Roland de Monglave

Roland de Monglave, drame en prose en 4 actes, à spectacle, de Loaisel-Tréogate, 9 Pluviôse an 7 [28 janvier 1799].

Théâtre de l'Ambigu-Comique.

Almanach des Muses 1800

Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Barba, an VII :

Roland de Monglave, drame en quatre actes, En prose, à spectacle. Représenté, pour la première fois, sur le Théâtre de l'Ambigu-Comique, le 9 pluviôse, l'an 7 de la république. Par J. M. Loaisel-Théogate, auteur de la Bizarrerie de la Fortune, du Château du Diable, etc.

Courrier des spectacles, n° 707 du 10 pluviôse an 7 [29 janvier 1799], p. 3 

[Une courte phrase souligne la réussite de la pièce : elle a obtenu « un succès complet et mérité ». Et on passe sans transition à l’analyse d’un drame touffu et plein de rebondissements. On y retrouve tous les ingrédients du mélodrame : le traître accusateur jaloux, l’écuyer fidèle et dévoué, la prison (on en aura même plusieurs), les évasions, les gardiens endormis avec un somnifère, les combats, pour arriver à une fin inédite : le traître meurt sous les coups de feu de ses soldats qui veulent tuer un ours entrant dans la grotte où il s’est réfugié, mais aussi d’un coup de foudre. Une fois le traître doublement mort, tout est arrangé : le brave Roland retrouve la confiance de son souverain. Le jugement porté ensuite est ambiguë : « on a applaudi avec justice au second acte » qui montrerait « une grande entente de la scène, un intérêt bien soutenu, de la rapidité et de l’énergie », un rôle, celui du capitaine qui permet à Roland de s’évader, est mis en avant. Mais il y a quatre actes, un seul a été applaudi ? Et il y a plus d’un rôle dans la pièce, un seul « a […] fait grand plaisir » ? L’auteur a été demandé.]

Theâtre de l’Ambigu-Comique.

Roland de Monglave, pièce héroïque en quatre actes et à spectacle, a obtenu hier un succès complet et mérité. En voici l’analyse.

Roland de Monglave revenu vainqueur des Saxons, excite la jalousie de Lisiare, grand prévôt du duc Milon. Son crédit, ses victoires lui sont devenus tellement insupportables, qu’il a juré de se défaire à quelque prix que ce soit, d’un homme qui l’efface entièrement à la cour. A cette effet il a chargé Plusieurs hommes d’assassiner Théobale, fils du duc MiIon, et il accuse auprès du prince, Roland de Monglave, d’être l’auteur de ce meurtre, il suborne même des témoins qui déposent contre Roland. Ce héros se défend en vain, l’écharpe du malheureux Théobalde, trouvé chez lui, son épée teinte de son sang, sont des indices trop convainquans, et on le conduit dans une prison d’état. Son écuyer jure de ne pas poser les armes qu’il n’ait rendu la liberté à son maître, il veut pénétrer dans son cachot, toutes les issues en sont strictement fermées, et defense expresse d’y aborder, sous peine de mort ; enfin, il parvient à parler au capitaine du château, ancien frère d’armes de Roland de Monglave, il réussit à l’intéresser vivement en faveur de ce jeune héros. L’actif écuyer presse le capitaine de faire évader son maître ; mais le capitaine homme intègre et sévère, ne veut pas manquer à son devoir et il lui promet seulement de tout tenter auprès du duc Milon.

Quelques momens après Roland est libre ; mais il ignore à qui il doit ce généreux service ; fort de son innocence, il veut courir se justifier auprès du duc, son écuyer et sa femme le retiennent, et lui conseillent de fuir au plutôt ; des gardes arrivent, on les environne, Roland et son écuyer font preuve de grande bravoure, mais Roland est forcé de céder au grand nombre qui l’accable de toutes parts ; on l’entraine et on le jette dans un cachot.

Roland est condamné à mort pour crime de trahison, et le grand prévôt est chargé de faire exécuter l’arrêt. Il est nuit ; on le conduit au lieu du supplice ; mais un ordre du duc retarde l’exécution ; on le charge de chaînes et on le met sous la garde de deux sentinelles. Le fidel écuver, déguisé en vivandier, parvient à endormir les soldats avec une liqueur somnifère : il scie les chaines de son maître et lui rend la liberté. Au moment où il veut fuir, un affidé du grand prévôt les appercoit, veut appeller du secours ; mais Roland et son écuyer le menacent de la mort, s’emparent de lui et l’enferment dans une tour d’où il est bientôt débarrassé par des soldats et le grand prévôt, qui ordonne qu’on coure vivement à la poursuite de Roland. Roland, sa femme et son écuyer abordent dans un vallon entouré de rochers. Un des chefs de l’expédition contre Roland a été sauvé par celui-ci, et Roland se faisant connoitre à lui, le soldat lui avoue toute l’infernale trame de Lisiare, son ennemi. Celui paroit bientôt ; fatigué, il veut prendre du repos, et va se délasser dans une grotte voisine : c’est-là qu’il trouve son tombeau ; ses propres soldats veulent tuer un ours qui s’enfonce dans la grotte, tirent tous sur l’animal montagnard, et bientôt ils entendent les cris de Lisiare, que le ciel frappe en même tems de la foudre.

Le duc instruit de la scélératesse de son grand prévôt, et de l’innocence de Roland lui rend toute son amitié et sa confiance.

Tel est le fond de cette pièce, on a applaudit avec justice au second acte où il y a une grande entente de la scène, un intérêt bien soutenu, de la rapidité et de l’énergie, le rôle du capitaine a pareillement fait grand plaisir. L’auteur a été demandé, c’est le citoyen Loaisel Théogate.

Laquiante, Un hiver à Paris sous le consulat, 1802-1803, d'après les lettres de J. F. Reichardt, p. 288 (reproduisant les propos de Johan Friedrich Reichardt, en 1802-1803) :

Je vous fais grâce du pathétique débordant des épanchements de Roland et de son Isaure ; je passe sur les divagations tonitruantes de Milon de Liziard, duc de Souabe, ami, puis rival et définitivement ennemi mortel de Roland. J'arrive au dénouement, qui fait assister au châtiment de Milon. Au moment où il finit un monologue terrible contre son rival, le tonnerre gronde, l'éclair brille, et le duc qui craint la pluie s'apprête à se glisser dans une caverne. Avant de s'y dissimuler, il exhale son agitation en phrases haletantes : Je ne sais ... Malgré moi, j'éprouve une tristesse ... Ce deuil de la nature... Tout m'annonce (Quoi, mon Dieu ? Serait-un pressentiment fatal?) ... un terrible orage ! ... Entrons dans cette grotte !...

D'après la base César, la pièce, dont le titre est Roland de Montglave, a connu 14 représentations au Théâtre de l'Ambigu-Comique (11 fois du 30 janvier au 23 juin 1799) et au Théâtre de la Gaîté (3 fois, les 7, 8 et 18 août 1799).

Raphaël Gimenez, L'Espace de la douleur chez Loaisel de Tréogate (Paris, 1992), p. 111, parle de 43 représentations « du vivant de l'auteur », soit jusqu'en 1812.

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