Les Dangers de l'Opinion, drame en cinq actes en vers (19 janvier 1790), par M. Laya.
Théâtre François (Théâtre de la Nation).
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Titre :
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Dangers de l’opinion (les)
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Genre :
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drame
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Nombre d'actes :
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5
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Vers / prose ?
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en vers
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Musique :
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non
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Date de création :
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19 janvier 1790
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Théâtre :
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Théâtre de la Nation
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Auteur(s) des paroles :
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Laya
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Almanach des Muses 1791
Ouvrage dont le but est de prouver l'injustice des peines infamantes. C'est un jeune homme, qui est près de se marier, se voit sur le point de perdre ce qu'il aime, parce qu'on apprend qu'un de ses cousins est condamné à périr pour crime d'assassinat. La jeune personne prépare une coupe empoisonnée pour elle et son amant. Heureusement que le cousin se trouve innocent et qu'on le renvoie absous.
Grands raisonnemens d'un Anglois contre le préjugé qui deshonoroit les parens d'un coupable.
Beaucoup d'invraisemblance, de négligence et d'intérêt.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Maradan, 1790 :
Les Dangers de l'opinion drame en cinq actes, en vers. Représenté, pour la premiere fois, à Paris, sur le théâtre de la Nation, par MM. les Comédiens François ordinaires du Roi, le mardi 19 janvier 1790. Par J. L. Laya.
Le crime fait la honte et non pas l'échafaud.
Rotrou.
Mercure de France, tome CXXXVIII, n° 5 du samedi 30 janvier 1790, p. 238-240 :
[Avant de rendre compte d’un drame, le critique doit justifier l’existence d’un genre très décrié. Le drame a le mérite d’offrir « des leçons domestiques », dont le but devrait être d’attirer « l'attention même des Législateurs » sur les « malheurs domestiques ». La pièce de Laya est un bon drame, qui montre comment un « préjugé barbare » ruine une famille, celui qui étend à toute une famille la flétrissure d’une condamnation d’un de ses membres. Après avoir résumé l’intrigue, le critique met en avant la force de la leçon donnée, à travers l’intérêt très vif qu’il fait naître. Le drame n’est pas parfait : des qualités d’écriture, mais aussi des incorrections ; des invraisemblances. Mais l’auteur peut progresser. Les interprètes sont remarquables. On devrait retrouver l’une des interprètes, madame Petit, dans Mélanie, jouée prochainement.]
THÉATRE DE LA NATION.
Souvent, on s'est élevé contre le Drame ; mais les bons esprits n'ont jamais parlé que des mauvais Drames.
Tous les genres sont bons, hors le genre ennuyeux.
Le mérite de nos meilleurs Drames est d'avoir offert des leçons domestiques. Un plus noble but seroit, en présentant le tableau des malheurs domestiques occasionnés par les abus, d'appeler & de diriger l'attention même des Législateurs.
C'est cc qu'a tenté de faire M. Laya, dans l'Ouvrage qui vient d'obtenir un grand succès à la Comédie Françoise ; cette Pièce a pour titre, les Dangers de l'opinion. Elle tend à faire détester ce préjugé barbare qui flétrit, par la faute d'un seul homme, des familles & des générations entières.
Cécile est prête d'épouser d’Harleville qu'elle aime depuis long-temps. Un parent de son amant est arrêté, & va être condamné comme coupable d'un meurtre. Le Père de la jeune personne rompt le mariage, il refuse de s allier à une famille déshonorée par l'opinion. En vain un Lord Anglois combat ses prejugés , le père est inflexible. L'intérêt de la Pièce est suspendu Par des alternatives de crainte & d espérance Cécile, qui a repousse les offres de Milord, & qui a refuse de partir avec son amant, se décide à mourir avec lui. Déjà ses lèvres touchent la coupe empoisonnée ; Milord arrive : il annonce que le parent de d'Harleville n'étoit point coupable, & qu'il est justifié.
On voit que M. Laya a renforcé les couleurs pour rendre la leçon plus forte. Il y a un intérêt vif dans ce Drame, & beaucoup d'art à l'avoir prolongé pendant cinq Actes. Quoique le style n’en soit pas bien correct, il y a des vers heureux & du mouvement. On lui reproche quelques invraisemblances dans l'action ; mais M, Laya est jeune encore ; & cet Ouvrage l'annonce très favorablement dans la carrière dramatique.
La Pièce a été fort bien jouée. M. Vanhove a rempli le rôle du Lord avec beaucoup de vérité, de noblesse & de franchise, il a trouvé l'Art si difficile d'intéresser dans des scènes de raisonnement.
