Mélite, ou le Pouvoir de la nature, comédie en trois actes, en prose, mêlée d'ariettes, paroles de Desfontaines, musique de Deshayes, 19 mars 1792
Théâtre Italien.
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Titre :
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Mélite, ou le Pouvoir de la nature
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Genre
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comédie mêlée d’ariettes
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Nombre d'actes :
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3
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Vers / prose
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prose, avec des couplets en vers
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Musique :
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ariettes
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Date de création :
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19 mars 1792
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Théâtre :
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Théâtre Italien
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Auteur(s) des paroles :
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Desfontaines
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Compositeur(s) :
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Deshaies
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Le Mercure universel a annoncé, dans son numéro du 19 mars, la première de Mélite ou le Pouvoir de la nature, mais le lendemain, c'est – par erreur – qu'il fait le compte rendu de Mélite ou le Pouvoir de l'amour.
Mercure universel, tome 13, n° 385 du mardi 20 mars 1792, p. 318-319 :
[Le vers mis en tête de l'article (Boileau, l'Art poétique, chant 3, vers 26) prévient le lecteur : la pièce nouvelle ne contient rien qui attache. Elle a d'ailleurs eu « un très-foible succès ». Le critique fait de l'intrigue un résumé très rapide et qui réduit la pièce à bien peu de choses. Alors que son intrigue est si peu de choses, l'auteur en a fait une comédie en trois actes où « aucun personnage n'intéresse », censée illustrer « la loi de la nature ». Elle est pourtant d'un auteur expérimenté, Desfontaines. La musique est meilleure, malgré une « couleur uniforme ». Il y a tout de même « des morceaux d’une touche délicate et légère ». Elle est de Deshaies : les auteurs ont été cité. C'est enfin le tour des interprètes, grâce à qui « la pièce est bien rendue ».]
Theatre Italien.
« Inventez des ressorts qui puissent m’attacher ».
Ce vers s’adresse à l’auteur de la comédie en 3 actes, mêlée d’ariettes, donnée hier avec un très-foible succès sous le double titre de Mélite, ou le pouvoir de l'amour.
Mélite gémit, un suborneur l’a enlevée, l'a délaissée ; un enfant est le gage de son amour, tandis qu’elle le laisse dans un berceau sous des arbres, le seigneur du village le fait emporter ; la mère se désole ; pénètre dans le château ; le ravisseur de l'enfant en est le père ; la nature parle ; il l’épouse.
Ce fonds très-mince est délayé dans trois actes languissans ; aucun personnage n’intéresse, et leur douleur est absolument étrangère au public. Cet ouvrage est cependant de M. Desfontaines. La musique a plus de titre à l’indulgence, et quoiqu'elle soit d'une couleur uniforme, elle offre des morceaux d’une touche délicate et légère. Elle est de M. Deshaies.
La pièce est bien rendue par MM. Solier, Michu ; mesdames Crétu, Gontier.
Gazette nationale ou le Moniteur universel, n° 86 du lundi 26 mars 1792, p. 356 :
[Le critique prévient d'emblée : la pièce nouvelle a connu une réussite médiocre. Après avoir indiqué la source où le sujet a été puisé, il résume une intrigue bien compliquée, bien romanesque, une sombre histoire de jeune femme séduite, dont l'enfant secret a été enlevé, qui le retrouve en retrouvant en même temps son mystérieux séducteur qu'elle épouse, ce qui est présenté comme conforme à « la nature, l'intérêt de son fils », conformément à ce que dit le sous-titre de la pièce. Le jugement qu'il formule ensuite est assez sévère : le sujet est « faible et peu vraisemblable », mais sans faute de goût, ce qui aurait été fatale « aux premières représentations ». Il n'en dira pas plus sur les « paroles », et préfère insister sur la musique, qui ne manque pas de qualités, puisqu'il lui reconnaît le « mérite de facture », mais qui n'est pas non plus de maladresses : trop travaillée, trop recherchée, elle est trop présente et empêche de bien saisir les paroles de l'exposition, ce qui rend l'ouvrage obscur. Les accompagnements sont trop présents, trop riches, et on en vient à « se demander ce qu'ils signifient ». Le verdict est sans appel et sans surprise : « Les nouveaux compositeurs ne paraissent pas assez persuadés que la partie vocale et chantante est celle dont il faut s'occuper avant tout ». Opinions usuelle, regret souvent exprimé. L'article s'achève par le nom des auteurs, Desfontaines pour les paroles, Deshayes pour la musique, qui est connu par un brillant succès.]
