Le Salon [de la] rue du Coq, folie vaudeville en un acte, en prose de Rougemont et D*** [Marc-Antoine Désaugiers ou Dumarsan], 9 novembre 1808.
Théâtre du Vaudeville.
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Titre :
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Salon [de la] rue du Coq (le)
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Genre
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folie-vaudeville
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Nombre d'actes :
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1
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Vers ou prose ,
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en prose avec des couplets en vers
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Musique :
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vaudevilles
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Date de création :
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9 novembre 1808
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Théâtre :
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Théâtre du Vaudeville
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Auteur(s) des paroles :
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Rougemont et D*** (Dumersan ou Marc-Antoine Désaugiers)
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Almanach des Muses 1809.
Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Fages, 1808 :
Le Salon rue du Coq, Folie-vaudeville, en un acte, en prose, Par MM. de Rougemont, et D***. Représentée pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre du Vaudeville, le 9 novembre 1808.
Le D*** de la page de titre, ce peut être Marion Dumersan (pour M; de Soleinne ou la correspondance de Grimm), mais aussi Marc-Antoine Désaugiers (d'après La littérature française contemporaine, tome troisième, Paris, 1848, p. 344). Tous deux ont collaboré avec Rougemont pour d'autres pièces.
L’Esprit des journaux français et étrangers, tome XII, décembre 1808, p. 289-294 :
[Tout le début de l’article est consacré à montrer combien la pièce manque d’originalité. Le critique prend soin de rappeler tous les emprunts qu’elle fait à de nombreuses sources. L’analyse du sujet qui suit montre une intrigue touffue et fort peu vraisemblable, avec des imbroglios fort peu satisfaisants. Le critique s’attache à donner tous les détails qu’il a compris, nons ans faire un peu d’ironie sur la pièce. Puis il rend compte de la fin de la représentation : vaudeville final escamoté, grand silence au baisser du rideau : l’auteur restera anonyme... mais un anonymat qui ne résistera pas au temps.]
Le Salon de la rue du Coq.
II est vraiment bien dommage qu'une pièce aussi;patriotique soit si ennuyeuse ; nous avons fait tout ce que nous avons pu\ pour être contens ; chacun y a mis du sien, et ce n'est pas la faute de MM. Corneille, Racine, Voltaire, Molière, Buffon, Pascal, Bossuet, Fénélon, Grétry, Préville, Girodet, etc., si la pièce n'a pas réussi. Ils ont prêté leurs noms de la meilleure grace du monde pour faire les vers des couplets. Je demande bien pardon, au reste, à ceux que j'oublie. L'auteur n'a oublié personne ; il a même su,
De traîtresse manière,
Se faire un beau manteau de tout ce qu'on révère.
Des sifflets innocens se trouvaient tout d'un coup arrêtés par le respect, et obligés de se taire devant un mauvais couplet dédié à un nom respecté ; mais quand les chants avaient cessé, et qu'il ne s'agissait plus que de la pièce, ils reprenaient leurs droits, et ont rendu à chacun ce qui lui appartient. Pour en faire autant, l'auteur devrait rendre à Corneille et à Voltaire l'invention d'une lettre qui, déchirée par la moitié, présente un sens absolument différent de celui qu'elle a eue en son entier. On peut voir une semblable lettre dans Don Garcie ; on se souvient aussi des tablettes de Zadig : dans les deux cas, cette singularité est donnée comme un effet du hasard, au lieu qu'ici c'est exprès qu'une jeune personne écrit ainsi à son amant, devinant apparemment que dans les efforts que fera son valet pour lui arracher cette lettre qui le désespère par les duretés apparentes qu'elle contient, la lettre se déchirera tout juste à l'endroit où il faut qu'elle se déchire pour lui apprendre ce qu'il veut qu'il sache. On est bien aise de retrouver ses vieilles connaissances si bien employées. Une autre scène du même vaudeville rappellera celle où Chicanneau frappe à la porte de Dandin que Petit-Jean ouvre à chaque question et ferme après chaque réponse. Si l'on se souvient que Corneille a dit :
L'amour est on plaisir, l'honneur est un devoir,
on aura du plaisir à apprendre ici que
La gloire est le premier amour,
Le premier plaisir est l'honneur.
Pour ceci ce n'est pas la même chose, et l'on voit bien qu'il n'y a rien là d'emprunté à Corneille; c'est ce qu'il y a de plus neuf dans la pièce. Quant à l'intrigue, elle sera, si l'on veut, prise de M. de Pourceaugnac ou d'un de ses nombreux descendans ; elle peut appartenir à M. Beaufils, que j’ai omis de citer comme un des grands hommes mentionnés dans ce vaudeville. M. et Mme. Denis n'y sont pas oubliés non plus. L'auteur a, comme on voit, bonne mémoire. Dois-je lui conseiller d'en faire usage pour le cas présent ? Je ne sais sî, pour le bonheur et le repos d?un auteur tombé, on doit lui souhaiter d'oublier sa chute, ou de s'en souvenir.
