Omazet(te), ou Joset en Champagne, parodie d'Omasis, ou Joseph en Egypte de Baour-Lormian, vaudeville en un acte, de Barré, Radet, Desfontaines et Dieulafoy, 6 octobre 1806.
Théâtre du Vaudeville.
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Titre :
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Omazet(te), ou Joset en Champagne
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Genre
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parodie
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Nombre d'actes :
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1
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Vers ou prose ,
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en prose, avec des couplets en vers
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Musique :
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vaudevilles
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Date de création :
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6 octobre 1806
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Théâtre :
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Théâtre du Vaudeville
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Auteur(s) des paroles :
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Barré, Radet, Desfontaines et Dieulafoy
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Almanach des Muses 1807.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Madame Masson, 1807 :
Omazette, ou Jozet en Champagne. Parodie d'Omasis ou Joseph en Egypte, Vaudeville en un acte, par MM. Barré, Radet, Desfontaines et Dieulafoy. Représenté pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre du Vaudeville, le 6 octobre 1806.
Courrier des spectacles, n° 3528 du 7 octobre 1806, p. 2 :
[Comme la tragédie parodiée est médiocre (c’est le critique qui le dit !), la parodie n’est pas aisée, et il a fallu que les auteurs se rabattent « sur les bons-mots et sur les épigrammes ». Mais ils ont présumé de leurs forces, et ils se sont essoufflés rapidement, après quelques scènes allègres. Finalement, ils ont produit « une parodie à l’eau-de-rose », dont le succès, légèrement contesté, doit beaucoup au jeu des acteurs. L’intrigue est évidemment la transposition de celle de la tragédie, et on reconnaît bien les principaux personnages sous leur nouvelle identité. On retrouve la conspiration qui est au cœur de la pièce de Baour-Lormian, on assiste à l’arrivée de Jacob, devenu Jacquot, avec ses fils, et la conspiration échoue, Joset révèle qui il est, tout s’arrange et un couplet scelle le sort du frère le moins malin de la bande, le pauvre Beaujasmin. L’article s’achève sur la liste des interprètes, « très-utiles à cet ouvrage qui, sans leur jeu, eût pu éprouver plus de défaveur, et celle des auteurs, simplement énumérés.]
Théâtre du Vaudeville.
Omazette, ou Joset en Champagne.
Omazis, ainsi que toutes les tragédies médiocres, prêtait peu à la parodie, aussi les auteurs d’Omazette se sont-ils rejettés sur les bons-mots et sur les épigrammes. Leurs trois ou quatre premières scènes en fourmillent ; mais ils se sont trop pressés ; essoufflés et hors d’haleine dès les premiers pas, ils n’ont pu soutenir leur course, et bientôt l'effervescence du public s’est calmée avec celle des parodistes ; les couplets de commande n’ont pu réchauffer la pièce, et quelques; sifflets à la fin ont troublé le triomphe des auteurs. On a remarque qu’ils avoient ménagé la tragédie, que les coups qu’ils lui portaient étoient incertains. Bref, c’est une parodie à l’eau-rose, qui n’a dû son succès qu’au jeu des acteurs.
Omazette, vendu jadis à un capitaine de corsaire, a été conduit prisonnier en Afrique, où son teint s’est noirci ; ensuite il est revenu dans la Champagne Pouilleuse, et il occupe la place de premier garçon chez M. Farinon. Il s’est fait connoître-au médecin de l’endroit ; mais il ne se découvre ni à Simon, ni à Beaujasmin, ses deux frères qui sont restés près de lui, en attendant l’arrivée, de leur pere Jacquot. Simon est un sournois, fumeur éternel, qui paroît toujours occupé de projets sinistres ; Beaujasmin, moins dégourdi, a conservé le langage et les habitudes de son pays natal, la Normandie. Raflès, Gascon que Joset à supplanté, lui cherche des ennemis partout ; il en trouve un sous sa main : c’est Simon ; il s’est apperçu de son amour pour sa sueur la belle Inutilis, et il le gagne, en lui promettant de le seconder dans ses amours.
