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Le Méléagre champenois, ou la Chasse interrompue

Le Méléagre champenois, ou la Chasse interrompue, comédie-folie en un acte, de Pain. 5 messidor an 10 [24 juin 1802].

Théâtre du Vaudeville

Titre :

Méléagre champenois (le), ou la Chasse interrompue

Genre

comédie-folie

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ,

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

5 messidor an 10 [24 juin 1802]

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Joseph Pain

Almanach des Muses 1803

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Madame Masson, an X – 1802 :

Le Méléagre champenois, ou la Chasse interrompue, folie-vaudeville en un acte ; Par Joseph Pain.

Courrier des spectacles, n° 1937 du 6 messidor an 10 [25 juin 1802], p. 3 :

Le Méléagre Champenois, ou la Chasse interrompue, .folie-vaudeville en un acte, représenté [sic] hier pour la première fois à ce théâtre, a obtenu un succès que quelques improbateurs ont vainement voulu contester. L’auteur a été de mandé et nommé : c’est le cit. Joseph Pain. Le défaut de place nous force de remettre à demain l’analyse de cet ouvrage.

Courrier des spectacles, n° 1938 du 7 messidor an 10 [2- juin 1802], p. 3 :

[La pièce nouvelle représente dans la carrière de Joseph pain un tournant : après avoir écrit seul ou en collaboration des vaudevilles proches du drame, voilà qu’il veut s’illustrer dans le plaisant, voire le grotesque. Mais la réussite n’est pas entièrement au rendez-vous : « difficile de soutenir durant un acte entier le même ton de gaîté », et les spectateurs ont parfois manifesté leur ennui face à des longueurs. Mais il est possible de les supprimer pour la deuxième représentation, tout comme il est possible aux acteurs de mieux maîtriser leur texte, et ainsi de « donner plus de rapidité à l’action ». Après ce préambule moyennement positif, l’article fait le résumé d’une intrigue pleine d’action, mais d’une nouveauté toute relative (combien de pièces a-t-on déjà vu avec une erreur dans la distribution de lettres ?). On s’agite passablement dans la pièce, on se cache (cette fois, c’est dans le piédestal d’une statue), on est découvert, et tout finit par un mariage imposé à des gens qui ne demandaient pas mieux. L’annonce du mariage conclut l’article.]

Théâtre du Vaudeville.

Première Représentation du Méléagre Champenois, ou la Chasse interrompue.

Le citoven Joseph Pain qui jusqu’ici a donné la teinte du drame aux vaudevilles qu’il a travaillés seul ou conjointement avec le citoyen Bouilly, a voulu prouver qu’il savoit également peindre des tableaux plaisans, et même grotesques, et il a fait le Méléagre Champenois, ou la Chasse interrompue. A-t-il également réussi dans ce genre ? nous ne le croyons pas. Il est si difficile de soutenir durant un acte entier le même ton de gaîté, sur-tout dans le genre burlesque, que malgré les traits d’esprit dont le cit. Pain a semé son ouvrage, nous n’avons pas été étonnés de voir que les spectateurs ne pouvoient s’empêcher de manifester quelquefois leur improbation. La suppression de quelques longueurs à la seconde représentation de cette folie et la mémoire plus sûre des acteurs n’auront pu que donner plus de rapidité à l’action.

Voici le fonds de ce vaudeville :

M. de la Donjonnière, chasseur déterminé, célèbre en Champagne pour avoir poursuivi et tué un loup sous les murs de Troyes, se prépare à aller à la chasse avec Rustaut, son premier veneur, mais avant de partir, soupçonnant un certain Renaudin, bel-esprit du canton, d’être amoureux de sa femme Indoline, quoiqu’il le voie tous les jours travailler à un roman avec sa belle-sœur Cœsara, il ordonne à ces dames de lui fermer la porte, parce que, dit-il,

Je ne veux pas , quoique l’on fasse,
Comme un Amphytrion nouveau,
Souffrir quand je suis à la chasse,
De Braconnier dans mon château.

Mais à peine a-t-il disparu, que Renardin arrive, c’est le chef de la Société littéraire. Il apporte à Indoline un flacon d’une liqueur propre à guérir ses vapeurs, et à Cœsara un chapitre de son roman écrit d'une manière neuve et inintelligible. Il lui donne ainsi la clef de certains mots :

Les monts de bois sont couronnés,
C’est la terrestre chevelure ;
Et ces œillets si festonnés,
Les falbalas de la nature.
Les bleds dont le Ciel nous fit don
Sont la napper de l’abondance,
Et le tendre et naissant gazon
L’édredon de la Providence.

