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Les Avant-Postes du Maréchal de Saxe
Les Avant-Postes du Maréchal de Saxe; comédie en un acte et en prose, mêlée de vaudevilles, de Moreau et Dumolard, 28 novembre 1808.
Théâtre du Vaudeville.
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Titre :
Avant-postes du Maréchal de Saxe (les)
Genre
comédie mêlée de vaudevilles
Nombre d'actes :
1
Vers / prose
en prose, avec des couplets en vers
Musique :
vaudevilles
Date de création :
28 novembre 1808
Théâtre :
Théâtre du Vaudeville
Auteur(s) des paroles :
Moreau et Dumolard
Almanach des Muses 1809.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Martinet, 1808 :
Les Avant-postes du Maréchal de Saxe, comédie en un acte et en prose, mêlée de vaudevilles, Par MM. Moreau et Dumolard ; Représentée pour la première fois à Paris, sur le Théâtre du Vaudeville, le 28 novembre 1808.
Les quatre saisons du Parnasse, quatrième année (1808), Hiver, p. 312-313 :
[Le compte rendu souligne combien la pièce réduit le grand général à peu de choses, un rival amoureux d’un de ses subordonnés, et qui de plus n’a pas le dessus. Pour compliquer la situation, les auteurs font intervenir Favart qui se met au service du jeune aide-de-camp qu’il aide à triompher de son chef. Jugement mitigé : « Il y a des longueurs dans cet ouvrage, et les situations ne produisent pas tout l'effet qu'on pourroit en attendre » (elles ne sont pas bien préparées). Mais aussi de jolies scènes. On peut juger que les deux grands hommes jouent un rôle secondaire (ce qui n’est pas convenable), défaut racheté par « un dialogue vif, spirituel, et une foule de jolis couplets ». Quelques coupures, et la pièce restera au répertoire...]
LES AVANT-POSTES DU MARÉCHAL DE SAXE,
Comédie-vaudeville en un acte.
Encore un grand homme rapetissé, mais pour le coup on devoit s'y attendre. Les Avant-Postes du maréchal de Saxe dans un espace de moins de cent toises carrées ! Tout devoit se ressentir de l'exiguité du cadre ; aussi nous a-t-on présenté ce général faisant assaut de ruses avec un très jeune aide-de-camp, non pour vaincre les Autrichiens, mais pour se rendre maître du cœur d'une jeune fille. On prévoit d'ici que le jeune officier, nouvellement sorti des pages, l'emportera sur le grand général ; c'est ce qui arrive : d'ailleurs le jeune homme avoit des intelligences dans la place ; et, pour rendre la partie plus inégale, les auteurs ont fait arriver Favart avec une troupe de comediens que le maréchal de Saxe désiroit avoir à la suite de son armée. Favart sert de son mieux l'aide-de-camp, en faisant boire l'argus qui veille à la garde de sa maîtresse, et tout se termine au mieux ; car le maréchal, en danger d'être surpris par une patrouille au rendez-vous nocturne où il se présente à la place de son rival, est trop heureux d'être remplacé par ce dernier, sur le dos duquel il jette son manteau, et qu'il marie ensuite à l'objet de ses vœux. Il y a des longueurs dans cet ouvrage, et les situations ne produisent pas tout l'effet qu'on pourroit en attendre ; ce qui vient de ce qu'elles ne sont pas bien préparées ; mais aussi il y a de jolies scènes, et l'arrivée de Favart à la tête des comédiens est fort gaie. Les personnes difficiles trouveront que le grand général et l'aimable écrivain jouent dans toute cette intrigue des rôles bien secondaires ; mais un dialogue vif, spirituel, et une foule de jolis couplets rachètent un peu ce défaut ; et je suis persuadé qu'au moyen de quelques coupures, ce vaudeville, qui a été fort applaudi, restera au répertoire à côté des jolies pièces de ce théâtre. Les auteurs sont MM. Moreau et Dumolard.
Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 13e année, 1808, tome VI, p. 377-378 :
[Compte rendu rapide d’une pièce à succès. Bref résumé de l’intrigue, on insiste seulement sur la présence de la troupe de Favart dans la pièce, et l’inconvenance du rôle de Favart. Une actrice est mise en avant, les auteurs sont simplement cités.]
