Le Projet singulier, comédie en un acte et en vers, de Justin-Gensoul, 2 germinal an 13 [23 mars 1805].
Théâtre de l'Impératrice.
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Titre :
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Projet singulier (le)
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Genre
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comédie
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Nombre d'actes :
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1
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Vers ou prose ,
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en vers
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Musique :
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non
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Date de création :
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2 germinal an 13 (23 mars 1805)
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Théâtre :
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Théâtre de l’Impératrice
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Auteur(s) des paroles :
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Justin Gensoul
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Almanach des Muses 1806.
Losan, jeune étourdi, fait des dettes, se bat en duel, et a le malheur de tuer son adversaire. Il est bientôt contraint de prendre la fuite pour se dérober aux poursuites de la justice. Jeune, et d'une figure agréable, il se déguise en femme ; mais il quitte peu de temps après cet habit pour prendre celui d'officier. L'hôtel qu'il habite est occupé en même temps par madame de Fontange, mère d'une fille charmante dont il est épris. Madame de Fontange soupçonne quelque intrigue amoureuse entre les jeunes gens, et se dispose à changer de demeure lorsque le hasard fait tomber dans ses mains le portrait de Losan en femme, ainsi que des billets doux qui lui font présumer que le jeune officier n'est qu'une femme déguisée. Dès ce moment elle ne pense plus à l'éloigner de sa file, et Losan se garde bien de la détromper. Sur ces entrefaites, Lisimon, père de Losan, arrive. Il a obtenu la grace de son fils ; mais il veut se remarier, afin de le punir de toutes ses fredaines. madame de Fontange combat d'abord sa résolution, et finit par lui proposer une jeune personne dont elle lui vante la fortune et la beauté, en lui avouant cependant qu'elle est déguisée en homme. Lisimon est enchanté, et demande une entrevue. Madame de Fontange y fait consentir Losan. Le père se dispose à faire sa cour à une personne charmante ; il s'approche d'un air galant, et reconnaît.... son fils. Grande surprise de part et d'autre ; grande colère. Enfin, tout s'appaise ; le jeune homme promet de se corriger, et épouse celle qu'il aime.
Fond auquel on peut reprocher de l'invraisemblance ; mais des scènes comiques, des détails agréables et le vrai style de la bonne comédie. Succès décidé.
Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Mme. Masson, an 13 (1805) :
Le Projet singulier, comédie en un acte et en vers. Par M. Justin-Gensoul. Représentée pour la première fois sur le Théâtre de l'Impératrice, rue de Louvois, le 2 germinal an 13. (23 mars 1805) par les comédiens ordinaires de sa majesté.
Le Courrier des spectacles du 3 germinal an 13 [24 mars 1805] manque dans la collection de Retronews. C’est sans doute dans ce numéro que la critique du Projet singulier a paru.
L’Esprit des journaux français et étrangers, tome VIII, floréal an XIII [avril 1805], p. 287-289 :
[La pièce a connu le succès. Elle reprend, non le sujet de Faublas, roman fort apprécié en ce temps, mais le « motif » du roman, celui du garçon efféminé, qu’on prend pour une fille et qu’on tente de marier... avec son propre père. L’imbroglio se dénoue évidemment, et celui qu’on prend pour une fille se marie avec celle qu’il aime. Pièce écrite par un jeune auteur, elle est jugée faible par le fonds, et lente Mais elle est bien écrite, en particulier pour la versification, qualité devenue rare. Et elle est riche en « traits comiques dans le dialogue ». Picard jeune joue très bien, et on découvre un nouvel acteur (on ne connaît même pas son nom) qui « s'acquitte très passablement » de son rôle.]
Le Projet singulier, comédie en un acte et en vers.
Succès décidé.
Un épisode du roman de Faublas paraît avoir fourni, sinon le sujet, du moins le motif de la pièce.
Un jeune officier, nommé Nozan, s'est logé dans une maison garnie, auprès d'une dame dont il aime la fille. Celle-ci s'appelle Amélie. La dame veut d'abord éconduire Nozan, parce qu'elle veille avec beaucoup de scrupule sur tout ce qui peut compromettre la réputation de son enfant ; mais trompée par de faux rapports qui s'accordent passablement avec la figure imberbe du jeune amant, elle finit par se persuader qu'il est du sexe féminin, et que son véritable nom est Clarence : en conséquence elle lui permet de rester auprès d'Amélie ; et Nozan, enchanté de la méprise, se garde bien de la faire cesser.
Cependant la mère d'Amélie forme le projet de marier Clarence, et à qui ? au père de Nozan, arrivé tout récemment d'Amérique. Nozan, père , et Nozan, fils, se préparent donc, chacun de leur côté, à l'entrevue qu'ils doivent avoir ensemble avant leur mariage, et ils sont bien éloignés d'en prévoir l'issue. Le moment fatal arrive ; le papa, transporté d'amour pour l'objet avec qui on le met en scène, et dont il a déjà admiré la taille, s'avance pour le regarder au visage, et reconnaît son fripon de fils, car c'est ainsi que tous les pères de comédie ont coutume d'appeller leurs enfans. Grande surprise de part et d'autre ; à cette surprise succède un bruit épouvantable ; bref, Nozan, le père, est sur le point de casser sa canne sur les épaules de Nozan, le fils, lorsque la mère d'Amélie paraît, toute étonnée, comme on peut le croire, de voir un prétendu débuter ainsi auprès de sa future. Cette scène, plaisante en elle-même, est ce qui détermine le dénouement ; on s'explique réciproquement ; les pères pardonnent, les enfans s'épousent, et le public demande l'auteur.