M. St-Phal, chargé du rôle de d'Harleville, l'a joué avec beaucoup de sensibilité, & a rendu, avec une expression vraiment déchirante, le morceau où il raconte comment son cousin a été pris pour l'assassin de l'homme qu'il vouloit secourir.
Mde. Petit a montré dans le rôle de Cécile, ce talent naturel & vrai, que lors de ses débuts, elle avoit annoncé dans Virginie, & dans Iphigénie en Aulide. Le rôle de Cécile ne devoit point être déclamé ; Mde. Petit y a mis une expression toujours simple, ou pathétique, & quelquefois sublime. Sa diction pure & facile, sa figure & sa finesse la rendent chère aux Amateurs de la Comédie ; son talent n'est pas moins précieux dans les Drames les plus touchans, & dans le jeune emploi de la Tragédie. Il est difficile d'avoir un succès plus complet que celui qu'elle a obtenu dans le rôle de Cécile.
On nous fait espérer incessamment une représentation de Mélanie ; Mde. Petit, qui doit en jouer le premier rôle, est digne d'associer son talent aux talens du premier ordre.
L'Esprit des journaux français et étrangers, dix-neuvième année, tome III (mars 1790), p. 345-346 :
[D'abord le résumé de l'intrigue. Le critique en signale deux points faibles : le caractère excessif de la réaction de la fiancée de l'homme qu'elle ne peut épouser parce qu'un de ses parents a été exécuté, et l'inconvénient de choisir un condamné innocent : le propos serait plus fort s'il avait été coupable. Ces erreurs sont liées pour le critique à la jeunesse de l'auteur. De même, le style devrait être plus soigné. Par contre l'interprétation est jugée positivement, avec une mention spéciale pour madame Petit.]
Théâtre de la Nation :
On a donné le mardi 19 janvier, la premiere représentation des Dangers de l'opinion, drame en cinq actes & en vers, par M. Laya.
Ce drame, très-sombre, a été reçu avec beaucoup d'applaudissemens. Le but de l'ouvrage est de prouver l'injustice des peines infamantes. C'est un jeune homme qui, prêt de se marier, se voit sur le point de perdre ce qu'il aime, parce qu'on apprend qu'un de ses cousins est condamné à périr pour crime d'assassinat. La personne qu'il devoit épouser ne peut parvenir à vaincre la résistance de son pere, trop esclave du préjugé. L'auteur, pour en prouver le danger, représente cette jeune personne préparant une coupe empoisonnée pour mourir avec son amant. C'est pousser loin la demonstration ; l'amant doit être satisfait de ce procédé ; mais peut- être le goût, qui est moins exigeant que l'amour, auroit désiré une preuve moins énergique. Enfin on est informé que le parent condamné étoit innocent ; il est renvoyé absous, & rien ne s'oppose plus à l'union des deux amans.
L'auteur de ce drame est fort jeune ; c'est M. Laya, déja connu par quelques productions d'un autre genre. Il étoit difficile qu'un ouvrage aussi important, sur un sujet aussi philosophique, ne se ressentît pas un peu de l'âge de son auteur ; & c'est dans cet esprit sans doute qu'il a été jugé. Nous ne nous plairons pas à nous montrer plus séveres que le public ; nous louerons avec plaisir, comme on a applaudi avec enthousiasme, les vers heureux qui ont été remarqués dans le cours de la piece, (quoique le style en soit souvent négligé), & les morceaux, soit de rayonnement, soit pathétiques, qui doivent prévenir en faveur de son talent.
Ne doutant point qu'il ne fasse quelques changemens & quelques retranchemens nécessaires, nous nous bornerons à une réflexion. Nous aurions désiré que M. Laya donnât à son héros un parent vraiment coupable & supplicié ; pour immoler entiérement le préjugé, nous croyons qu'il auroit fallu le présenter dans toute sa force.
On peut dire avec vérité que la piece a été généralement bien jouée ; mais on doit des éloges particuliers à Mme. Petit Cette actrice intéressante a rendu le rôle de la jeune personne de maniere à ajouter à l'estime qu'on avoit pour son talent, aussi a t-elle été demandée & applaudie avec transport.
D’après la base César, il y a eu 11 représentations en 1790. Puis la pièce a été reprise 4 fois en février-mars 1793, puis 3 fois en juin-juillet 1797, toutes au Théâtre de la Nation. On note aussi une représentation à Caen le 31 mars 1791.
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