Les Avant-Postes du Maréchal de Saxe, vaudeville joué le 3 décembre.
Le Maréchal de Saxe est représenté dans cette pièce, en rivalité avec son aide-de-camp. Il surprend une promesse de rendez-vous, profite de son grade pour donner au jeune homme une commission qui l'éloigne, et vient à sa place, soupirer sous les fenêtres de la jeune Lisbeth. Surpris par le portier ivre, il ne trouve moyen de se sauver qu'en jetant son manteau sur les épaules de son jeune rival qui n'avoit point obéi à l'ordre de départ, et il ne le punit qu'en l'unissant à Lisbeth,
Est-ce pardon ? Est-ce punition,
Que d'épouser ? Jugez la question,
dit quelque part Grécourt. Favart et ses comédiens se trouvent mêlés aux tableaux de cette pièce, et y répandent de la gaieté. On a blâmé le rôle que joue Favart dans quelques-unes des situations ; au reste la pièce a eu du succès. Madame Hervey y a contribué en mettant beaucoup de vivacité dans le rôle du jeune aide-de-camp.
Les auteurs sont MM. Moreau et Dumolard.
L'Esprit des journaux français et étrangers, 1809, tome I, janvier 1809, p. 284-291 :
[Le compte rendu s’ouvre sur des considérations un peu étrangères à la pièce, le rôle positif des divertissements que l’on offre aux soldats en campagne : du théâtre jusqu’aux abords du champ de bataille. C’est, aux yeux du critique « un spectacle vraiment français qu'une troupe de comédiens arrivant au milieu du camp », tel qu’on le voit dans la pièce. Les mésaventures de Favart à la recherche d’un cantonnement amènent des propos peu amènes du critique sur la façon dont la pièce présente l’armée du maréchal (on y ose appeler un aide-de-camp par son prénom !). Peu à peu, on arrive au résumé de l’intrigue, avant de porter un jugement sur la pièce, un vaudeville dans lequel il y a « de l'esprit et de la gaieté », amis où on fait jouer au maréchal de Saxe un rôle douteux (« la nature de ses intentions envers la jeune Allemande est trop évidente, et le rendez-vous où il se substitue à l'amant a quelque chose qui inquiette ». De même, le grand Favart « remplit un peu trop le rôle des valets de comédie » : les services qu’il rend à l’aide-de-camp, « on ne se les permet qu'entre gens de même âge et de même condition » (et Favart ne remplit aucune de ces conditions). Néanmoins la pièce a des qualités « du mouvement, de jolis couplets », et des longueurs, « mais où n'y en a-t-il pas ? » Succès mérité. Rien sur l’interprétation. Juste la mention du nom des auteurs.]
Les Avant-Postes du maréchal de Saxe.
Demain relâche à cause de la bataille ; après-demain, en réjouissance de la victoire de M. le maréchal de Saxe, nous aurons l'honneur de vous donner, etc. C'est ainsi qu'à l'armée du maréchal de Saxe on annonçait la bataille et la comédie. Ce mélange de dangers et de plaisirs, de bravoure militaire et de frivolité parisienne, donne à la gloire quelque chose de riant et d'aimable qui ne la rend que plus enivrante. Quand on voit des soldats marcher au combat dans un calme et terrible silence, on est saisi d'effroi pour les ennemis qu'ils vont abattre ; s'ils y courent en riant, on est rempli de confiance pour eux. Les soldats de Fabius jurèrent de revenir vainqueurs et tinrent leur serment ; ceux du maréchal de Saxe avaient promis de revenir à la comédie ; était-il à craindre qu'ils y manquassent ? C'est aux plaisirs du lendemain de la bataille qu'il est bon de penser la veille ; on ne doute guères de sa vie, quand on ne l'attache pas à des idées trop importantes ; la vertu, l'honneur, le sentiment du devoir sont bons au milieu du danger, mais le rire y est encore meilleur, et de toutes les affaires sérieuses, une affaire en rase campagne est la seule où la gaîté ait toujours bonne grace.
