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Le Premier en date

Le Premier en date, opéra-comique en un acte et en prose, de Marc-Antoine Désaugiers et Hyacinthe Pessey, musique de Catel, 3 novembre 1814.

Théâtre de l’Opéra-Comique, rue Feydeau.

Titre

Premier en date (le)

Genre

opéra-comique

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

prose, avec des couplets en evrs

Musique :

oui

Date de création :

3 novembre 1814

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra-Comique, rue Feydeau

Auteur(s) des paroles :

Marc-Antoine Désaugiers et Pessey

Compositeur(s) :

M. Catel

Mercure de France, tome soixante-unième,n° DCLXIV (octobre 1814), p. 81 :

[On retient : la modification de la fin après la première, pour répondre aux attentes du public ; la description des mœurs du temps dans les théâtres (le rôle des « amis du parterre » dans la décision de nommer ou non les auteurs).]

Thédtre Feydeau. Première représentation du Premier en date, opéra-comique en un acte et en prose, paroles de M. Désaugiers, musique de M. Catel.

Madame de Millière, jeune et jolie veuve, qui doit le gain d'un procès important au zèle et à l'amitié active du baron de Corval, lui accorde, par reconnaissance, la main de sa nièce Aglaé de Gennevilliers; mais la jeune personne a encore présent à sa mémoire le colonel Florvel, qu'elle a vu au bal une fois, il y a quelque mois. Ce Florvel, neveu du baron, s'est plu, jusqu'à présent, à lui ravir toutes ses conquêtes; il lui enlève encore celle-ci. Arrivé dans l'hôtel garni où logent madame de Millière et sa nièce, dont il a conservé pareillement un tendre souvenir, il obtient sa main comme premier en date. A la première représentation, le baron épousait aussi madame de Millière; mais le public n'a pas ratifié ce double mariage.

Cette pièce a été applaudie en quelques endroits, et sifflée dans d'autres. Huet est venu à la fin nommer les auteurs, à la demande de quelque amis du parterre. On sent combien est invraisemblable cet amour de Florvel et d'Aglaé, qui, chacun de leur côté, ont éprouvé le même sentiment pour une personne qu'ils n'ont vue qu'une fois ; leur constance est d'ailleurs en contradiction avec la légèreté de leur caractère. Le nom de l'auteur des paroles, connu assez généralement avant la représentation, promettait beaucoup d'esprit et de saillies ; mais les espérances ont été trompées. Il s'en est montré fort avare, et, ce qu'il y a de plus fâcheux dans un opéra, son poëme n'était nullement favorable au développement du génie de l'auteur de la musique. C'est ainsi qu'on peut expliquer l'insipidité de celle-ci, dans laquelle, à l'exception de l'ouverture, dont l'effet est assez agréable, et d'un joli air chanté par madame Boulanger, on ne trouve absolument rien qui soit digne d'être cité.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 19e année, 1814, tome VI, p. 153-154 :

[L’auteur de ce compte rendu ne voit rien à sauver dans cette pièce : ni le sujet, résumé d'emblée, ni les paroles, ni la musique. « aucun détail » pour racheter la pauvreté du sujet, et une musique « aussi monotone que le poème ». Un seul morceau digne de mémoire...]

THÉATRE DE L'OPÉRA COMIQUE.

Le premier en date, opéra-comique en un acte, joué le 3 Novembre.

Le Baron de Corval a vingt fois voulu se marier. Par une fatalité assez singulière, son neveu, le Colonel Florbel a su plaire à toutes ses maîtresses. Cependant, il a fallu que l'oncle eût bien peu de confiance dans son neveu, ou une bien mauvais idée de la conduite de ses prétendues, puisqu'il suffit que le Colonel en ait vu une, pour qu'aussitôt le mariage ait été rompu.

Le Baron arrive, dans un hôtel garni, avec une jeune veuve et sa nièce. Il propose sa main à la Demoiselle qui l'accepte, malgré le souvenir qui lui reste d'un jeune militaire qu'elle a vu une seule fois au bal. Ce militaire arrive ; c'est le neveu, le Colonel Florbel, qui se trouve encore le premier en date, et à qui son oncle cède la nièce en rabattant sur la tante.

Ce sujet, peu piquant, n'est racheté par aucun détail. Il manque de situations et de gaieté. La musique a paru aussi monotone que le poème. Il faut dire aussi que les acteurs n'ont pas contribué à l'égayer. Il eût été difficile à l'oreille la mieux exercée d'entendre un mot du caquetage de Madame Belmont. Chenard a débité son rôle, très-long, sur le ton d'une basse continue. Madame Boulanger, seule, a fait sourire, et a chanté agréablement
un petit rondeau, l'unique morceau qu'on ait distingué.

Les sifflets et les applaudissemens se sont balancés. Les premiers n'ont pu empêcher d'entendre les noms des auteurs. Ce sont MM. Désaugiers et Pessey, pour les paroles, et M. Catel pour la musique.

L’Esprit des journaux français et étrangers, 1814, tome XI (novembre 1814), p. 279-283 :

[Un article bien long pour dire qu’il n’y a pas grand chose de bon dans cette pièce (pas plus dans l’intrigue que dans le « poème » ou dans la musique – « excepté un petit air », mais c’est grâce au talent de la chanteuse). Une intéressante distinction entre les genres, comédie et opéra-comique : il y a des sujets propres à chaque genre (et celui-ci n’était pas pour l’opéra-comique).]

THÉATRE DE L'OPÉRA – COMIQUE.

Le Premier en date, opéra-comique en un acte.

