fille peintre, représentée au même théâtre, a réussi.]
Théâtre de l'Ambigu Comique.
L'on donna hier à ce théâtre la première représentation de l'Amour et de la Paix, vaudeville en un acte. En voici l’analyse :
Claudine, mère de Babet, ne veut point unir Robert à sa fille, parce qu'il est soldat à l'armée d’Italie, et qu'il a porté les armes contre le Pape. Le père de Robert cherche à la convaincre qu’elle a tort d’être ainsi aveugle dans ses opinions religieuses : elle se range de son avis ; cependant elle persiste à ne pas vouloir de son fils pour son gendre. Robert fils, pour éprouver la fidélité de Babet, envoie à Claudine deux Autrichiens qu'il a fait prisonniers, et qu’il a chargé d’annoncer sa mort. Claudine s’en réjouit beaucoup, Babet est désolée ; mais l’épreuve cesse bientôt ; Robert vient jurer à Babet qu’il l’adore : Claudine consent au mariage. On annonce la paix, et chacun se livre avec transport à la joie que procure cette heureuse nouvelle. Cette pièce a de fort jolis couplets ; mais elle pèche souvent contre les principes ; le dénouement fait, la pièce dure encore un quart-d’heure, sans parler d’un ballet fort agréable de M. Richard. Les auteurs, MM. Hector Chaussier et Bizet, sont tombés dans trois autres fautes graves, selon nous. 1°.Il est inutile, la paix faite avec le Pape, de tant par1er de lui d'une manière ridicule : il est si beau d'être généreux après la victoire. 2°. Les auteurs ont distillé contre les journaux (et sur-tout, contre ceux qui jouissent de l'estime générale) le fiel dont ils les accusent dans leurs feuilles. 3°. Enfin, ils font venir sur la scène des porteurs de pancartes où sont beaucoup de dénominations Royalistes, Jacobins, Démagogues, Suspects, Muscadins, Démocrates, Fédéralistes, Terroristes ; on jette les dénominations au feu, et tout finit par une réconciliation générale.
Nous desirons fort la paix intérieure comme extérieure ; mais nous pensons qu’il n’est pas naturel de s’imaginer que des partis si opposés fraternisent si promptement. Les plaies cruelles que les Jacobins, les Terroristes, etc., nous ont faites sont encore trop ouvertes pour les oublier si facilement. Jettons un voile sur les erreurs, mais ne fraternisons jamais avec le crime et ses suppôts. Voilà notre sentiment sur la mauvaise scène des pancartes.
Une seconde pièce a réussi au même théâtre, c’est la Fille Peintre : elle est de M. Bérault, auteur de Coraline.
D. S.
D'après la base César, la pièce, d'auteurs inconnus, a connu deux représentations au Théâtre de l'Ambigu Comique, les 12 et 18 mai 1797. Et une note laisse entendre que la musique serait de Lemière de Corvey, d'après la Grove Music Online (le catalogue général de la BNF ne confirme pas cette attribution) , mais c'est la Paix et l'amour qui comporte une musique de Lemière de Corvey : il pourrait s'agir d'une confusion entre les deux pièces..
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