Cette petite pièce est d'un jeune homme nommé Justin. Le fonds en est faible, et la marche un peu languissante dans les premières scènes ; mais le style en est pur, et la versification très-soignée ; mérite beaucoup trop rare aujourd'hui, pour qu'on n'en félicite pas sincèrement M. Justin.
Il y a d'ailleurs beaucoup de traits comiques dans le dialogue, notamment dans ce que dit le Valet.
Picard, jeune, joue fort bien le rôle de Lafleur, et un M. Merville ou Meriville , que nous ne connaissions pas encore, s'acquitte très passablement de celui de Nozan. En un mot, la pièce est montée avec soin, et mérite tout son succès.
Annales dramatiques, ou Dictionnaire général des théâtres, tome septième (1811), p. 506-508 :
[La source : le roman de Louvet, c'est-à-dire les Amours du chevalier de Faublas. L'essentiel du compte rendu, c'est le résumé de l'intrigue, l'histoire d'un jeune homme séduisant, qui est un bourreau des cœurs, et qui est pris pour une femme, en particulier par la mère de celle qu'il aime, et qui est pleine de sympathie pour ce jeune homme. Le père du jeune homme arrive pour tenter de faire amnistier son fils, qui a tué un homme dans un duel : quand il voit son fils déguisé en femme, il se fâche bien sûr, mais accepte qu'ils e marie avec celle qu'il aime : tout rentre ainsi dans l'ordre. La pièce n'est pas neuve, selon le critique, mais elle présente le sujet d'une manière originale, et elle a le bon goût d'être bien écrite.]
PROJET SINGULIER (le), comédie en un acte, en vers, par M. Justin Gensoul, à Louvois, 1805.
Le sujet de cette comédie se trouve , à quelques incidens près, dans le roman de Louvet. Un jeune et joli garçon, vif, léger, étourdi, passionné, un second Faublas enfin, destiné par son père à la profession d'avocat, déserte l'antre de la chicane pour s'enrôler sous les étendards de l'amour : aimer, voilà ses lois ; plaire est son unique étude. Chaque jour nouvelle adoration, chaque jour, nouvelle conquête. Les obstacles s'aplanissent devant lui ; s'il s'en présente, il les surmonte. Un jaloux le provoque ; il se bat et le tue. Ceci devient sérieux. Réduit à se cacher, tantôt il revêt l'habit militaire, et tantôt, sous l'élégant attirail des Grâces, il captive et enchaîne tous les cœurs. Epîtres, madrigaux sont adressés à la belle Clarence ; son porte-feuille est plein de ces jolies bagatelles. Comme on le voit, Losan passe assez bien son tems. Toutefois il ne laisse pas que d'avoir de l'inquiétude : quelle sera l'issue de cette aventure ? Logé dans un hôtel garni où la scène se passe, il parvient à plaire à la jeune et innocente Amélie ; il l'aime tout de bon ; mais madame Fontange, qui redoute les suites des tête-à-tête, l'invite à quitter la maison. Il promet de s'éloigner, et n'en fait rien. Cette bonne dame Fontange ne peut pourtant s'empêcher de temoigner le regret qu'elle éprouve d'être obligée à prendre ce parti rigoureux. Losan lui plaît aussi ; il l'intéresse. A cet intérêt se mêle bientôt le desir de le connaître. La curiosité la retient dans l'appartement de Losan ; elle aperçoit un portrait sur la table, elle le prend, l'examine : c'est celui de Losan, habillé en femme. Plus de doute, Losan est une femme. Quel inconvénient y a-t-il à le laisser auprès d'Amélie ? Une lettre qu'on apporte à la belle inconnue la confirme dans cette idée. Elle interroge Lafleur, valet du jeune homme. Le malin et rusé valet, qui croit pouvoir en tirer parti pour les feux de son maître, la laisse dans son erreur. Cependant M. Lisimon est arrivé à Paris pour solliciter la grâce de son fils. Il l'a obtenue ; mais il veut se venger des inquiétudes et des tournions que lui ont causés ses folies. Pour cela faire, il va se marier ; il fera un enfant à sa femme, et lui donnera tout son bien. Lisimon communique ce projet à Mme Fontange, et lui demande sa fille ; mais, outre qn'Amélie est trop jeune, elle connaît une demoiselle qui lui convient beaucoup mieux. Cette demoiselle est Losan, à qui Lisimon est présenté par Mme de Fontange. Le père, après avoir balbutié le petit compliment d'usage à cette belle, reconnaît son fils en elle, l'accable de reproches, lui pardonne, et le marie à l'aimable Amélie.
Si l'auteur n'a pas le mérite de l'invention, il a du moins celui d'avoir présenté ce sujet sous un jour favorable. Sa pièce, à quelques négligences près, est assez bien écrite.
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