La Leçon d'une femme

La Leçon d'une femme, opéra comique en un acte, paroles de M. *** [Alexis de Charbonnières], musique de *** [Marcel Duret], 6 mai 1815.

Théâtre de l'Opéra-Comique.

Titre :

Le Leçon d’une femme (la)

Genre

opéra comique

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ,

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

6 mai 1815

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra Comique

Auteur(s) des paroles :

Alexis de Charbonnières

Compositeur(s) :

Marcel Duret

Almanach des Muses 1816.

Dermance est infidèle ; la lettre d'une maîtresse vient de tomber entre les mains d'Orphis. Que fait cette épouse outragée ? Vous croyez qu'elle se désole : point du tout ; elle répond à sa rivale au nom de Dermance, enflamme son amour, obtient lettres, portrait. Sur ces entrefaites, Dermance, dont certain oncle éveillait innocemment les soupçons, revient des eaux ; il rentre chez lui précisément au geste que fait Orphise pour cacher furtivement quelque chose dans son sein.... On devine que ce sont les lettres et le portrait de sa rivale.... Une explication est demandée ; Orphise se trouble, on hésite ; enfin l'époux est mystifié.

Sujet rebattu ; poëme insignifiant ; musique faible ; jolis motifs. Peu de succès.

Journal de Paris, n° 128 du 8 mai 1815, p. 1-2 :

[L'article commence par un grave problème (au moins aux yeux du critique), le titre, jugé amphibologique. Leçon donnée ou reçue par une femme ? Pour Martainville, le critique, c'est presque toujours le mari qui a besoin d'une leçon. Mais ce genre de leçon, les maris ne la trouvent guère au théâtre, même si l'auteur de la pièce a tenté de présenter cette belle morale de façon agréable. L'intrigue raconte l'audacieuse tentative d'une femme, qui a reçu une lettre de la maîtresse de son mari, et qui écrit à cette femme au nom de son mari. L'oncle du mari met en garde son neveu du risque que court son couple, et le pauvre mari se précipite pour se retrouver face à sa femme qui le confond en lui montrant les lettres qu'elle a échangées avec sa mystérieuse correspondante. « Généreuse comme le sont toutes les femmes en pareille circonstance, elle ne se venge qu'en lui pardonnant », cette opinion du critique n'engage que lui. On voit que le sujet n'a rien de neuf ni de piquant, d'autant que l'auteur n'a pas tiré des situations qu'il met en scène tout ce qu'on en pourrait tirer. La musique, d'un jeune compositeur, virtuose par ailleurs, « manque essentiellement de couleur dramatique ». On y a remarqué toutefois « plusieurs motifs de chant très-agréables. La pièce ne devrait pas plus entrer au répertoire que Richard, le débutant du vendredi n'entrer a dans la troupe lyrique. Le critique le soupçonne d'ailleurs de n'avoir paru que pour pouvoir se vanter d'avoir chanté sur le Théâtre Feydeau.

THÉATRE DE L'OPÉRA-COMIQUE.

Première représentation de la Leçon d'une femme, opéra-
comique en un acte. – Début de M. Richard.

Le titre seul de cette petite nouveauté peut déjà donner lieu à une observation critique. Il ne présente pas un sens bien déterminé. La Leçon d'une femme est-ce la leçon qu'une femme donne ou la leçon qu'elle reçoit ? Mais il y aurait une affectation d'autant plus rigoureuse à chicaner sur l'amphibologie de l'affiche, que peu de personnes auront été trompées par le double sens. On a dû généralement penser que la leçon s'adressait à celui qui en avait le plus besoin, et nous sommes trop justes et trop galans pour nier que ce ne soit presque toujours au mari qu'une leçon est nécessaire. Pour moi, j'en ai l'intime persuasion, quoi que je n'aie pas encore de raisons particulières pour professer une pareille doctrine ; mais qui sait ? ces principes pourront me servir un jour ; il n'y a pas de mal à m'y entretenir d'avance.

Je doute que la morale mise en musique à Feydeau soit utile à quelques maris. On ne va guère la chercher au théâtre ; quand on la trouve, on n'en profite pas, et pourtant on exige toujours qu'elle y soit agréablement présentée. Voici comment l'auteur a essayé de parvenir à ce but.

Pendant que M. Dermance est aux eaux, Orphise, sa jeune épouse, habite avec l'oncle de son mari une terre peu distante de Paris. En lui faisant parvenir ses lettres, on en a mis, par mégarde, dans le paquet, une qui s'adressait à Monsieur. Madame la décachète, sans doute aussi par mégarde, et puis comment résister à la tentation ? c'est une écriture de femme. Une amante délaissée reproche à Dermance l'abandon où il la laisse depuis deux mois. Orphise trouve assez divertissant de répondre à la lettre en contrefaisant son écriture ; elle se plaît à rallumer dans le cœur de sa rivale tous les feux de l'amour ; une correspondance s'établit ; elle devient si active que l'oncle en conçoit des soupçons ; sans les communiquer précisément à Dermance, il lui donne à entendre que sa présence peut-être utile auprès de sa femme.