Laissons-les conspirer, et voyons arriver le papa Jacquot, suivi de ses neuf fils et de son fauteuil. Joset voudroit bien se faire reconuoître ; le médecin tâte le poulx du bonhomme, et déclare qu’il n’est pas tems encore de brusquer ce beau moment. Joset se contient ; puis, pour passer le tems, il s’empare du bâton de Jacob, et s’amuse à dire à son père la bonne aventure. En cet instant, Raflès et Simon exécutent leur projet. Joset, sans se donner la peine d’aller au-devant d’eux, devine avec son bâton qu’ils sont vaincus ; et en effet, Simon se présente couvert de farine, et demande sa grace. Joset se fait reconnoître, et invite son père et ses freres à se fixer près de lui. Il ne fait qu’une exception : il craint d’étendre cette faveur à Beaujasmin. Le couplet qu'il chante à ce sujet présente une allégorie qui a été très-applaudie :
Pour certaine fête on prêta
Un diamant à Melpomène ;
Mais, tu sais, ce qu’on emprunta,
Il ne faut pas qu’on le retienne.
Ce jeune et gentil Beaujasmin
Que chacun aime à la folie,
Avant d’être ton Benjamin,
Fut le Benjamin de Thalie.
Mad. Hervey dans le rôle de Beaujasmin, Mlle. Desmares dans celui d’Inutilis, MM Laporte, Hippolite et Lenoble dans ceux de Joset, Jacquot et Simon, ont été très-utiles à cet ouvrage qui, sans leur jeu, eût pu éprouver plus de défaveur. Les auteurs sont MM. Barré, Radet, Desfontaines et Dieu-la-foi.
Geoffroy, Cours de littérature dramatique, seconde édition, tome VI (1825), p.13-14 :
[Geoffroy n’a pas beaucoup aimé la pièce de Baour-Lormian, et il semble lui préférer la parodie qui en est donnée au Théâtre du Vaudeville par le quatuor roi du Vaudeville. Après avoir donné l’explication du titre, il relève la pertinence des traits mis en avant dans la parodie, jusque dans l’imitation de la prononciation d’un des acteurs. Par contre, il regrette que les auteurs aient cur bon, après s’être moqués de la pièce, ils en flattent l’auteur.]
OMAZETTE,
JOSET EN CHAMPAGNE(1).
C'est une des plus jolies parodies de ce théâtre, lequel est riche en ce genre ; on y donne une raison comique de ce nom d’Omazette : on suppose que Joset, qui n’est cependant pas bien malin, allant au spectacle, au salon, dans tous les endroits où l’on expose les productions des arts, ne trouvait rien de bon, et s’écriait toujours en s’en allant : O mazette ! ô mazette! Le nom lui en est resté. Les auteurs ont fait sentir, avec beaucoup d’esprit et d’enjouement, les vrais défauts du plan de la pièce ; l'insipidité du rôle d’Almaïs qu’ils ont appelé Inutilis, laquelle passe son temps à regarder par la fenêtre, en prenant la précaution d’avertir ses camarades de ne pas finir sans elle : ils ont relevé le ridicule de la conspiration, des jalouses fureurs de Siméon, qu'ils appellent Simon ; le radotage du bonhomme Jacob, rôle dans lequel Hippolyte imite l’accent nazillard de Baptiste aîné avec une vérité parfaite. Enfin, ils ont bien fait sentir le vice radical de la pièce, la langueur de l’action ; et pour se moquer de Joset, qui en effet n’a aucune raison de retarder la reconnaissance, ils ont supposé un médecin qui lui tâte le pouls pendant qu’il parle à son père et à ses frères, et qui lui dit : Il n'est pas encore temps, apparemment parce qu’il trouve que l’émotion n’est pas encore à son comble.
Les auteurs n’ont pas peur apparemment qu’en sortant de leur pièce les auditeurs ne s’écrient comme Joset : O mazettes! ô mazettes! Les auditeurs auraient tort et seraient de vrais Champenois ; car la parodie est amusante et pleine de sel. Je n’approuve pas trop qu’après s’être égayés aux dépens de l’ouvrage, les parodistes flattent l’auteur par un couplet à sa louange : il me semble voir ce spadassin du Mariage forcé, qui, après avoir donné des coups de bâton à Sganarelle, lui demande poliment pardon de la liberté qu’il a prise. (13 octobre 1806.)
L’Esprit des journaux français et étrangers, tome XI, novembre 1806, p. 285-287 :
[Le critique commence par dissiper un bruit : l’auteur n’est pas un certain M. Bernard, dont le nom a circulé, mais bien le fameux quatuor d’auteurs qui font les beaux jours du théâtre du Vaudeville. Il commence par l’explication du titre, tout en présentant le personnage principal. Impossible ensuite de résumer l’intrigue, très compliquée, sans doute à l’image de celle de la tragédie parodiée, dont l’exposition est si confuse. Le critique se contente de dire ce qui dans la parodie est une critique de la tragédie (on a une liste intéressante de ce qu’on peut dire contre Omasis, la lenteur de l’action, le personnage principal, trop inerte, certaines expression trop pompeuses, à coup de « bonnes ou mauvaises plaisanteries »), avant de souligner que dans le vaudeville, ils rendent hommage à l’auteur qui est leur ami. La parodie en est un peu émoussée, et elle paraît aussi un peu longue. Mais c’est tout de même une pièce qui amuse, et à laquelle le critique promet un bel avenir, si la tragédie parodiée continue à « attirer du monde ».]