Le succès de Mélite, ou le Pouvoir de la nature, opéra en 3 actes, donné le lundi 19 au théâtre Italien, a été un peu froid, comme l'ouvrage a paru l'être lui-même aux spectateurs. Le sujet est tiré d'une nouvelle de Miguel Cervantes, intitulée : La force du sang. Mélite enlevée, conduite dans un château, a été subornée par un jeune homme dont elle n'a pu voir les traits, et qui, après l'avoir trompée par un faux mariage, l'a fait ramener où elle avait été prise, sans qu'elle puisse connaître ni les auteurs de ce crime, ni le lieu où il s'est passé : elle a seulement trouvé le moyen de se procurer un portrait de femme ; c'est celui de la mere de son ravisseur. Elle se retire avec un enfant né de cet horrible hymen, chez une honnête famille, dans un village où elle se dérobe à tous les yeux, et n'y reçoit qu'un oncle, officier de marine, qu'elle instruit de tous ses malheurs. La conduite mystérieuse de Mélite excite la curiosité du seigneur du lieu qu'elle habite ; il fait beaucoup d'efforts pour la voir, sans y parvenir : enfin, il trouve le moyen de lui faire enlever son enfant, qu'elle avait confié à la garde de deux jeunes filles ; il a l'espoir qu'elle viendra le réclamer au château; mais son oncle y paraît le premier, et traite le jeune marquis avec beaucoup de dureté ; il démêle en lui des traits de ressemblance avec le portrait resté dans les mains de Mélite, qui se montre, court à son enfant, reconnaît le lieu où elle a été outragée, et par conséquent son ravisseur. Elle lui rappelle sa fatale aventure, et lui refuse long-tems les moyens de la réparer ; mais la nature, l'intérêt de son fils l'emporte, et elle consent à s'unir au marquis.
On a trouvé l'exécution de ce sujet faible et peu vraisemblable, mais exempte du moins de ces fautes de goût qui attirent des disgrâces aux première représentations. La musique a paru avoir du mérite ; elle a celui qu'on appelle mérite de facture. On y desirerait moins de travail et de recherches. Beaucoup de choses nécessaires à l'exposition sont en musique, et l'orchestre est si chargé qu'on n'entend que très peu les paroles, ce qui répand dans l'ouvrage beaucoup d'obscurité. Les accompagnemens sont très-riches, mais ils disent souvent beaucoup plus qu'ils n'ont à dire, et l'on est tenté de se demander ce qu'ils signifient. Les nouveaux compositeurs ne paraissent pas assez persuadés que la partie vocale et chantante est celle dont il faut s'occuper avant tout.
On a demandé les auteurs : un acteur a nommé M. Desfontaines pour les paroles, et pour la musique M. Deshayes, déjà distingué par celle de Zélia, qui a beaucoup réussi au théâtre de la rue de Louvois.
L’Esprit des journaux français et étrangers, 1792, volume 6 (juin 1792), p. 337-338 :
[Le compte rendu insiste sur la question importante de l’invraisemblance de l’intrigue, avec trois exemples de ce qui paraît dépasser les bornes de la vraisemblance. Et cette invraisemblance n’est pas rachetée par la qualité des détails, au contraire. La musique est mieux jugée, « elle est belle, savante, & a la couleur du sujet ». Interprétation remarquée de Madame Crettu.]
THÉATRE ITALIEN.
Le lundi 19 mars, on a donné la premiere représentation de Mélite , ou le Pouvoir de la nature, comédie en trois actes, en prose, mêlée d'ariettes, paroles de M. Desfontaines, musique de M. Deshayes.
Cet ouvrage est tiré d'une nouvelle de Michel de Cervantes, intitulée : Léocadie, ou la Force du sang. Mélite, réfugiée dans un village, habite une cabane avec un enfant au berceau. Elle a été abusée par un faux mariage ; les paysans sont fort curieux de ce qui la concerne; mais un jeune marquis, seigneur de l'endroit, porte cette curiosité au dernier point. Mélite a coutume de placer son enfant près de sa cabane, & le laisse quelquefois à la garde de deux jeunes paysannes. Celles-ci ont un moment de négligence : les gens du marquis en profitent pour enlever l'enfant. La mere, ne le trouvant plus dans son berceau, se désespere, & court le chercher au château du marquis, lequel est déja enchanté de cette créature innocente ; ce penchant est l'effet du Pouvoir de la nature : car il en est le pere ; les indices le confirment, & son union avec Mélite paroît décidée.
Un enfant qui a l'air d'être exposé exprès pour qu'on l'emporte, c'est une situation dont la combinaison n'a pas semblé fort heureuse ; & ce jeune marquis qui ressent subitement le pouvoir de la nature, est plus merveilleux que vraisemblable. Ce qui est plus invraisemblable encore, ce sont les particularités qui font qu'il ne reconnoît pas Mélite, & qu'il n'en est pas reconnu. Ils ne s'étoient vus que dans l'obscurité. Des détails assez communs font ressortir ces défauts au lieu de les affoiblir. La piece a cependant été écoutée avec bienveillance, & plusieurs morceaux de musique ont été justement applaudis. Cette musique est belle, savante, & a la couleur du sujet. Mde. Crettu joue très-bien le rôle de Mélite, & prouve que son talent est à la hauteur de tous les rôles que les auteurs voudront lui confier.
César : la pièce, dont le titre est réduit à Mélite, est donnée comme étant d'auteur inconnu. Elle a eu trois représentations, les 19 22 et 25 mars 1792.
Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, p. 329, indiquent qu’un titre alternatif, Léocadie, a été employé.
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