Les Capucins ou les Amis de la paix, pièce en deux petits actes, par le Cousin Jacques, 15 mars 1791.
Théâtre de Monsieur.
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Titre :
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Capucins (les) ou les Amis de la paix
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Genre
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comédie mêlée de quelques morceaux de chant
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Nombre d'actes :
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2
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Vers / prose
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prose
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Musique :
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oui
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Date de création :
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15 mars 1791
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Théâtre :
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Théâtre de Monsieur
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Auteur(s) des paroles :
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Beffroy de Reigny (le Cousin Jacques)
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Compositeur(s) :
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Dans son Dictionnaire néologique, tome 2, p. 543-544 (à Paris, chez Moutardier), le Cousin Jacques rend compte de l’accueil réservé à sa pièce :
CAPUÇINS, (Les) Comédie en prose et en deux actes, mêlée de quelques morceaux de chant, jouée au Théâtre de Monsieur, rue Feydeau, en 1791. Tous les bons acteurs de la Comédie et de l'Opéra Français, jouaient dans cette pièce qui fit un tapage effroyable, au point que l'auteur lui-même descendit sur la scène, et fit baisser la toile au milieu du second acte. Cette pièce, vide d'action et d'intrigue, n'avait pour tout mérite que des tableaux neufs à la scène, des acteurs parfaits, beaucoup d'ensemble, et des tirades de la plus grande force contre les deux partis extrêmes ; ce qui les anima tous deux à tel point, qu'il y eut des loges déclouées, dont les cloux dorés furent jetés par poignées à la tête des hommes du parterre, qui ripostèrent par l'envoi d'un sac de pommes de terre au nez des femmes des loges. Néanmoins on vit alors une chose jusque-là, dit-on, sans exemple au théâtre. Vallière débita une tirade de deux pages et demie en prose, en faveur du Roi, qu'on voulut avoir bis, et qu'il fut obligé de répéter toute entière, au milieu des applaudissements universels. Les Comédiens, à la répétition, étaient si engoués de la pièce, qu'ils offrirent à l'auteur de la lui acheter deux mille écus ; le directeur du grand Théâtre de Marseille, qui l'avait entendu répéter, offrit à l'auteur de la lui payer comptant pour son Théâtre ; l'auteur se refusa à tout, annonçant qu'elle tomberait infailliblement et que les acheteurs se trompaient. S'il fut prophète en cela, il fut d'ailleurs bien maladroit, de s'imaginer qu'au milieu des Partis violents, au sein de la plus vive fermentation, on pouvait parler de modération au théâtre. Cet auteur maladroit est le Cousin-Jacques, auteur aussi de ce Dictionnaire.
Mercure universel, tome 1, n° 16 du mercredi 16 mars 1791, p. 255-256 :
[Le critique du Mercure universel aime bien les citations de Boileau et de Voltaire, et c'est par des citations qu'il annonce la chute irrémédiable des Capucins. Si l'opéra-comique a réussi au Consin Jacques, dans la comédie il a échoué. C'est que la pièce n'est pas drôle : « quelques saillies » au prmeier acte n'ont pas suffi à rendre supportable l'acte 1, et l'acte 2 riche surtout « de scènes assomantes [sic], et de caractères fastidieux que l’on disoit comiques » n'est pas allé à son terme. Le critique attribue cette chute au « flux et reflux d'opinions » de l'auteur dans sa pièce, flattant tantôt les petites loges, tantôt le parterre. Mais « la voie du patriotisme est une », et les atermoiements du Cousin Jacques ne lui attiré l'indulgence ni du parterre, ni des petites loges. L'acteur tenant le rôle principal n'a pu éviter l'échec de la pièce. Contrairement à Nicodème,son grand succès de la fin de lk'année précédente, les Capucins n'ont ni originalité, ni esprit. La conclusion de l'article montre ce qui est en jeu dans cet échec : ce qu'il faut reprocher à la pièce, c'est de tenter « de prêcher une sécurité funeste, et une confiance trompeuse » en mettant en avant « les vertus de quelques prêtres respectables », trop peu nombreux pour faire cesser les attaques contre la religion.]
Theatre de Monsieur.
La nature fertile en esprits excellens
Fait entre les auteurs partager les talens,
L’un peut tracer en vers une amoureuse flamme,
L’autre d’un trait plaisant aiguiser l’épigramme.
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Mais souvent un esprit qui se flatte et qui s’aime
Méconnoît son génie et s'ignore soi-même
Ainsi tel autrefois. . . . . . . .
