Caroline, ou le Tableau, comédie en un acte et en vers, de F. Roger, 12 vendémiaire an 9 [4 octobre 1800].
Théâtre français de la République
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Titre :
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Caroline, ou le Tableau
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Genre
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comédie
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Nombre d'actes :
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1
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Vers / prose ?
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en vers
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Musique :
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non
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Date de création :
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12 vendémiaire an 9 [4 octobre 1800]
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Théâtre :
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Théâtre français de la République
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Auteur(s) des paroles :
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F. Roger
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Almanach des Muses 1802
Caroline, jeune orpheline sans bien, et confiée aux soins d'un peintre ami de son père, se refuse aux vœux d'un amant riche, parce qu'elle n'a point de dot. Desronais, non moins délicat, veut faire la fortune de Caroline en dépit d'elle ; il déguise son valet en moderne enrichi, et fait acheter un vieux et méchant tableau qu'elle a chez elle, 24,000 fr. Le tuteur de la jeune personne soupçonne la ruse et la découvre ; mais touché du procédé, il engage sa pupille à couronner l'amour de Desronais ; elle y consent.
Trait de la vie du comte d'Apchon ; des scènes comiques, un dialogue piquant. Du succès.
Sur la page de titre de la brochure,Paris, chez Huet ; chez Charron, an IX :
Caroline ou le Tableau, comédie, en un acte, en vers, Par F. Roger. Représentée, pour la première fois, par les Comédiens Français, le 12 vendémiaire an IX.
« Il m'a fait éprouver qu'on pouvait, sans rougir,
« Accepter d'un époux, quand il savait offrir. »
(Scène dernière.)
Liste des personnages et lieu de l'action :
PERSONNAGES,
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ACTEURS.
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Desronais,
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Damas.
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Caroline, jeune orpheline.
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M.lle Mars, cadette.
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Dubreuil, peintre.
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Grandménil.
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Deschamps, valet de Desronais.
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Dugazon.
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Françoise, vieille gouvernante de Desronais.
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M.lle Lachassaigne.
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La scène est à Paris.
Décor :
Le théâtre représente une chambre de l'appartement de Caroline ; elle est meublée très-simplement. Dans le fond à droite, sont plusieurs dessins au crayon ; une table, un carton de dessins, un chevalet et autres choses nécessaires pour dessiner. Du même côté, sur le devant, est un vieux paysage encadré richement, mais enfumé et dans lequel on doit à peine distinguer un âne. Du côté opposé est une fenêtre donnant sur la cour, une table et un autre carton rempli de paysages. Du même côté, mais dans le fond, est la porte d'entrée. Au lever du rideau, Caroline est à dessiner.
Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, VI. année (an VIII-1800), tome III, p. 548-549 :
[Pièce qui n’est pas neuve (elle reprend une anecdote déjà utilisée, et entre dans la grande famille des pièces racontant la générosité d’un amoureux, qui reçoit la main de celle qu’il aime en récompense), mais qui a eu « un succès complet ». Le compte rendu résume l’intrigue, avant de rendre le verdict : « pièce bien écrite », et une des scènes « est d’un bon comique » (ce qui nous rappelle qu’il y a aussi du mauvais comique au théâtre). Interprétation remarquable.]
Théâtre français de la République.
Caroline ou le Tableau.
Le sujet, traité comme anecdote, sous le titre d'une Matinée de Catinat, a fourni celui de cette comédie, en un acte et en vers, jouée le I2 vendémiaire, avec un succès complet.
Caroline cultive la peinture chez Dubreuil. Desronais, jeune connoisseur, très-riche, l'aime et ne peut espérer sa main : la délicatesse de Caroline s’oppose à leur union. Desronais, pour faire cesser l'inégalité des fortunes, seul obstacle à son bonheur, ordonne à son valet de se déguiser en riche parvenu, et d’acheter fort cher un tableau médiocre que possède Caroline. Le valet obéit, et paie 24,000 francs ce tableau, au grand étonnement de Dubreuil.
Une vieille gouvernante de Desronais, qui trouve 24,000 francs de déficit dans la caisse de son maître, soupçonne qu’il a été volé par le domestique. Ses bruyantes lamentations découvrent la générosité de Desronais, à qui Dubreuil donne Caroline. La pièce est bien écrite. La scène où le faux parvenu admire le mauvais tableau, est d’un bon comique ; elle est très-bien jouée par le C. Dugason. Mlle Mars cadette a reçu beaucoup d'applaudissemens dans le rôle de Caroline. L’auteur est le C. ROGER.