La scène de ce vaudeville est, comme le titre l'annonce, dans la rue du Coq, entre la boutique sur le devant de laquelle sont exposées les caricatures et la maison qui fait face où loge M. Robert, dont la nièce Cécile, aimée d'un jeune peintre nommé Sainville , est promise en mariage à M. Moutonnet ; celui-ci vient exprès pour l'épouser du Perche, où , dit-il, il ne veut pas se marier. parce que les femmes y sont trop grandes, ce qui veut dire apparemment que ce sont des perches. L'amant désespéré a envoyé courir son valet je ne sais où, pour y faire je ne sais quoi, afin de rompre ce mariage. Ce que le valet a imaginé de mieux, c'est de faire ^peindre à la hâte M. Moutonnet -qu’il a rencontré dans la diligence, de mettre son nom au bas du tableau, de le placer au salon, bien sûr que le ridicule de cette figure dégoûtera M. Robert de son prétendu neveu. Il ne doute pas du succès de cette belle invention, apparemment qu'il a pour cela parole de l'auteur. M. Robert, après avoir fait donner à Sainville un congé, écrit de la main de Cécile, de la manière que j'ai dit, mène celle-ci au salon. Pendant ce temps, M. Moutonnet arrive ; on lui dit que M. Robert est à l'exposition des tableaux : lé valet lui fait croire que ce qu'on appelle le salon d’exposition, c'est cet étalage de caricatures placé en face de la maison de M. Robert, et devant lequel se promènent durant toute la pièce une foule de curieux, qui ne prennent d'autre part à la scène que de remplir le théâtre sans prononcer un seul mot. Le valet propose à M. Moutonnet de lui faire voir le portrait de sa prétendue, et lui montre une caricature de M. et Mme. Denis, sur quoi il raconte qu'elle a été mariée en premières noces. Pendant ce temps-là aussi arrivent deux amateurs disputant sur le salon dont ils sortent, et sur l'état des arts en France. L’un qui n'aime que les étrangers dit, comme de raison, d'énormes bêtises. Mais, malheureusement celui qui a le bon esprit de n'aimer que les Français, ne dit pas des choses assez spirituelles. Il chante par exemple que
La France est le berceau des arts.
Qui ne croira, d'après cela, que les arts y sont dans l'enfance ? Il admire beaucoup un tableau, parce que son intention est vraiment française. Il en loue un grand sombre d'autres par d'aussi bonnes raisons ; car il loue beaucoup, toujours, et louerait encore, si M. Robert n'arrivait, indigné d'avoir vu le nom de M. Moutonnet au bas d'un portrait ridicule, ce qu'il regarde comme une ruse de Sainville , et cette idée est assez raisonnable : car si M. Moutonnet ressemble en effet à son portrait, à quoi bon faire peindre la figure d'un homme qu'il suffit de faire voir ? Ainsi donc, en voyant l'original, M. Robert se confirme toujours davantage dans l'idée de la supercherie, et veut absolument regarder M. Moutonnet comme un Moutonnet supposé. Tandis que celui-ci soutient l'identité de sa personne, arrive Sainville, à qui ses tableaux placés au salon viennent d'obtenir une médaille ; la vente de ces mêmes tableaux le met en état de payer mille écus que doit M. Robert à M. Moutonnet le père, et dont il devait recevoir quittance en mariant Cécile avec M. Moutonnet le fils. Les choses ainsi arrangées, sans qu'aucun des moyens sur lesquels se fonde l'intrigue y ait contribué le moins du monde, il ne nous restait plus qu'à entendre le vaudeville de la fin ; mais le public, qui depuis long-temps bataillait contre la pièce, a en ce moment remporté la victoire ; une seule voix a voulu nous faire entendre le dernier couplet qui réclamait
Un parterre indulgent et sage.
Le parterre a paru croire qu'en ce moment indulgence n'était pas sagesse ; la toile s'est baissée, et l'auteur, qu'aucune voix n'a demandé, a eu du moins la consolation de
Ne laisser aucun nom et mourir tout entier. P.
Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, année 1808, tome VI, p. 187-188 :
Le Salon rue du Coq, folie-vaudeville jouée le 9 novembre.
Les pièces de circonstance sont l'apanage du Vaudeville. Le Salon ne pouvoit échapper à ses refrains : s'il a été cette fois un peu louangeur, il est vrai qu'on ne sauroit l'en blâmer, car l'exposition est assez belle pour faire honneur à notre école. La scène où on passe en revue les tableaux est encadrée dans un fond assez léger : c'est l'historiette d'un nigaud qui arrive de province et à qui on fait prendre la boutique de Martinet pour l'exposition des tableaux. Un valet rusé profite de sa simplicité pour lui faire accroire que le portrait de Madame Denis est celui de la femme qu'il vient épouser, et qu'elle a été mariée à Saint-Germain-l'Auxerrois. Cette plaisanterie a beaucoup fait rire. Il y a de jolis couplets dans cette petite production de M. DE ROUGEMONT.
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