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Jean de Paris (1807, Marsollier)

Jean de Paris, mélodrame en trois actes et en prose, et à grand spectacle, de Marsollier, musique de Darondeau, 26 février 1807.

Théâtre de la Porte Saint-Martin.

Ne pas confondre avec la pièce homonyme de Saint-Just, musique de Boieldieu, censée exploiter la même histoire.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Barba, 1807 :

Jean de Paris, mélodrame en trois actes et en prose, et à grand spectacle, par M. Marsollier, musique de Darondeau. Représenté, pour la première fois, à Paris, sur le théâtre de la Porte Saint-Martin le 26 février 1807.

Courrier des spectacles, n° 3668du 27 février 1807, p. 3 :

Jean de Paris n’a obtenu, à la Porte St. Martin, qu’un succès médiocre ; la pièce est pourtant d’un auteur connu par les productions les plus estimables : c’est M. Marsollier ; la musique est de M Darondeau ; nous parlerons demain de cet ouvrage avec plus d'étendue

Courrier des spectacles, n° 3671 di 2 mars 1807 :

[Avec un peu de retard, le critique revient sur la pièce dont il avait parlé rapidement sans grand enthousiasme. Il commence par contester le choix de l'illustre Marsollier de s'essayer à un mélodrame : ce genre particulier, qui exige « mille et un détails » qui ne sont pas nécesaires sur les grands théâtres : le succès a été moindre que ce qu'on pouvait espérer. Et ces propos généraux s'achève sur une notation énigmatique : « C’est d'ailleurs un sujet national ». La suite de l'article se réduit à un long résumé d'une intrigue aux allures de cours d'histoire, avec le roi de France et le roi d'Angleterre accompagné d'une foule de nobles courtisans. Les deux rois sont venus chercher épouse auprès du roi d'Espagne (on voit d'ailleurs l'Infante). Mais le combat entre les deux rois n'est pas égal : l'un est un jeune homme plein de gaîté, l'autre un vieillard aux cheveux blancs : le choix de l'Infante est facile à faire, et il suffit que celui qui voyage incognito sous le nom de Jean de Paris paraisse avec les insignes du pouvoir pour que ce soit lui qui soit choisi, le roi d'Angleterre ne s'opposant pas à ce que son rival soit choisi par le roi d'Espagne. Après ce résumé, le critique se limite à dire que de toutes les danses nationales qu'on voit à la fin de la pièce, « la palme est restée à la danse française ». Et il félicite les interprètes, en particulier deux d'entre eux qui « ont eu la plus grande partie des honneurs de la soirée.

Une pièce montrant la rivalité entre la France et l'Angleterre pour obtenir la main de l'infante d'Espagne, en 1807, ce n'est pas sans portée politique. Et la pièce ne traite pas de façon équitable les deux souverains, un dénouement étonnant ridiculisant un peu le pauvre Édouard. Le roi de France mis en scène est très certainement Jean II dit « le Bon », roi de 1350 à 1364 (il évoque son père, le roi Philippe VI), et le roi d'Angleterre Edouard III, dont le règne s'étend de 1327 à 1377. Le problème est qu'ils sont censés rencontrer la duchesse d'Albe, titre connu depuis le 15e siècle seulement. Quant à l'infante Éléonore, qui est-elle ? La seule candidate que j'envisage serait Leonor de Guzman, la maîtresse d'Alphonse XI. A moins que le royaume espagnol soit en fait le royaume de Navarre et qu'Éléonore soit la fille de Jean II de Castille et infante de Castille. Mais elle ne naît qu'en 1362 (un peu tard pour être la possible fiancée de notre Jean le Bon). Je ne suis pas sûr que la pièce soit très fiable sur le plan de histoire...]

Théâtre de la Porte S t-M art in.

Jean de Paris.