Boileau.
Tel le Cousin Jacques qui a montré beaucoup de talent pour l’opéra-comique, dans la charmante pièce de Nicodème ; vient d'éprouver dans la comédie un succès bien différent : sa pièce jouée hier, sous le titre des Capucins n’a pas réussi.
Tel brille au second rang qui s’éclipse au premier.
Voltaire.
Si on excepte quelques saillies le premier acte n’offre, ni sujet, ni intérêt, ni comique, ni piquant. Sa longueur insoutenable rappelle ces vers de Boileau.
Tout ce qu'on dit de trop est fade et rebutant,
L’esprit rassasié le rejette à l’instant.
Le mauvais succès du second acte nous dispense d’entrer dans le détail de scènes assomantes [sic], et de caractères fastidieux que l’on disoit comiques. Mais, la mélancolie qu’ils ont engendrée à [sic] forcé de baisser la toile au milieu des huées. Ainsi finit cette conception malheureuse, dont les principes dangereux rendent la chûte plus supportable. L’auteur, après avoir long-temps erré dans un flux et reflux d'opinions, tantôt captant la bienveillance des petites loges, tantôt accaparant les suffrages patriotiques du parterre, finit par mettre, en parallèle, un seul individu avec tout l’empire. La voie du patriotisme est une.
Pour peu qu’on s'en écarte, aussi-tôt on se noie.
Boileau.
Ni le parterre , ni les petites loges n’ont sçu gré à l’auteur de ses vains ménagemens, et le talent et les efforts de M. Vallière, chargé du rôle du père Gardien, n’ont pu faire oublier que :
Nous voulons qu’avec art l’action se ménage.
Boileau.
Nous conseillons au Cousin Jacques de reposer agréablement ses regards sur les 62 représentations de Nicodème, dont l’originalité entraîne le succès, et dont l’esprit provoque l’applaudissement.
Nous terminons cet extrait par une réflexion. Dans un moment où l’on doit exciter plus que jamais la surveillance des corps administratifs sur les malversations monacales ; il est fort dangéreux [sic] et fort immoral de prêcher une sécurité funeste, et une confiance trompeuse dans les vertus de quelques prêtres respectables, il est vrai, mais malheureusement trop peu nombreux pour arrêter les progrès du mal, et opposer un frein aux persécutions religieuses.
L’Esprit des journaux français et étrangers, 1791, volume 5 (mai 1791), p. 320-321 :
[Le compte rendu confirme ce que le Cousin Jacques disait lui-même : la représentation a été un échec, que le critique explique à la fois par le fait qu’elle éveille des sentiments opposés dans le public, et par la lassitude du public de voir sans cesse des pièces mettant en scène des religieux.]
THÉATRE DE MONSIEUR.
On a donné le 15 mars, à ce théatre , les Capucins ou les amis de la paix , par le cousin Jacques, piece en deux petits actes, dont le premier n'a duré que sept quart-d'heure. II seroit difficile d'en donner l'extrait, puisqu'elle n'a pas été achevée. Tout ce que nous avons pu y comprendre, c'est que la scene se passe dans un couvent des capucins, dont quelques-uns sont aristocrates, & le plus grand nombre démocrates. Le pere gardien & le prieur cherchent à les ramener tous à des principes de modération & de paix. Un évêque réfractaire, retiré dans ce monastere, est converti par un discours du gardien, dont il a entendu la lecture au réfectoire, & un jeune novice se marie avec la niece de la mere syndic des capucins.
Plusieurs traits ont été applaudis par les uns, & sifflés par les autres, selon la différence des partis ; mais bientôt ils se sont tous ralliés aux principes du goût, & la piece a été sifflée généralement. On commence à se dégoûter très sérieusement de l'abus ridicule que l'on fait au théatre des costumes monastiques. Qui jugeroit du mérite de l'auteur par cette chûte, se tromperoit bien fort ; M. B. de P. [Beffroy de Reigny, le nom du Cousin Jacques] a fait ses preuves. Mais un auteur dramatique peut souvent dire comme l'Espagnol : je fus brave un tel jour.
Dans la base César, le titre donné est Les Capucins ou Faisons la paix. L'attribution au Cousin Jacques (alias Beffroy de Reigny) y est donnée comme douteuse. La pièce n’a connu qu’une représentation, le 15 mars 1791, au Théâtre de Monsieur / Théâtre Feydeau..
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