Ce n'est pas, il faut en convenir, que celui qui rit en allant se battre, n'ait bien le droit de rire ailleurs ; c'est ainsi que nos Français l'achètent. Toujours prêts à se moquer de tout, du danger, d'eux-mêmes tout comme des autres ; rire à propos, rire hors de propos est pour eux, la même chose, c'est toujours rire ; ils n'y voient que cela. Il semble que le malheur soit pour eux un rêve ; ils le portent si bien et oublient si vite ! L'ennui est la seule chose qui vienne à bout de les vaincre. Un Français ennuyé n'est plus le même homme ; il a perdu tout son courage, tous ses moyens, toutes ses ressources. Il semble que le plaisir éveille ses facultés, et que l'esprit et la bravoure lui viennent au milieu des divertissemens. Comme ces enfans qui s'endorment sur leur leçon, et n'ont de force et de vivacité que dans leurs jeux.
C'est donc un spectacle vraiment français qu'une troupe de comédiens arrivant au milieu du camp ; la compagnie est à pied, en désordre et en guenilles ; des hussards les ont dévalisés, l'orage les a surpris ; ils arrivent aux avant-postes de l'armée du maréchal de Saxe sans avoir pu trouver d'abri ; ils se plaignent comiquement de leur malheur ; mais enfin ils apperçoivent une maison ; Favart, qui est à leur tête, chante, pour se faire ouvrir, une complainte sur l'air très-pathétique de la Boulangère, qu'il fait accompagner par le tambourin. Mais des moyens si touchans ne parviennent pas à émouvoir le vieux major allemand, à qui appartient cette maison : c'était le commandant de la place, que le maréchal de Saxe vient de prendre, et où il a logé ses avant-postes. On l'a laissé prisonnier sur parole, et il a la permission d'habiter sa maison aux faubourgs ; c'est celle où se présentent les comédiens. Il n'est nullement disposé à l'ouvrir à des gens qui se disent de la troupe du maréchal de Saxe. Pendant ce débat arrivent des troupes d'une autre sorte, qui, ne trouvant pas celle-ci instruite du mot d'ordre, la fait prisonnière de guerre. Surcroît de désolation pour les pauvres comédiens ! Mais Favart leur observe que, par le temps qu'il fait, et puisqu'ils ne peuvent se faire recevoir nulle part,
La prison
Est au moins une maison,
et qu'au fait, dans l'état où ils se trouvent, pourvu qu'on soit logé, on ne doit pas se rendre si difficile sur son logement. Cette scène est très-gaie ; elle le serait davantage si on ne commençait pas par être fort embarrassé de savoir quels sont les personnages qui chantent assez long-temps en arrivant avant de nous dire qui ils sont ; en sorte que nous ne savons à qui attribuer leurs paroles et leurs chansons, et que penser de leur chagrin ni de leur gaîté, ce qui nous empêche de les partager ; car nous sommes tous un peu comme le chevalier de Laurency, à qui on racontait l'histoire touchante d'un jeune officier, qui était mort de douleur d'avoir perdu sa maîtresse ; on lui reprochait de n'en pas paraître ému : Comment voulez-vous, disait-il, que je m'intéresse à lui ? Je ne sais seulement pas le nom de son régiment.
