La Princesse de Jérusalem ou le Juif reconnaissant, mélodrame en trois actes, de Maurin de Pompigny, musique de Quaisain et Lanusse, ballets de Millot, 23 janvier 1812.
Théâtre de l'Ambigu-Comique.
Almanach des Muses 1813
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Barba, 1812 :
Le Princesse de Jérusalem, ou le juif reconnaissant, mélodrame en trois actes, à grand spectacle ; Par M. Pompigny ; Musique de MM. Quaisain et Lanusse ; Ballet de M. Millot ; Représenté pour la première fois, sur le Théâtre de l'Ambigu-Comique, le Janvier 1812.
Journal de Paris, n° 24,vendredi 24 Janvier 1812, p. 3 :
[L'article commence par la recherche des sources à laquelle aurait puisé l'auteur de la pièce, et tout d'abord une source à laquelle il n'a pas puisé. Après avoir donné les sources de ce qu'il appelle « ce trait d'histoire », le critique accorde des qualités à la pièce, assez bien construite, et d'un style supérieur à celui des autres mélodrames, puis il entreprend d'en résumer l'intrigue, qui est le fruit de l'imagination de l'auteur (« l'auteur suppose »), une sombre affaire de trahison, « le perfide Raymond » tentant de contraindre la princesse de Jérusalem de l'aimer (alors qu'elle aime Lusignan) et obtenir ainsi le trône qu'elle tient de son père. Sa trahison est révélée par la découverte d'une lettre de Raymond, découverte qui est rendue possible par la collaboration du Juif Samuel, le « juif bienfaisant » du sous-titre. Raymond est puni, et la paix revient dans les « deux empires », et l'amour entre les amants. Si les personnages sont « assez bien tracés », à l'exception du roi de Jérusalem, trop crédule. Mais la pièce a obtenu « un succès flatteur », bien qu'elle ne respecte pas « la règle des unités » (c'est tout de même le cas de la majorité des mélodrames, qui ont besoin de temps pour déployer leur intrigue, souvent touffue). L'acteur qui joue le rôle du « Juif bienfaisant » est félicité pour le comique de son interprétation... Les auteurs sont tous cités.]
Théâtre de l'Ambigu-Comique.
Première représentation de la Princesse de Jérusalem, ou le Juif bienfaisant.
Il existe, autant que je puis me le rappeler, un roman intitulé le Juif bienfaisant ; mais ce n'est point dans cette source que l'auteur du nouveau mélodrame a puisé son sujet. C'est l'histoire qui lui a fourni ses matériaux.
Vanel, dans son Histoire des Turcs, année 1123, dit : « Le roi Beaudouin, après avoir demeuré huit mois entre les mains des infidèles, obtint sa liberté moyennant une rançon de vingt-cinq mille sequins, somme immense dans ce temps-là. Il donna sa fille en otage pour sûreté du paiment ; il la retira ensuite sans bourse délier, ayant fait sur les sarrasins une prise considérable. »
Dans l'Itinéraire de Paris à Jérusalem, M. de Chateaubriand parle de la trahison de Raymond, comte de Tripoli, qui fit tomber le monarque de Jérusalem entre les mains des sarrasins à la bataille de Tibériade.
Ce trait d'histoire a été accommodé à la scène avec assez d'art, et le style de la pièce m'a paru de meilleur goût que celui de la plupart des mélodrames. L'auteur suppose que pendant la captivité de Beaudouin, le perfide Raymond, auteur de tous ses maux, a été nommé régent du royaume. Il est épris de la princesse royale, veuve du duc de Montferrat, que l'amour unit au brave et généreux Lusignan. Aucun crime ne coûte à ce traître pour s'assurer la possession de la princesse et l'autorité suprême pendant la longue minorité de l'héritier présomptif de la couronne.
Il tente de rejetter sur Lusignan l'odieuse trahison qui a fait tomber Beaudouin entre les mains des sarrasins. Lusignan, indigné, se constitue volontairement prisonnier, et bientôt l'honneur et la liberté lui sont rendus par un arrêt solennel.
Le cruel Noradin, qui tenait dans la plus dure captivité le monarque de Jérusalem pour le forcer à céder son royaume, termine son odieuse vie, et son successeur, le magnanime Saladin, auquel l'auteur a conservé le noble caractère avec lequel l'histoire nous le représente, offre la paix et la liberté au roi chrétien, et lui demande en otage sa fille dont on lui a vanté la beauté.
Il se présente à cette princesse sous le nom d'un envoyé de Saladin. Elle n'hésite pas à aller délivrer son père, et Lusignan la suit, à son insu, à la tête de cinq cents chevaliers, l'échange s'effectue, mais tout-à-coup le kan des tartares, gagné par l'or de Raymond, qui veut avoir la princesse en sa puissance, attaque Saladin, auquel Lusignan sauve la vie.
Le kan est tué, et l'on trouve sur lui une lettre de Raymond. Les preuves de la correspondance de ce traître avec Mamoud, ministre du cruel Noradin, sont fournies par Samuel, le juif bienfaisant, qui joue un grand rôle dans tous ces événemens. C'est le plus officieux, le plus généreux des hommes envers les honnêtes gens, et le plus rusé avec les coquins.
Raymond reçoit la juste punition de ses crimes, et le même jour assure la paix des deux empires et le bonheur des deux amans.
Les rôles sont assez bien tracés, à l'exception de celui du roi, qui croit toujours aveuglément le dernier qui lui parle.
Ce défaut, joint à la violation de la règle des unités, n'a pas empêché la pièce d'obtenir un succès flatteur.
M. Pompigny, auteur demandé et nommé, doit des remerciemens, et le journaliste des éloges à Douvry, qui a joué de la manière la plus comique le rôle du Juif bienfaisant. La musique est de MM. Quaisain et Lanusse, et les ballets de M. Millot.
Ajouter un commentaire