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Le Moulin de Sans-Souci

Le Moulin de Sans-Souci, fait historique mêlé de vaudevilles, en un acte, de Dieulafoy, 18 Messidor an 6 [6 juillet 1798].

Théâtre du Vaudeville.

Quelques jours après la création du Moulin de Sans-Souci, les spectateurs ont pu aller voir sur le Théâtre Montansier le Meunier de Sans-Souci de Lombard de Langres, qui reprend une anecdote très proche de celle de la pièce de Dieulafoy.

Almanach des Muses 1799.

Une anecdote assez connue avait fourni au C. Andrieux le sujet d'un fort joli conte ; le C. Dieulafoi en a tiré le sujet d'une petite pièce qui a fait plaisir.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez le Libraire au Théâtre du Vaudeville, an VI :

Le Moulin de Sans-Souci, fait historique en un acte, en prose, mêlé de vaudevilles. Représenté, pour la première fois, sur le Théâtre du Vaudeville, le 18 Messidor, an 6. Par le Citoyen Dieu-la-foy.

Courrier des spectacles, n° 501 du 19 messidor an 6 [7 juillet 1798], p. 2-3 :

[Cette pièce, la première de Dieu-la-Foi, a été un grand succès, et elle fait l’objet d’un compte rendu très élogieux. Le résumé de l’intrigue est sans surprise : un roi qui veut abuser de son pouvoir, à qui son sujet résiste, et qui choisit de céder, en faisant le bonheur des jeunes gens qui souhaitent se marier. Le jugement porté sur la pièce en souligne les beautés : « de jolis couplets, de jolies scènes ». L’auteur est présenté comme plein des « plus grandes dispositions pour le genre du vaudeville ». De plus elle est remarquablement interprétée, et sa première est rendue avec beaucoup d’ensemble (ce n’était sans doute pas si fréquent). L’article s’achève par la reproduction de deux couplets, le couplet d’annonce, où le critique voit un peu vite « de la ressemblance entre la position de l’auteur et la pièce » et un couplet adressé par la jeune fille à Frédéric pour le convaincre de laisser son moulin à son futur beau-père.]

Théâtre du Vaudeville.

La comédie-vaudeville donnée hier à ce théâtre sous le titre du Moulin de Sans-soucy, a eu beaucoup de succès ; l’auteur a été vivement demandé, et le cit. Duchaume est venu annoncer que cet ouvrage étoit le début du cit. Michel Dieu-la-Foi.

Georges, vieil invalide Prussien, ne veut marier son fils Paulin à Nancy, fille de Guillaume Valter, meunier, qu’à condition que celui-ci donnera en dot son moulin à vent ; Guillaume n’y veut pas consentir, il tient beaucoup à son moulin qui étoit le seul bien de ses ancêtres. Frédéric, roi de Prusse, a donné ordre à plusieurs ingénieurs de faire abattre le moulin de Sans-soucy, qui peut nuire à la vue de sou château ; les ingénieurs se présentent, et au nom de Frédéric, ils demandent que le moulin soit abattu, sauf les indemnités à lui accorder; Guillaume ne veut pas consentir à la vente de son moulin. Les ingénieurs se retirent, et vont rendre compte à Frédéric du refus qu'ils viennent d’éprouver.

Frédéric se transporte sur les lieux. Bientôt Nancy l’apperçoit, et le prenant pour le père de son amant, elle le supplie de ne pas insister sur la concession du moulin. Guillaume survient ; Frédéric lui demande son moulin, nouveaux refus du meunier, instances, puis menaces du Roi de le faire abattre ; réplique fière de Guillaume, qu’il aura recours aux loix de Frédéric contre Frédéric lui-même : enfin le monarque vaincu par les réponses mâles et énergiques de Guillaume, se rend et consent à ce que le moulin ne soit pas abattu, pourvu que Paulin et Nancy soient unis, et qu’ils en ayent l’entière possession.

Cet ouvrage est infiniment joli et agréable ; il annonce dans l’auteur qui débute les plus grandes dispositions pour le genre du vaudeville ; les rôles de Frédéric et de Guillaume Valter sont bien faits ; le caractère de ce dernier est sur-tout bien prononcé, et ses réponses annoncent un homme d’une très-grande énergie. De jolis couplets, de jolies scènes, entr’autres celle où Nancy prend Frédéric pour le père de son amant, voilà ce qui assurera à cet ouvrage un succès constant et soutenu.