Nous voulons qu'on nous dise d'abord le nom du régiment, afin de savoir où trouver les gens à qui nous avons affaire, et de pouvoir juger par nous-mêmes des intérêts auxquels on veut que nous prenions part. Aussi nous est-il fort désagréable dans ce même vaudeville de ne pas savoir dans quel endroit nous sommes, et de quelle place était commandant ce major prisonnier. Quand on veut faire des vaudevilles historiques ou anecdotiques, il faut se résoudre aux détails topographiques ; l'histoire n'intéresse que la carte à la main. Au reste, nous savons, ce qui est bien quelque chose pour un vaudeville, que le major a une jolie nièce, fort sensible au mérite et à l'amour du jeune Eugène, aide-de-camp du maréchal de Saxe : je suis fâché d'observer encore ici que, du temps du maréchal de Saxe, l'aide-de-camp d'un maréchal de France, général d'armée, ne s'appellait pas Eugène, il avait un nom de famille par lequel on le désignait toujours, Ainsi, ce n'est pas seulement à l'histoire et à la géographie, mais aux mœurs et aux usages qu'il faut faire attention dans un vaudeville anecdotique. Je ne conçois pas comment nos auteurs ont tant de goût pour ce genre-là ; en vérité, j'aimerais autant faire une tragédie. Quoi qu'il en soit, le jeune Eugène a contribué à la prise de la place que commandait le major ; ce qui fait que ce vieux militaire est beaucoup moins sensible que sa nièce aux ardeurs d'Eugène. Celui-ci, qui ne sait comment parvenir à sa maîtrese, est enchanté de voir arriver son ancien ami Favart, qui, à ce qu'il espère, le servira dans ses amours, car on juge bien que le maréchal de Saxe n'a pas laissé long-temps à la troupe militaire l'inspection sur la troupe comique, qui, en sortant des mains des ennemis, aurait pu se trouver très-mal de passer dans celles des amis. Au lieu d'aller en prison, les actrices sont allées refaire leur toilette, les acteurs dîner et boire, ce qui a remis tout le monde de très-bonne humeur. Pendant ce temps-là Favart achève d'enivrer un vieil invalide, qui garde la jeune Lisbeth, nièce du major. Les hoquets du vieil ivrogne ont fort diverti le parterre. Quant à moi, j'avoue que ce genre d'imitation ne m'a pas paru très séduisant. Eugène profite de l'adresse de son ami; mais au moment où il conyient avec Lisbeth d'un rendez-vous pour le soir, le maréchal arrive ; il a jetté un coup-d'œil d'amateur sur la jeune Allemande, et revient pour la voir ; il entend l'heure de l'assignation ; et, résolu d'en profiter pour se mettre à la place d'Eugène, il envoie celui-ci en ordonnance porter des dépêches ; mais Favart, à qui le désolé Eugène a recommandé ses intérêts, monte la garde autour de la maison ; le maréchal sait bien, comme on dit, le relever de sentinelle ; et à l'heure convenue, aussitôt qu'il fait nuit, il arrive, couvert d'un manteau, sous les fenêtres de Lisbeth, qui le prend pour Eugène ; mais à peine l'entretien est-il commencé, que le vieil invalide, toujours au guet, vient l'interrompre ; il veut saisir le maréchal ; celui-ci, d'un coup de poing, le renverse ; la garde accourt au bruit ; d'un autre côté, Eugène arrive : Arrivez donc, monsieur, lui dit tout bas le maréchal ; voilà une heure que je fais votre rôle ; et à la faveur de la nuit il lui jette son manteau sur les épaules. Eugène, qui devine à-peu-près la vérité, se laisse prendre à la place de son général, dont il voit qu'il faut sauver la dignité, et qui ne croit pouvoir mieux payer sa discrétion qu'en le mariant avec sa maîtresse, qu'Eugène se promet bien d'emmener le lendemain de la noce.
Il y a de l'esprit et de la gaieté dans ce vaudeville ; elle peut paraître quelquefois un peu forte ; mais on est convenu de ne s'y pas rendre difficile : on a cependant quelque peine à supporter le rôle que joue le maréchal de Saxe ; la nature de ses intentions envers la jeune Allemande est trop évidente, et le rendez-vous où il se substitue à l'amant a quelque chose qui inquiette. Ce vaudeville rappelle en plusieurs endroits celui des Pages du duc de Vendôme ; mais le duc de Vendôme, qui n'était pas meilleur sujet que le maréchal de Saxe, joue au moins dans son vaudeville un personnage plus convenable : on peut trouver aussi que Favart, qui favorise les rendez-vous du jeune Eugène, écarte les argus et les rivaux, remplit un peu trop le rôle des valets de comédie. Il n'est ni assez jeune ni d'assez bonne maison pour rendre de pareils services à un officier de dix-huit ans ; on ne se les permet qu'entre gens de même âge et de même condition, qui peuvent se les payer en se rendant la pareille, et jamais autrement. Ce sont là, au reste, de légers défauts dans un vaudeville ; du mouvement, de jolis couplets feraient passer beaucoup d'autres choses ; il y a bien aussi quelques longueurs ; mais où n'y en a-t-il pas ? C'est, au total, un joli ouvrage, et qui a mérité son succès.
Les auteurs sont MM. Moreau et Dumolard. P.
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