L'époux s'empresse d'accourir. En vain il voudrait avoir avec l'oncle un entretien secret avant de se présenter devant Orphise. Elle est instruite du retour qu'on veut lui cacher, et prend si bien ses mesures que Dermance, en croyant entrer chez son oncle, est dans l'appartement de sa femme ; elle feint d'être surprise, serre précipitamment des lettres et un portrait qui paraissaient l'occuper vivement. Le mari se livre, non sans quelqu'apparence de raison, aux plus fàcheuses conjectures ; il veut, il exige un éclaircissement. Quelle est sa confusion ? quel est le triomphe d'Orphise, quand elle montre à son infidèle les lettres et le portrait d'une rivale. Généreuse comme le sont toutes les femmes en pareille circonstance, elle ne se venge qu'en lui pardonnant.

On voit que le sujet de cette pièce n'a le mérite d'être ni neuf, ni piquant. On en peut dire autant de la manière dont il a été traité. L'auteur n'a pas même tiré de plusieurs situations qu'il s'est borné à indiquer.

La musique est, dit-on, le premier ouvrage d'un virtuose qui s'est acquis une grande réputation par un talent supérieur sur le plus difficile des instrumens, et que la muse de la mélodie s'est plue [sic] à récompenser en lui donnant pour compagne une de ses plus chères favorites.

Cette composition, dans laquelle on trouve quelquefois de l'esprit et de la grâce, manque essentiellement de couleur dramatique ; l'ouverture a fait le plus grand plaisir. A travers une harmonie dont la progression est combinée avec beaucoup d'art, on a remarqué plusieurs motifs de chant très-agreables. Elle a été exécutée avec une précision parfaite. On a aussi beaucoup applaudi un air sur un mouvement de bolero chanté par Mme Boulanger. Ce sont à-peu-près les deux seuls morceaux qu'on puisse citer.

La Leçon d'une femme ne peut pas plus espérer de prendre rang au répertoire de l'Opéra-Comique, que M. Richard, qui a débuté vendredi à ce théâtre, ne doit se flatter d'être admis dans la troupe lyrique. J'ai entendu dire qu'il n'en avait pas même le projet, qu'il débutait sans prétention et sans conséquence, seulement pour avoir le droit de dire en province qu'il a passé par le théâtre Feydeau. A la bonne heure ; son passage ne lui laissera d'ailleurs aucun souvenir désagréable. On l'a écouté avec une paisible bienveillance ; il a même reçu quelques applaudissemens qui ont eu d'autant plus d'éclat, qu'ils retentissaient dans le vide. M. Richard, qui a joué la Jambe de Bois et Ali de Zémire et Azor, a de l'intelligence, de l'habitude, trop d'habitude peut-être ; il offre, dans l'ensemble de son talent, une très-honnête médiocrité ; nous trouvons cela, sans le faire venir de province, dans plus d'un acteur de Feydeau.

A. Martainville.          

Zémire et Azor est une comédie ballet de Marmontel, musique de Grétry, ctéée en 1771.

Magasin encyclopédique des sciences, des lettres et des arts, année 1815, tome III (mai 1815), p. 162-163 :

THÉATRE DE L’OPÉRA. COMIQUE.

La Leçon d'une Femme, opéra comique en un acte, joué le 6 Mai.

Pendant que M. Dermance est aux eaux, Orphise, sa jeune épouse, habite avec l'oncle de son mari une terre peu distante de Paris. En lui faisant parvenir ses lettres, on en a mis, par mégarde, dans le paquet, une qui s'adressoit à Monsieur. Madame la décachète : c'est une écriture de femme. Une amante délaissée reproche à Dermance l'abandon où il la laisse depuis deux mois. Orphise trouve assez divertissant de répondre à la lettre, en contrefaisant son écriture ; elle se plaît à rallumer dans le cœur de sa rivale tous les feux de l'amour ; une correspondance s'établit ; elle devient si active que l'oncle en conçoit des soupçons : sans les communiquer précisément à Dermance, il lui donne à entendre que sa présence peut être utile auprès de sa femme.

L'époux s'empresse d'accourir. En vain il voudrait avoir avec l'oncle un entretien secret avant de se présenter devant Orphise ; elle est instruite du retour qu'on veut lui cacher, et prend si bien ses mesures que Dermance, en croyant entrer chez son oncle, est dans l'appartement de sa femme ; elle feint d'être surprise, serre précipitamment des lettres et un portrait qui paroissoient l'occuper vivement. Le mari se livre, non sans quelque apparence de raison, aux plus fâcheuses conjectures ; il exige un éclaircissement. Quelle est sa confusion ! Quel est le triomphe d'Orphise, quand elle montre à son infidèle les lettres et le portrait d'une rivale ! Elle ne se venge qu'en pardonnant.

Le sujet de cette pièce n'est ni neuf ni piquant. On en peut dire autant de la manière dont il a été traité. L'auteur n'a pas même tiré parti de plusieurs situations qu'il s'est borné à indiquer.

La musique est, dit-on, le premier ouvrage d'un virtuose qui s'est acquis une grande réputation par un talent supérieur sur le violon. Sa composition, dans laquelle on trouve quelquefois de l'esprit et de la grâce, manque essentiellement de couleur dramatique. L'ouverture a fait grand plaisir : à travers une harmonie, dont la progression est combinée avec beaucoup d'art, on a remarqué plusieurs motifs de chant très-agréables. On a aussi beaucoup applaudi un air sur un mouvement de boléro chanté par Madame Boulanger. Ce sont à peu près les deux seuls morceaux qu'on puisse citer.

Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, p. 302, donnent le nom du librettiste, Alexis de Charbonnières, et du compositeur, Marcel Duret. Opéra-comique qui n’a connu qu’une représentation, le 6 mai 1815.

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