Ensuite il remet à l’une la manière de se servir du flacon, et à l’autre un billet-doux, mais il se presse tant, qu’il donne le billet à Indoline et l’ordonnance à Cœsara. La Donjonnière qui n’est point parti arrive, surprend presque Renardin, qui se sauve par une galerie ; tandis que les femmes sont inquiètes sur son sort, Rustaut tire un coup de fusil ; Indoline se trouve mal, elle croit qu’on a tué Renardin : Point du tout, c’est un chien enragé. La société littéraire ayant décerné à la Donjonnière pour récompense de ces hauts faits une statue de Méléagre qui se trouvoit dans le lieu de ses séances, on l’apporte avec le piédestal ; et Renardin qui est resté dans le château, et qui craint d’être pris et tué, se cache dans ce piédestal ; Rustaut en est instruit ; il apporte à la Donjonnière le billet-doux que madame Indoline a laissé tomber ; il indique la retraite de Renardin que la Donjounière force d’épouser sa sœur. Le bel esprit et la romanesque Cœlina ne demandent pas mieux, et le mariage se conclut.

La Décade philosophique, littéraire et politique, an X, IVe trimestre, n° 29 (20 Messidor, an X), p. 52-54 :

[Article repris dans l’Esprit des journaux français et étrangers, trente-unième année, thermidor an X [août 1802], p. 205-208.

Le compte rendu s’ouvre par un joli mouvement d’indignation : pourquoi désigner une pièce comme « folie », comme si c’était là un genre particulier, répondant à des critères propres. En tout cas le Méléagre Champenois apparaît comme un vaudeville comme les autres, une petite comédie plus bouffonne que comique, tout en restant dans les limites du convenable. Le résumé de l’intrigue ne révèle en effet rien de bien original, un frère et une sœur, des caractères qui contrastent fortement, une intrigue sentimentale contrariée qui finit par le mariage que tout le monde attendait. La pièce a réussi, par « des aperçus plaisans et des couplets spirituels » que le public a su apprécier. Le compte rendu s’achève sur un « très-joli couplet » qui ridiculise le style pastoral. L’auteur a été nommé.

Les lardins (qui donnent leur nom à la société littéraire à laquelle appartient Césara, la sœur du Méléagre champenois) sont des morceaux de lard qu'on donne en récompense aux faucons.]

Théâtre du Vaudeville.

Le Méléagre Champenois. Folie.

Pourquoi les auteurs modernes se donnent-ils aujourd'hui tant de peine pour varier l'affiche qui annonce leurs productions ? Ne vont-ils pas directement contre leur intérêt en réveillant ainsi la curiosité du public, déjà disposé naturellement à une exigeance sévère ? N'est-ce pas une chance de plus pour la critique ? Que veut dire Folie, et depuis quand la folie est-elle un genre ? Toute comédie doit avoir la mesure de gaîté que le sujet comporte : pourquoi donc en promettre d'avance plus qu'on ne pourra peut-être en donner ? N'est-ce pas imiter avec le public ce que font certains narrateurs maladroits dans la société, qui glacent le rire et le repoussent en paraissant ne pas douter de le produire ? Est-ce pour distinguer le comique du bouffon ? Le public ne s'y trompera pas. Est-ce pour appeler l'indulgence ? On manque son but : le titre de folie promet à la rigueur un excès de gaîté ; on s'y attend, et, quelques efforts que fasse l'auteur, il s'expose à rester au-dessous de ce que l'imagination prévenue peut exiger.

L'auteur du Méléagre Champenois ne paraît pas avoir de raison particulière d'intituler son vaudeville autrement que les autres. Sa pièce est une petite comédie du genre à la vérité peut-être plus bouffon que comique, mais dont la gaîté n'excède point les bornes permises.

M. de la Donjonnière, chasseur intrépide et déterminé, a tué, dans une commune de Champagne, un loup qui la ravageait, et s'est acquis, par cet exploit, une réputation de courage et d'adresse.

La société littéraire des Lardins, dont sa sœur est membre, lui fait hommage par reconnaissance d'une statue de Méléagre ; mais il a un démêlé avec M. Renardin, membre de cette société, et ne veut pas le voir chez lui.

Sa femme, Indoline, naturellement vaporeuse, qui s'ennuie mortellement en Champagne dans ce vieux château solitaire, et sa sœur Césara, bel esprit romanesque, également ennemie de l'isolement, s'obstinent à recevoir ce M. Renardin, poète champenois : il fait un roman avec Césara, et fournit des antispasmodiques à Indoline. Par un quiproquo, il remet à celle-ci une lettre d'amour qu'il destinait à Césara. La Donjonnière, déjà très-jaloux, surprend ce billet que la vaporeuse laisse tomber. Renardin, obligé d'éviter la présence de la Donjonnière , se cache continuellement, et a trouvé le secret de s'enfermer dans le piédestal de la statue de Méléagre qui originairement avait été construit pour une expérience de fantasmagorie. On l'y découvre ; le quiproquo s'explique, et il épouse Césara, qui de son roman fait ainsi une histoire.