Omazet, ou Joset en Champagne, parodie d'Omasis, ou Joseph en Egypte.
Cette parodie n'est point de M. Bernard, de Versailles, comme des malins voulaient nous le faire croire, elle est de MM. Barré, Radet, Desfontaines et.... Dieu-Lafoi , dont les noms ne sont pas supposés ; et, en dépit de deux ou trois siffleurs, qui ont sifflé sans savoir pourquoi, le succès a été brillant.
Omazet!... que signifie ce nom ? Que peut-il avoir de plaisant ? Nos lecteurs doivent se faire cette question; et moi je dois les mettre au fait, sans promettre, toutefois, de les faire rire.
Joseph, le héros de la pièce, a été, comme celui de la tragédie, indignement traité.... par ses frères ; et ce n'est, que par un miracle, qu'il a pu dérober ses jambes à la voracité des chiens de St. - Malo, auxquels ses barbares parens l'avaient livré. Laissé pour mort, et ne sachant où porter ses pas, il est venu niaiser à Paris ; là, parcourant différens théâtres, et n'y trouvant rien à son goût, pas même la nouvelle musique de Castor, il a contracté l'habitude de dire ô mazette à chaque nouveauté qu'il voit, et le nom lui en est resté.
Vous dire comment et à quelles fins, Omazet s'est rendu en Champagne, où il a obtenu toute la confiance de M. Farinon, gros meunier; comment il s'est fait aimer de Mlle. Inutilis, sœur d'un fripon , nommé Rafflés, et quelle a été son intention secrette en mandant près de lui Simon et Beau-Jasmin, deux de ses frères, dont le premier est aussi mauvais sujet, que le second est naïf et bon, etc., c'est ce que je n'ose faire pour le moment. L'auteur d'Omasis n'ayant pas eu , lui-même, trop d'une heure pour exposer son sujet, et cette exposition n'étant pas encore des plus claires, l'entreprise ne menerait trop loin.
Tout ce que je puis dire, c'est qu'Omazet, comme Omasis, s'amuse à prolonger la pièce le plus possible, pour filer un beau dénouement ; que Jacot, père de Joseph, ne sachant que faire ni que dire, s'amuse d'abord à compter le nombre de ses enfans, puis s'écrie qu'il veut voir Simon, puis enfin, pleure, pour passer le temps, sur le sort de son pauvre Joset, dont il n'a plus que la paire de sabots. Là, nos parodistes tournent en ridicule l'inutilité et la faiblesse de la conspiration ; l'inertie d'Omasis (qu'ils traitent de Jocrisse) ; l'enflure et le vide de quelques expressions ambitieuses, la lenteur extrême de l'action qui ne commence qu'au quatrième acte ; enfin, après avoir épuisé tout ce que ces défauts leur suggèrent de bonnes ou mauvaises plaisanteries, ils font chanter un vaudeville fort joli, où ils tâchent de dédommager M. Baour-Lormian des critiques qu'ils lui ont fait subir, inscrivant pour jamais, son nom au temple de mémoire, ou de la gloire, ce qui revient à-peu-près au même.
Il y a beaucoup de gaîté et de véritable esprit dans cette parodie, qui est seulement un peu trop longue, et où l'amitié des auteurs pour le père d'Omasis émousse un peu trop le trait satyrique ; l'entrée de Jacob est ce qu'il y a de plus plaisant ; on célèbre en chœur la venue du patriarche , sur l'air populaire à la papa ; et Hyppolyte, qui fait Jacob, imite, d'une manière frappante, jusqu'aux moindres gestes de Baptiste. En général la pièce est bien jouée, par Laporte, Mme. Hervey, Carpentier, Lenoble et Fichet; et , pour peu que les représentations d’Omasis continuent d'attirer du monde , Omazet en aura sa part.
(1) Parodie d'Omasis, ou Joseph en Égypte, tragédie de M. Baour-Lormian, membre de l'Académie-Française. (Note de l’Éditeur.)
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