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L'Hermite de la Sierra Morena

L'Hermite de la Sierra Morena, mélodrame, en trois actes, à grand spectacle, de Mlle Le Riche, musique de Quaisain, ballets de Richard, 5 avril 1806.

Théâtre de l'Ambigu-Comique

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Fages, 1806 :

L'Hermite de La Sierra-Morena, mélodrame en trois actes, à grand spectacle, Par Mademosielle L. R***, Auteur de Caroline et Storm, ou Frédéric digne du trône, Musique de M. Quaisain, Ballets de M. Richard, Pensionnaire de l'Académie Impériale de Musique, Représenté pour les premières fois, à Paris, sur le Théâtre de l'Ambigu-Comique, le 5, 7, 8, 9, 11, 12, 14, 15, 16, 18, 19 et 20 Avril 1806.

Après la liste des personnages, un « avis » donne des indications sur la façon de représenter la pièce :

AVIS.

A la représentation de ce Mélodrame, le premier acte se termine à la fin de la scène 18, et l'on supprime entièrement les scènes suivantes 19 et 20.

L'on supprime aussi tout ce qui a rapport à la Boîte trouvée par les enfans, et à leur enlèvement par Diégo.

A la dernière scène de la pièce, D. Alphonse s'empare du Poignard de D. Carlos, au lieu de son épée.

Courrier des spectacles, n° 3349, 7 avril 1806 :

[Le compte rendu du nouveau mélodrame commence par une présentation un peu ironique de la pièce, qui montre tout de même un curieux ermite, un ermite de théâtre ou de roman. Suit un résumé de l'intrigue, la rivalité de deux hommes, dont l'un ruine son rival, avant d'être pris de remords et de se retirer dans un hermitage justement là où sa victime et sa famille, devenus misérables, se sont réfugiés. Il donne aux deux enfants une bourse d'or qui, loin de sauver cette famille, les met dans une position difficile : cet argent ne serait-il pas celui de l'homme dont on vient de trouver le cadavre dans la forêt ? Le Seigneur du lieu découvre à la fois que son intendant, est responsable à la fois de la mort de l'homme assassiné et de la disgrâce de son rival. Un scène très poignante permet de rendre à don Alphonse ses droits, et de montrer la générosité de son pardon envers son rival. Tout finit bien, comme toujours. Le jugement porté sur la pièce en souligne les qualités d'intérêt, mais aussi en condamne le caractère verbeux (trop de déclamation) et la construction maladroite (entrées et sorties mal motivées). Sans ces défauts, la pièce n'aurait pas été aux prises avec des contradictions qui s'ajoutaient à « la mauvaise volonté d'un certain nombre de spectateurs » (la claque, bien sûr, contre l'auteur ou contre le théâtre...). Certes la pièce n'est pas bonne, mais certains sifflets ne sont pas justifiés. Et les ballets comme les décors et la musique ne sont pas sans valeur. De qui est la pièce ? D'une demoiselle, dont le nom n'est pas donné, et des auteurs habituels de l'Ambigu-Comique, Quaisain pour la musique, Richard pour le ballet.]

Théâtre de l’Ambigu-Comique.

L’Hermite de la Siéra-Morena.

Cet Hermite ne ressemble pas à ces pauvres pénitens qui habitent le creux des rochers, où les lieux les plus retirés des forêts, qui passent leurs tems en prières, et ne sortent de leur retraite que pour mendier quelques aumônes qui prolongent leur existence. C’est un Hermite de haut parage, comme on en fabrique depuis quelque tems dans les mélodrames et dans les romans, dignes successeurs des Contes des Fées. Voici a-peu-près son histoire :

Il se nomme Don Sanche ; il vivoit à la cour, et briguoit les premiers emplois. Pour y parvenir, il falloit perdre Don Alphonse d'Axillos ; il emploie contre lui de fausses pièces, lui fait perdre l’honneur et la fortune, et le réduit à un tel point de misère qu’il est contraint, lui et sa famille, de vivre malheureusement dans un triste village ; mais bientôt Don Sanche éprouve des remords, se condamne à la retraite, et choisit son hermitage précisément dans le lieu où vit Don Alphonse.

Il reconnoît ses victimes dans cette famille infortunée, et il remet aux deux enfans une bourse pleine d’or, dont ils s’empresse de faire hommage à leurs parens. Don Alphonse ne veut point accepter ce don d’un inconnu ; mais enfin vaincu par les sollicitations d’un vieux serviteur, qui sacrifie tout pour son ancien maître, il le charge d’en faire l’usage qui lui conviendra. Le bruit de cette augmentation de fortune se répand bientôt, et l’on apprend dans le même moment qu’un voyageur vient d’être assassiné dans le bois, et dépouillé de tout ce qu’il possédoit.

Un nommé Alvar, admis sous le nom de Diego, comme intendant du château du seigneur don Carlos, profite de cet incident pour perdre don Alphonse qu’il a rencontré près de-là, car comme il est le fabricateur des fausses pièces sur lesquelles le comte d’Axillos a été condamné ; il ne se croit pas en sûreté tant que sa victime respire. Il l’accuse donc auprès de don Carlos qui arrive dans sa terre ; il le fait arrêter de son autorité privée et jetter dans un cachot. Don Carlos ne peut se résoudre à croire Alphonse coupable ; il interroge ses deux enfants qui lui disent la vérité, et qui lui avouent ingénument que l’argent dont leur père étoit devenu tout-à-coup possesseur leur avoit été donné par un vénérable hermite. Cette déclaration jete des soupçons dans l’ame du Seigneur sur la bonne foi de son intendant ; bientôt il découvre qu'il a deux noms, et qu’auparavant il s’appeloit don Alvar ; enfin, la correspondance trouvée sur le cadavre de l’homme assassiné, le désigne comme le plus cruel persécuteur du comte d’Axillos. Don Carlos le fait arrêter : il mande en même tems l’Hermite qui vient au château, et qui retrouve dans l’épouse de don Carlos une fille qu’il n’avoit point vue depuis long-tems ; don Alphonse libre et rendu à sa famille, vient remercier don Carlos ; il trouve don Sanche que son habit l’empêche de reconnoître, mais bientôt celui-ci se découvre. Le comte d’Axillos, furieux à la vue de celui qui a causé tons ses malheurs, oublie le secours qu’il en a reçu le jour même ; il s’empare d’une épée et veut l’en percer : on le retient. Don Sanche est à ses pieds et attend le coup de la mort ; le Comte épargne sa victime, lui pardonne, et va reprendre à Madrid le poste honorable où l’avoit appelé la confiance de son roi.

Si cet ouvrage, qui offre un certain intérêt, avoit été conduit plus sagement, si l’auteur avoit fait scrupuleusement la guerre aux mots, s’il avoit évité ces répétitions de scènes longues et fastidieuses, qui ne sont que des déclamations sans aucun mérite, s’il avoit mieux combiné ses effets de scènes, et motivé avec plus de soin ses entrées et ses sorties, il n’auroit pas éprouvé des contradictions qu’augmentoit encore la mauvaise volonté d’un certain nombre de spectateurs. Il ne faut pas se le dissimuler, l’ouvrage n’est pas bon, mais plusieurs auditeurs avoient pris à tâche de siffler les passages même les moins susceptibles d’être improuvés. Les acteurs se sont trouvés déconcertés, et la représentation en a souffert. Le ballet, au second acte , présente plusieurs pas agréables; les décorations sont pittoresques et la musique bien en situation.

L’auteur des paroles est, ainsi que nous l’avons annoncé, une Demoiselle ; celui de la musique, M. Quaisain , et celui du ballet, M. Richard.

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