L’Esprit des journaux français et étrangers, trentième année, tome IV, nivôse an IX [décembre 1800-janvier 1801], p. 220-223 :
[La pièce a réussi, et le résumé de l’intrigue, sans surprise, conduit à une conclusion sans surprise l’intrigue n’est pas neuve, et le critique nous renvoie à Une matinée de Catinat, qui traite le même sujet. Mais cette parenté est jugée favorable au succès des deux pièces. La pièce nouvelle a bien des qualités, mais c’est le style qui est mis en avant, « celui de la véritable comédie », en termes de piquant et de facilité, et plus encore de pureté et de correction (l’éloge n’est pas mince!). Au lieu de critiquer des éléments de l’intrigue, il vaut mieux souligner la qualité de ‘interprétation, avec simplement une réserve sur un des acteurs, invité à ne pas chercher « à tant exprimer ».]
THÉATRE FRANÇAIS.
Caroline, ou le Tableau.
Cette pièce a été donnée avec un succès décidé.
Caroline, jeune artiste, & pauvre orpheline, est la voisine d'un jeune homme riche, délicat & généreux, ami des arts qu'elle cultive, admirateur de ses talens, mais encore plus épris de ses charmes. Elle sait qu'elle est aimée, mais refuse de s'unir à Desronais, qui l'en presse, parce qu'il règne entre la fortune de tous deux une différence totale. Desronais saisit un moment d'absence pour chercher le moyen de tromper innocemment le sentiment qui abuse sa jeune amie, & de l'épouser sans paroître généreux envers elle. Un vieux tableau, noirci par le temps & la fumée, sur le mérite duquel le père de Caroline disputoit souvent, lui fait naître 1'idée d'enrichir sur le champ l'orpheline ; & cela de son propre aveu. Un valet se déguise en parvenu, en prétendu connoisseur ; il pénètre chez Caroline sous un prétexte léger, voit le tableau, en parle avec enthousiasme. Desronais se rend médiateur du marché. L'acheteur promet 24,000 livres : il est très - piquant de remarquer que Desronais en vouloit 30,000. Pour la première fois, Caroline sourit à l'idée de la fortune. L'acheteur revient avec sa somme. Ici la scène devient très plaisante.
L'argent compté, le maître de dessin de l'orpheline demande au prétendu connoisseur ce qu'il trouve de si beau dans ce qu'il achète si cher ; l'embarras du valet est très comique. Se trouvant forcé d'avouer que le tableau n'a ni dessin, ni couleur, ni composition, il laisse échapper ce vers :
Vous conviendrez du moins qu'il est avant la lettre.
Cette balourdise, qui excite les éclats de rire du maître de dessin, fait craindre à Caroline de profiter d'une manière peu délicate de l'erreur grossière d'une dupe : elle veut rompre le marché ; Desronais paroît, en soutient la validité. Le valet saisit le moment d'emporter le tableau ; à l'instant il est arrêté par une vieille servante de Desronais , qui crie au voleur ! & accuse l'acheteur prétendu d'avoir volé à son maître l'argent qu'il vient de donner..... A ces mots , la ruse est découverte ; Caroline reconnoit la manière généreuse dont Desronais vouloit rapprocher sa fortune de la sienne ; elle lui donne sa main.
On voit que ce sujet est le même que celui d'une Matinée de Catinat. Le trait qui le compose devoit être le résultat d'un sentiment délicat : chez Catinat, ce sentiment est la bienfaisance ; auprès de Caroline, c'est l'amour. Les deux ouvrages n'ont rien à craindre de la concurrence : l'un intéresse beaucoup, l'autre attache & plaît à la fois ; tous deux se prêteront dans leur succès également mérité, un mutuel appui ; très-contens de l'un, ce qu'on désirera le plus, ce sera d'aller applaudir l'autre. Nous avions cru pouvoir dire que ce sujet étoit celui d'une jolie comédie. Nous ne saurions exprimer à quel point le C. Roger nous a prouvé que nous avions raison.
Quoique son ouvrage soit d'un genre très-agréable ; que son exposition ait de la grâce, en même temps que de la clarté ; que ses scènes aient la plupart une intention comique ; plus que tout cela nous aimons à remarquer le style de ce jeune auteur, parce que ce style, celui de la véritable comédie, en a le piquant & la facilité, mais en a surtout la pureté & la correction.
Irons-nous critiquer, après cela, l'indécision du caractère du maître de dessin, la foiblesse du rôle de la vieille servante, où l'invraisemblance du moyen qui permet à Detronais de rester chez Caroline en son absence ? il vaut beaucoup mieux dire en terminant, que l'ouvrage a été parfaitement joué par Grandmenil, Dugazon & Mlle. Mars. Damas est on ne peut mieux placé dans le rôle de Desronais : il le dit avec intelligence, le joue avec ame ; mais on ne peut jamais parler de cet acteur intéressant , qu'on ne finisse par lui dire : « Au nom d'un talent qu'on estime & des succès qui vous attendent, ne cherchez donc pas à tant exprimer, & vous exprimerez bien davantage. »
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