Cette pièce a été parfaitement jouée, et jamais première représentation n’a été rendue avec un plus parfait ensemble. Le cit. Vertpré a supérieurement saisi la démarche et l’attitude de Frédéric Nous nous plaisons à rendre justice à cet acteur qui tous les jours fait des progrès sensibles, et qui sur-tout a un masque excellent.

Le cit. Duchaume a très-bien rendu le rôle de Guillaume Valter, et les autres emplois ont été bien joués parles citoyens Rosières, Henry, Lenoble, et la Cit. Blosseville.

Couplet d’annonce.

Arlequin (au Public).

Arlequin trouve de la ressemblance entre la position de l’auteur et la pièce.

Air d’Arlequin afficheur.

Un roi veut détruire un moulin,
Un meunier lui fait lâcher prise ;
Le meunier n’est pas bien malin,
Mais un droit sacré l’autorise.
Je vois un autre souverain,
Le meunier, c’est l’auteur en transe,
Celui-là n’a de droit certain
Que dans votre indulgence.

Nancy à Frédéric.

Air : De la pieté filiale.

      Oui, ce moulin fait son bonheur,
      Est-ce à nous d’en priver un père ?
      Malheur à l’ingrat sur la terre
      Qui dépouille son bienfaiteur.
      En vain d’une fausse morale
      Se parent d’indignes enfans;
Peut-on jamais être heureux aux dépens
      De la piété filiale.

      Ah ! renoncer à ce dessein,
      Dont s’allume notre tendresse,
      Que nous importe la richesse,
      Le bonheur vaut mieux qu’un moulin.
      Sans lui d’une amour sans égale
      Pour vous ce cœur est pénétré ;
C'est dans le cœur qu’est le charme sacré
      De la piété filiale.

La Décade philosophique, littéraire et politique, sixième année, IVe trimestre, an 6, n° 30 du 30 Messidor, p. 172-173 :

Le Moulin de Sans-Souci.

Tout le monde connait cette anecdote et le conte charmant qu'elle a fourni au C. Andrieux. Un moulin gâtait un parc que le Roi de Prusse fesait faire. Il fallait l'abattre ou laisser le parc irrégulier. On proposa au Meûnier de le vendre : il s'y refusa. Le Roi le fit venir, n'obtint rien de plus, et se décida enfin à laisser subsister le moulin au milieu de son parc, comme un témoin de sa modération et de sa justice.

L'auteur a joint à ce fonds très-léger, quelques scènes ingénieuses, celle sur-tout où la fille du Meûnier prend le Roi de Prusse, qu'elle ne connaît pas, pour le père de son amant, vieux soldat, qu'elle attend, et qu'elle n'a jamais vu ; méprise d'autant plus naturelle que ce même moulin, demandé par le Roi de Prusse, doit l'être aussi par le vieil invalide, pour servir de dot à la future de son fils.

Il y a dans cette pièce de jolis couplets et de l'intelligence de la scène ; mais il nous semble que Frédéric, dans ses monologues et dans ses réflexions, se présente trop uniquement comme auteur, et qu'en se pénétrant bien du conte qui a servi de modèle, on aurait pu, dans la dernière scène, donner encore plus de bonhomie au Meûnier et plus de dignité au Prince.

Cet ouvrage, d'ailleurs justement applaudi , est le premier du C. Dieulafoi, et ce succès lui en promet d'autres, sur-tout si, continuant à soigner son style, il n'ose plus même se permettre des rimes inexactes, comme celle de tête qui est long, avec inquiète qui ne l'est pas, ainsi que dans ce couplet, que nous citons de mémoire.

Air : Jardinier ne vois tu pas :

Le pied n'est pas en montant,
Ce dont on s'inquiète :
De ceux qui vont s'élevant ,
On voit tourner plus souvent
        La tête. (ter.)

D'après la base César, la pièce a été jouée 52 fois du 6 juillet 1798 au 16 octobre 1799, au Théâtre du Vaudeville : 32 fois en 1798, 20 fois en 1799.

 

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