Ce mélodrame est un nouvel exemple de l'instabilité des choses humaines Un auteur distingué par les succès sur un des premiers théâtres de la capitale a voulu encore cueillir des lauriers dans une carrière dont le bon goût devoit lui défendre l’entrée. Il auroit dû, avant de s’y hazarder, se rappeler qu’avant lui plusieurs auteurs, gens de beaucoup d’esprit d’ailleurs, y avoient échoué. Le mélodrame demande une étude toute particulière, et d’autres soins qu'un grand opéra ou un opéra-comique. C'est un genre tout populaire dont le principal mérite consiste dans mille et un détails que n’exigent pas les cannevas qu’on met en scène aux grands théâtres, et qui sont soutenus par ce que la musique a de plus séduisant. Jean de Paris n’a point été sans succès ; mais on attendoit quelque chose de plus élevé de la part d’un auteur distingué par des productions qui semblent fort au dessus du mélodrame. Pour tout autre, le triomphe seroit suffisant. C’est d'ailleurs un sujet national.

Jean de Paris est le roi Jean, qui, jeune encore, et maître du trône que lui a laissé son père, se propose d’aller en Espagne épouser l’Infante, qui lui a été autrefois promise, mais que le Roi d’Angleterre, Edouard, déjà vieux, désire avoir pour femme, afin de s’assurer des droits à la couronne d’Espagne. L’auteur a fait du roi Jean un écolier espiègle, et du Roi d’Angleterre un bon homme qui dit et fait les choses les plus ridicules.

Jean , malgré la guerre que lui fait le duc de Bretagne, s’échappe incognito de sa capitale, voyage sous le nom de Jean de Paris. Il arrive aux frontières d’Espagne avec deux seigneurs et une suite nombreuse ; il se fait passer pour un riche négociant qui aime à mener grand train et à dépenser gaîment sa fortune. Sur la même route voyage Edouard, que le Roi d'Espagne a invité à venir à sa cour, pour épouser l’Infante.

Jean le rencontre en chemin, s’empare des auberges, et s’approprie, pour lui et pour ses gens, tout ce qui se trouve dans les cuisines. Le Roi d’Angleterre et sa suite sont affamés, mais Jean est généreux. En bon bourgeois de Paris, qui sait vivre, il invite Edouard et les seigneurs anglais de sa suite à dîner avec lui. Le Roi d’Angleterre croit lui faire beaucoup d'honneur en acceptant son dîner. On part, Jean prend les devans, arrive à un château baigné par une large rivière ; il ne laisse pas même un bateau pour ceux qui viennent derrière lui, ensorte qu’Edouard est obligé d’attendre qu’il veuille bien lui en envoyer un pour le passer lui et ses gens.

Le Château est habité par la duchesse d’Albe. Elle a près d’elle l’Infante Eléonore, qui, sous le nom d’Inès, garde le plus rigoureux incognito. La vue de cette jeune personne séduit le Roi de France. La duchesse d’Albe et Eléonore connoissent le secret du Roi, et elles finissent par lui avouer que c’est l’Infante elle-même qui est devant lui ; mais il veut jusqu’au bout rester inconnu. Le Roi d'Angleterre arrive. Eléonore le compare à Jean de Paris, et l’aspect de ses cheveux blancs ne contribue pas peu à la décider pour le Prince français. Cependant on s’embarque ; on arrive à Burgos, où est la cour. Le Roi d'Espagne, informé de l’arrivée du Roi d’Angleterre et d’un jeune Français sous le nom de Jean de Paris, ordonne une fête splendide. Il présente sa fille à Edouard ; tout-à-coup Jean se présente, non plus eu habit de voyageur, mais la couronne sur la tête. Il reclame la promesse que le Roi d’Espagne a faite autrefois d’unir sa fille au fils du Roi de France ; i! se nomme. Edouard, toujours sans malice, y consent , et une fête vient terminer la journée.

On a vu dans cet ouvrage des danses anglaises, espagnoles, françaises ; mais la palme est restée à la danse française ; Morand et Mlle. Caroline ont eu la plus grande partie des honneurs de la soirée. Les acteurs ont bien joué les rôles qui leur étoient confiés.

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