Les proverbes, qu'on appelle la sagesse des nations, ne sont qu'un recueil d'axiômes contradictoires qui se donnent des démentis continuels. Il serait presqu'impossible de citer l'autorité d'un proverbe qu'on ne pût combattre et détruire par un proverbe opposé. Pour ne parler que de ceux qui ont quelque rapport avec la pièce représentée hier à Faydeau, à côté de : le premier venu engrène, on trouve : les premiers seront les derniers, et aux derniers les bons ; si vous dites : ce qui est differé n'est pas perdu, on vous répond : l'occasion perdue ne se retrouve jamais. Il est cependant un adage dont la vérité semble universellement reconnue, et qui se confirme tous les jours par trop d'exemples pour qu'il soit encore permis de la révoquer en doute : c'est qu'auprès des femmes ce n'est pas un titre de faveur d'être né avant ses rivaux, et qu'on perd sa cause quand on ne l'appuie que d'un extrait de baptême qui est le premier en date.

Monsieur le baron de Corval en fait une épreuve moins triste que beaucoup d'hommes de son âge, qui ne rencontrent pas d'aussi aimables dédommagemens. L'intérêt le plus vif, les démarches les plus actives, les sollicitations les plus pressantes lui ont enfin permis d'annoncer à madame de Millière, jeune et jolie veuve, qu'elle a gagné un procès important. La reconnaissante plaideuse ne peut lui refuser, pour prix de son zèle et de ses soins, la main de sa nièce Aglaé de Gennevilliers ; mais la nouvelle de ce mariage ne fait que réveiller dans le cœur d'Aglaé le souvenir du colonel Florvel. La jeune personne paraît susceptible d'impressions aussi promptes que durables, car elle n'a-vu qu'une fois au bal, il y a déjà quelques mois, cet aimable colonel, dont l'image lui est toujours présente.

Florvel est le neveu du baron de Corval, et semble destiné à condamner son oncle au célibat. Ce pauvre baron a été vingt fois sur le point de se marier, et toujours son neveu, qui .était le premier en date dans le cœur des belles, l'a forcé à rompre l'engagement qu'il allait contracter. Il paraît que Florvel ne fait des conquêtes que pour le glorieux plaisir de les enlever aux autres, et non pour les conserver, car il est encore garçon. Son étoile, ou plutôt celle du baron l'amène dans l'hôtel qu'habitent les deux dames. L'oncle, que ses mésaventures ont rendu superstitieux, veut éloigner Florvel, mais il ne peut échapper à sa destinée. Le colonel voit madame de Millière, et, la croyant la prétendue de son oncle, il se prend pour elle d'un amour de fatalité ; il n'aspire qu'à l'épouser. Le baron s'applaudit de cette erreur, qui ne dure, hélas ! qu'un instant. Florvel retrouve et reconnaît Aglaé ; il renonce brusquement à la main de la veuve, « parce qu'il ne veut pas, dit-il respectueusement, aller sur les brisées de son oncle. » Le baron est encore obligé de céder ses droits au premier en date. La complaisante madame de Milliére se charge de le consoler, et au lieu d'un mariage on en fait deux.

Au premier apperçu du sujet, on voit qu'il convient plutôt à la comédie qu'à l'opéra-comique, en admettant qu'il convienne à l'un des deux. La comédie permet de déguiser la faiblesse d'une situation par l'art avec lequel on parvient à la ménager, tandis que l'opéra dont la marche, est déjà plus ou moins ralentie par les morceaux de musique, veut moins de scènes filées que des intentions comiques fortement indiquées, et c'est là précisément ce qu'on cherche en vain dans le Premier en date.

Comme on savait que M. Désaugiers était un des auteurs de cette pièce, on était disposé d'avance à lui pardonner quelques fautes contre la sévère raison à laquelle il a déclaré la plus joyeuse guerre, contre l'exacte vraisemblance qui gêne sa verve capricieuse, et même contre le bon goût qu'il sacrifie souvent à un trait de folie; mais on n'avait garde de prévoir qu'on serait obligé de lui pardonner le défaut d'esprit et de gaîté. A peine a-t-on vu à de longs intervalles briller quelques éclairs.

Le compositeur a grand besoin de pouvoir alléguer l'excuse d'un poëme peu fait pour l'inspirer ; il n'y a pas dans l'opéra un seul morceau remarquable, et toute la musique est d'une telle monotonie, qu'un spectateur qui se serait endormi (et cette supposition n'est pas invraisemblable), eût pu croire, en se réveillant de temps en temps, qu'on chantait toujours le même air. Il faut pourtant excepter un petit air très-bien chanté par madame Boulanger, et dont le caractère vif et original appartient plutôt encore à un chant villageois qu'à un air de salon. On ne manquera pas de dire que c'est de la musique bien faite, de la musique sans faute, comme si la plus grande faute d'une musique n'était pas d'être décolorée, froide et ennuyeuse. Loin du théâtre ces partitions correctement classiques ; qu'elles soient exilées dans les bibliothèques des conservatoires.

Le Premier en date a cependant été beaucoup plus applaudi que sifflé, quoiqu'il fût plus facile de justifier les sifflets que les applaudissemens. Huet, qui a cru sans doute qu'on avait demandé les auteurs, est venu annoncer au public surpris, que la musique était de M. Catel, et les paroles de M. Désaugiers, qui a eu pour collaborateur M. Pessey, dont le nom est encore nouveau, au moins sur l'affiche de l'Opéra-Comique.

D'après Nicole Wild et David Charlton,Théâtre de l'Opéra-Comique Paris: répertoire 1762-1972, p. 371, la pièce est parfois nommée les Réclamations ou le Premier en date. Elle a connu 5 représentations.

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