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Laure et Fernando

Laure et Fernando, fait historique sous la date de 1738, en prose et en quatre actes, de Dumaniant, 19 nivôse an 10 [9 janvier 1802].

Théâtre de Molière.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Barba, an 10 – 1802 :

Laure et Fernando, fait historique, sous la date de 1738, en prose et en quatre actes, Représenté, pour la première fois, à Paris, sur le théâtre de Molière. A.-J. Dumaniant. Dumaniant, 19 nivôse an 10 [9 janvier 1802].

En dessous de la liste des personnages :

La scène est à Ségovie. Les deux premiers actes se passent dans la maison de D. Simon, et les deux derniers dans une salle gothique de la tour de Ségovie.

Les acteurs sont placés au théâtre comme ils le sont en titre de chaque scène : celui dont le nom est écrit le premier a son interlocuteur à sa gauche ; il en est ainsi des autres.

AVERTISSEMENT.

Le hasard ayant réuni, pour quelques mois, au théâtre de Molière, plusieurs acteurs d'un mérite reconnu, c'est pour eux: que j'ai traduit, ou plutôt imité ce drame, dont le célèbre comte Olivades est l'auteur. Je laisse à ceux qui entendent l'espagnol à prononcer sur le mérite de mon travail. Si cette pièce a eu du succès à la représentation, ce succès est dû au fonds de l'ouvrage, qui présente de l'intérêt, et aux artistes qui l'ont si bien fait valoir.

Courrier des spectacles, n° 1776 du 20 nivôse an 10 [10 janvier 1802], p. 2 :

[Le compte rendu de ce « fait historique » situé en Espagne (historicité dont il n'est pas question...) commence d'emblée par un résumé de l'intrigue, aussi complexe que peu surprenante : un homme a été tué dans un duel, et un autre est accusé d'être celui qui a porté le coup fatal. Mais il est innocent, et toute la pièce tourne autour de sa condamnation à mort, qui sera finalement évitée. La pièce a rencontré un grand succès, grâce à l'« intérêt puissant » qui règne dans les deux preiers actes. Mais les deux derniers sont accusés d'être inutilement longs, la situation changeant trop peu du fait de la condamnation à mort d'un innocent. Le critique propose de les réduire à un seul acte, ce qui permettrait de supprimer un grand nombre de « lieux communs » convenus. De même il juge inutile le rôle de Laure, épouse de celui qui a tué dans un duel et souligne l'inutilité de la répétition de certaines scènes d'aveu. Les entrées et sorties devraient également être plus motivées. Le drame serait plus resserré, ce qui augmenterait son intérêt. Preuve du succès de la pièce, « l'auteur a été vivement demandé », et il ne reste plus qu'à féliciter les interprètes. Il suffirait de quelques coupures pour « attirer du monde à ce théâtre » (il n'y en a pas assez ?).

Théâtre de Molière.

Le comte de Ribéra, seigneur espagnol, ayant été tué eu duel sans que l’on connût l’auteur de sa mort, Laure, sa veuve, s’est remariée à Fernando, jeune homme qui, par ses brillantes qualités a mérité l’estime générale, et particulièrement celle de dom Simon, alcade de Ségovie et père de Laure. Depuis un an il s’occupe du bonheur de tout ce qui l’entoure, lorsqu’il apprend que la famille du Comte, après de longues recherches, est enfin parvenue à découvrir et à faire arrêter un des témoins de ce duel malheureux. A l’instant il projette de se dérober par la fuite, au supplice que les loix prononcent contre le coupable, et ce coupable, ou plutôt cet infortuné, qui en se défendant, a porté involontairement le coup de la mort du Comte, c’est lui, c’est Fernando. La crainte de porter le désespoir dans l’ame de son épouse lui fait prétexter des affaires indispensables qui l'appellent à Madrid. Envain son ami dom Carlos, envain son beau-père dom Simon veulent le dissuader d’entreprendre ce voyage ; il est sur le point de s’arracher des bras de ce qu’il a de plus cher, lorsque l’on vient lui annoncer l’arrestation de dom Carlos, accusé, dit on, d’être l'auteur de la mort de Ribéra. A cette nouvelle Fernando n’hésite plus, il oublie voyage, parens, épouse, il ne voit que son am: prêt à périr pour lui, il vole à la prison suivi de dom Sébastien, alcade de la cour. Celui-ci, juge intègre et vertueux, est témoin de la scène la plus attendrissante, du combat sublime de générosité entre ces deux amis, qui se dévouent l’un pour l’autre. Cependant, l’inflexible devoir a commandé, et dom Sébastien a, en plein tribunal, condamné Fernando à la mort ; mais en même-tems l’intérêt que lui inspire cet infortuné l’engage à écrire au roi pour obtenir sa grâce, et c’est en attendant la réponse qu’il va consoler le prisonnier. Fernando, qui n’a plus que quelques heures à exister, lui recommande sa femme, et sur-tout le prie de ne rien épargner pour trouver un être qui lui est bien cher, celui à qui il doit la vie, qu’il n’a jamais eu le bonheur de connoître, et il lui remet le portrait de sa bienfaitrice, qu'il croit être la même que sa mère, et une lettre écrite par l’auteur de ses jours. A ces preuves, dom Sébastien reconnoit que Fernando est son fils ; mais il le lui cache jusqu’à l’arrivée de la réponse du roi. Cette lettre arrive, mais le jugement est confirmé. Dom Carlos n’écoutant que son zèle et son amitié, monte à cheval, part pour Saint-Ildephonse, où est la cour, aborde le roi  ; se jette à ses pieds, et rapporte à Ségovie la grâce de Fernando, au moment où il alloit recevoir le coup de la mort.

Tel est le fonds d’un drame en 4 actes, représenté hier pour la première fois sur ce théâtre sous le titre de Laure et Fernando. Il a obtenu beaucoup de succès, et il faut en convenir, il y règne un intérêt puissant, sur-tout dans les deux premiers actes ; car les deux derniers, quoiqu’offrant de belles scènes entre Fernando et dom Sebastien, devroient se réduire à un, et l’ouvrage ne pourroil qu’y gagner. La condamnation à mort est prononcée après le second acte, en sorte que le condamné se présente durant deux actes entiers dans la même situation, et c’est extrêmement pénible ; d’ailleurs, il ne peut que se répéter ou débiter des lieux communs qui sont sûrs d’être applaudis mais qui sont quelquefois déplacés ;

. . . .Non erat his locus,

Le rôle de Laure est-il bien essentiel à la marche de la pièce ? Elle ne paroît que pour quelques scènes de sentiment qui, il est vrai, produisent toujours de l’effet. Il y a beaucoup de répétitions dans les deux rôles de Fernando et de Dom Sébastien qui apprennent successive ment à deux ou trois personnes l’un qu’il a tué Ribera, l’autre que Fernando est son fils. Ces taches peuvent aisément disparoître. L’auteur peut aussi donner plus de motifs aux entrées et aux sorties de ses personnages, et sur-tout à celles de Dom Simon. En resserrant son drame, il lui donnera bien plus d’intérêt encore, car rien ne le diminue plus que les scènes longues et remplies par des conversations au lieu de l’être par des évènemens.

L’auteur a été vivement demandé, c’est le cit. Dumaniant. Le cit, Martelly a réuni tous les suffrages dans le rôle de Fernando et Mlle Lecoutre dans celui de Laure. Les cit. J. B. Vanhove, Ernest-Vanhove et Juclié les ont secondés de tous leurs moyens ; en un mot, ce drame avec quelques coupures, ne pourra qu’attirer du monde à ce théâtre.

F. J. B. P. G***.          

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