La Petite goutte des halles

La Petite goutte des halles, comédie en un acte & en prose, mêlée de vaudevilles, de Guillemain, 4 nivôse an 2 [24 décembre 1793].

Théâtre des Variétés Amusantes.

Date fournie par Histoire des Théâtres de Paris Variétés Amusantes, de Lecomte (Paris, 1908), p. 218.

Titre :

Petite goutte des halles (la)

Genre

comédie mêlée de vaudevilles

Nombre d'actes :

1

Vers / prose

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

4 nivôse an 2 (24 décembre 1793)

Théâtre :

Théâtre des Variétés Amusantes

Auteur(s) des paroles :

Guillemain

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1794, volume 1 (janvier 1794), p. 317-320 :

[Petite pièce jouée dans un petit théâtre, l’ouvrage de Guillemain n’a pas droit à l’indulgence du critique. Après le résumé de l’intrigue, l’évocation du revirement du public, d’abord froid, et finalement applaudissant, mais pour des raisons qui paraissent extérieures à la pièce : d’abord parce qu’un couplet évoquait un succès militaire contre les Anglais, occasion d’un calembour irrésistible, puis parce que le couplet final réclamait des applaudissements. Le critique attaque alors ce qu’il estime un « imbécile usage » : le public n’a pas à se voir réclamer des applaudissements qu’il donne de toute façon à qui les mérite. Autres reproches : « Si l'on pouvoit considérer la petite goutte des halles comme une comédie, nous dirions qu'elle offre deux personnages absolument inutiles », mais le critique finit par leur trouver une utilité (mais on n’est sans doute pas dans une comédie). Et surtout, le compte rendu s’achève par une vigoureuse diatribe contre le caractère graveleux de certains couplets : « La plus jolie chose du monde, est d'être gai au théatre ; la plus absurde, comme la plus méprisable, est d'y être indecent ». Petite trouvaille : imaginer le nom qu’on pourrait donner à d’éventuels censeurs, « les grands balayeurs des ordures du théatre ».]

THÉATRE DES VARIÉTÉS AMUSANTES,

La Petite Goutte des halles, comédie en un acte & en prose, mêlée de vaudevilles; par Guillemain.

Goujon aime Rosette de tout son cœur, & Rosette est bien loin de haïr Goujon ; mais Goujon n'est qu'un simple batelier. Comment est-il donc possible que la mere de Rosette, madame Bacquet, marchande de marée, ne préfere pas pour sa fille M. Lacet, marchand mercier, qui feroit la fortune de Rosctte ? Que de maux ont causé dans ce bas monde l’ambition & l’argent ! Vainement tous les amis de la famille s'intéressent pour Rosette, la mere Bacquet est obstinée, & Rosette subira son sort. Par bonheur tout peut s'arranger ici-bas ; il n'est que de présenter les affaires sous un certain point de vue ou de mettre à profit le moment favorable ; & quoi qu'on fasse & quoi qu'on dise, il en est en cela des intérêts d'une république ou d'un grand empire, comme de l'intérêt de nos amours.

Ils se rencontrent; Rosette étant avec sa mere, & Goujon avec son oncle l'aubergiste, chez Mad. Marasquin, où ils vont tous pour boire la petite goutte. Les verres, comme l'utilité, rapprochent toutes les distances ; on parle, on raisonne, on arrive à l'article du mariage ; Goujon l'oncle promet sa .pratique à la mere Bacquet, & à son neveu, les deux bateaux sur lesquels il pêche, si la mere, jusqu'alors inflexible, consent à l'union de deux jeunes gens ;la petite goutte a attendri le cœur de la mere Bacquet : Goujon & Rosette sont unis. Qui ne rira pas de ceci? C'est Lacet & son ami Sandaraque, ci-devant écrivain des charniers, & obligé par les circonstances, d'aller en ville ; qu'importe ? Sandaraque changera les noms de l'épithalame qu'il avoit faite pour Lacet & Rosette, & tout sera dit.

Cette piece, froidement écoutée jusqu'aux derniers couplets, a été fort applaudie alors, & l'on a demandé l'auteur, qui a paru. Le premier de ces couplets est chanté par la mere Bacquet. S'adressant à ses enfans, elle leur dit que, tandis qu'ils sont à parler de leurs amours, on crie sur le boulevard, un grand avantage remporté par les François, & d'après lequel, les Anglois sont frits comme des poissons. Le second est pour prier le public d'applaudir.

Au théatre des variétés amusantes, comme à tous les autres, les auteurs des pieces à vaudevilles, soit qu'ils aient mérité d'être sifflés, soit qu'ils aient réussi, ne manquent jamais de se mettre à genoux devant le parterre, pour le prier de les applaudir. Ces MM. sont donc bien friands d'applaudissemens ! Mais, que diroit-on d'un enfant bien élevé, qui flatteroit bassement son maître, pour avoir du bonbon ? Si le maître a du bon sens, il lui donneroit des férules, & il feroit bien. Eh quoi ! le public manque-t-il jamais d'applaudir ceux qui le méritent ? Et ceux qui ne le méritent pas, pourquoi veulent-ils être applaudis ? Il seroit bien tems de supprimer cet imbécile usage.

Si l'on pouvoit considérer la petite goutte des halles comme une comédie, nous dirions qu'elle offre deux personnages absolument inutiles, puisqu'ils ne servent de rien à l'intrigue  ; ce sont Goulot & Ducerceau. Mais, sans le premier, il n'y auroit point de garçon de café, & sans le second, nous ne soupçonnerions pas que le marchand de vin du coin se sert adroitement de lui, pour mettre de l'eau dans son vin. Puisse l'auteur de- cette bagatelle en mettre dans le sien toutes les fois qu'il lui prend envie de faire un couplet graveleux, comme il y en a plusieurs dans sa piece. La plus jolie chose du monde, est d'être gai au théatre ; la plus absurde, comme la plus méprisable, est d'y être indecent. Les choses sont poussées à un tel point, à ce sujet, que si l'on nommoit jamais des censeurs pour les spectacles, on pourroit les appeller, sans équivoque , les grands balayeurs des ordures du théatre.

(Journal des spectacles.)

La base César ignore cette « petite goutte ».

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