Le comique de l'ouvrage résulte de la peur continuelle de ce Renardin, des deux caractères de la vaporeuse et de la romanesque ; de la ridicule prétention de la Donjonnière à se croire un personnage célèbre pour avoir tué quelques loups, et de la risible importance de l'Athénée champenois.

On ne peut disconvenir qu'il n'y ait souvent des aperçus plaisans et des couplets spirituels dans ce petit ouvrage, et le public les a saisis ; il a surtout su gré à l'auteur de l'avoir fait rire, ce qui n'est pas aujourd'hui si facile qu'on le croit.

Nous devons citer un très-joli couplet , en ce qu'il joint à la tournure spirituelle la critique judicieuse d'un style ridicule, dont c'est à la comédie et au vaudeville à faire justice, puisque le mauvais goût veut le consacrer, et que l'esprit de parti, toujours mal-adroit, n'a pas honte de le vanter comme un modèle à suivre. On verra bien par le couplet quel est l'objet de cette jolie épigramme :

Nos monts de bois sont couronnés,
C'est la terrestre chevelure ;
Et ces œillets si festonnés
Les falbalas de la Nature.
Les bleds dont le ciel nous fait don
Sont la nappe de l'abondance,
Et le tendre et naissant gazon
L'édredon de la Providence.

L'auteur a été demandé ; c'est le C. Joseph Pain, déjà connu à ce théâtre par quelques jolis ouvrages du répertoire.              L. G.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, VIIIe année (an X, 1802), tome premier, p. 416-417 :

[Après avoir résumé l’intrigue, le compte rendu évoque le succès de la pièce, un instant incertain? L’auteur est cité, avec le rappel de ses succès antérieurs, et l’éloge de sa pièce, malgré un dénouement « un peu brusqué ». On y trouve « différens traits semés dans le dialogue, et d'assez jolis couplets ». Le tout s’achève par un couplet, qui se moque d’un « nouvel ouvrage » que le critique ne nomme pas, « trop connu pour qu'il soit nécessaire de le nommer » (s’agirait-il du Génie du christianisme, paru le 14 avril 1802 ? C'est tout à fait possible !).]

THÉÂTRE du VAUDEVILLE.

Le Méléagre champenois, ou la Chasse interrompue.

M. de La Donjonière, chasseur déterminé, vit en Champagne avec sa femme et sa sœur Cæsara, auteur de romans. Renardin, membre de la société littéraire des Lardins, fait un roman avec Cæsara, dont il est amoureux. La Donjonière croit que c'est de sa femme qu’il s'agit, et lui fait refuser la porte. Celle du jardin se trouve ouverte, et Renardin entre. La Donjonière revient de la chasse ; Renardin court se cacher. Un coup de fusil se fait entendre, et La Donjonière entre en disant, je l'ai tué. Les deux femmes croyent qu’il s'agit de Renardin, et la scène offre un quiproquo fort comique. Bientôt après on apporte, de la part de la société littéraire , une statue de Mélagre, en reconnoissance des services que La Donjonière a rendus au pays, en tuant un loup. Renardin, qui ne sait où se cacher, se fourre dans le piédestal du Méléagre où il est surpris ; il finit par désabuser La Donjonière, et épouser Cœsara. Le succès de ce petit ouvrage a été balancé à la première représentation, qui a eu lieu le 5 messidor. Cependant les applandissernens l'ont emporté sur quelques sifflets, et l'on a nommé le C. Joseph PAIN, auteur d’allez avoir Dominique, de Florian, etc. Sa nouvelle pièce est gaie, c'est déja un mérite ; le dénouement est un peu brusqué, et on s’attendoit à quelque chose de plus : mais différens traits semés dans le dialogue, et d'assez jolis couplets, la feront revoir avec plaisir. Parmi les couplets applaudis, celui-ci a été redemandé. On y trouvera une bonne plaisanterie sur un nouvel ouvrage, trop connu pour qu'il soit nécessaire de le nommer.

Air : Il faut des époux assortis.

Les monts , de bois sont couronnés,
C'est la terrestre chevelure :
Et ces œillets si festonnés,
Les falbalas de la nature.
Les blés , dont le ciel nous fit don,
Sont la nappe de l'abondance ;
Et le vert et tendre gazon,
L'édredon de la providence.

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