Gonsalve de Cordoue

Gonsalve de Cordoue, mélodrame en trois actes, de Dorvo, musique de Piccini, ballets d'Aumer, 12 juillet 1806.

Théâtre de la Porte Saint-Martin.

Titre :

Gonsave de Cordoue

Genre

mélodrame

Nombre d'actes :

3

Vers ou prose ?

prose

Musique :

 

Date de création :

12 juillet 1806

Théâtre :

Théâtre de la Porte Saint-Martin

Auteur(s) des paroles :

Dorvo

Compositeur(s) :

Alexandre Piccini

Chorégraphe(s) :

Aumer

Almanach des Muses 1807.

Sur la page de titre de la brochure, chez Barba, 1806 :

Gonzalve de Cordoue, ou le Siège de Grenade, mélodrame en trois actes, en prose, Par H. Dorvo. Représenté, pour la première fois, sur le théâtre de la Porte St.-Martin, le 12 juillet 1806. Musique de M. Alexandre Piccini, Pensionnaire de l’Académie Impériale de Musique. Ballets et mise en scène par M. Aumer, de l’Académie Impériale de Musique.

Journal de Paris, n° 194, dimanche 13 juillet 1806, p. 1439 :

[Compte rendu plutôt surprenant. Il s’ouvre par une réflexion sur la vérité en histoire, ramenée à une « option » entre des points de vue contradictoires. Il parle ensuite de celui qu’il présente comme le « héros dont ce nouveau mélodrame nous rappelle le nom », un curieux personnage qu’on peut voir comme un brigand sans scrupules, « un scélérat » ou comme « un honnête homme ». Mais l’auteur du mélodrame n’a pas eu à choisir, puisqu’il parle d’un homonyme « n’appartenant nullement à l’histoire ». On est aux deux tiers de l’article, et le critique peut enfin parler assez rapidement de la pièce dont il ne peut développer toute l’intrigue car « la place commence à me manquer ». Il finit donc rapidement : sources du sujet, jugement plutôt négatif (la pièce est inférieure aux deux sources proposées), ce qui n’empêche pas le succès, l’auteur étant « demandé, nommé & amené ».]

Théâtre de la Porte S.-Martin.

Gonsalve de Cordoue, mélodrame.

Gonsalve de Cordoue !.. Puisque les dissertations judico-historiques deviennent à la mode, je ne puis passer sous silence les diverses opinions des historiens sur le héros dont ce nouveau mélodrame nous rappelle le nom. Allons, auteurs & journalistes, encore un sujet de controverse ; vous pouvez même disputer longtemps sur celui-ci, sans craindre qu’on vous mette d’accord.

Voilà ce que j’aime dans ces sortes de débats ; comme il n’y a pas de juges compétens, & partant point de sentence légale à prononcer ; le dernier qui parle a toujours raison, & personne n’est forcé de dire j’ai tort.

Gonsalve de Cordoue, surnommé le grand capitaine, a-t-il été un traître ou un vertueux personnage ?

Telle pourrait être la nouvelle question à débattre devant le tribunal des gobe-mouches.

S’il faut en croire quelques écrivains, ce grand capitaine si célèbre ne se faisoit jamais scrupule de manquer à ses engagemens ; sa maxime favorite étoit que la toile d’honneur doit être grossièrement tissue : enfin, non content d’avoir manqué au devoir d’un fidèle sujet, en osant concevoir de l’amour pour la Reine Isabelle, il avoit voulu s’approprier traitreusement, & avec indigne félonie, le royaume de Naples, qu’il avoit conquis par les armes du Roi son maître.

D’autres historiens ont omis ces faits, ou les ont déclarés calomnieux. On sait, disent ceux-ci, qu’il étoit le plus noble, le plus généreux des hommes ; on sait qu’obligé par les ordres de Ferdinand, de porter les armes contre Frédéric, qu’il avoit placé sur le trône de Naples, & dont il avoit reçu plusieurs bienfaits, il envoya un gentilhomme au monarque, pour lui témoigner combien cet événement imprévu coûtait à son cœur, & pour le prier de vouloir bien reprendre les terres considérables qu’il lui avoit données. Plusieurs autres traits de sa vie annoncent un cœur magnanime & à l’abri de tout soupçon.

Voilà donc, encore une fois, deux préjugés contradictoires sur le même fait, & d’après le grand principe qui vient d’être posé dans un journal, l’auteur du nouveau mélodrame auroit pu choisir, en cette alternative, la version qui lui auroit le mieux convenu ; il auroit pu faire de ce pauvre défunt un honnête homme ou un scélérat, selon le bon ou le mauvais effet que cela eût produit dans la pièce : à quoi tient la réputation des morts !

Quant à moi, je me contenterai de dire qu’entre deux faits historiques également douteux, dont l’un accuse, & l’autre justifie, j’admettrai toujours de préférence celui qui le flétrit la mémoire de personne.

Mais voici une digression qui m’a mené trop loin, & qu’aucuns jugeront superflue, d'autant que l’auteur du mélodrame ne s’est pas trouvé dans le cas de l’option ; son prétendu Gonsalve de Cordoue n’appartenant nullement à l’histoire ; c’est un personnage de roman chevaleresque, & des plus fous qu’on puisse inventer.

Gonsalve, chevalier espagnol, surnommé la terreur des Maures, aime éperduement Azéma, fille du prince des Abencerages, qui règne dans la ville de Grenade. Dans l’espoir de plaire à cette belle, il prend le turban et le cimeterre, & vient, sous un nom supposé, combattre auprès de la princesse. Il fait plus, il lui sauve la vie.

Le monarque, père d’Azéma, fait alors publier dans Grenade que la main de sa fille appartiendra à qui pourra lui livrer mort ou vif le plus cruel ennemi des Maures ; c’est de Gonsalve qu’il s’agit, & ce brave Espagnol dissimule ; mais outré comme un des prétendans, qui se flatte d’un triomphe facile, il ose se découvrir à ce présomptueux, & le provoque au combat..... Dire en peu de mots les suites de cette imprudence seroit chose assez difficile, & la place commence à me manquer ; qu’il suffise donc de savoir qu’après beaucoup de vicissitudes, notre aventureux chevalier obtient de sa reine la permission d‘épouser Azéma, & que la paix étant faite dès-lors entre les Maures & les Espagnols, ces deux peuples n’en forment plus qu’un pour danser aux noces de Gonsalve.

Ce sujet est tiré d’un joli roman de M. de Florian, & la pièce ressemble singulièrement à l’opéra de Zoraïme & Zulnar, par M. de Saint-Just ; mais elle ne vaut, à aucun égard, ni le roman, ni l’opéra.

On l’a pourtant fort applaudie.

L’auteur a été demandé, nommé & amené sur la scène ; il s’appelle M. Dorvo.

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