Les Trois Noces, pièce champêtre en un acte, avec ses agréments, texte et musique de Dezède, 23 février 1790.
Théâtre de la Nation.
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Titre :
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Trois Noces (les)
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Genre
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pièce champêtre avec ses agréments
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Nombre d'actes :
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1
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Vers / prose ?
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prose, avec des couplets en vers
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Musique :
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oui
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Date de création :
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23 février 1790
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Théâtre :
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Théâtre de la Nation
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Auteur(s) des paroles :
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Dezède
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Compositeur(s) :
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Dezède
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Mercure de France, tome CXXXVIII, n° 12 du samedi 20 mars 1790, p. 94-95 :
[Plutôt que de nous éclairer sur ces trois noces, le critique; qui réduit la pièce à « une bagatelle sans prétention », insiste sur les allusions politiques qu’elle contient, et qui soulèvent tant l’enthousiasme. Dezède, auteur à la fois des paroles et de la musique, est chaleureusement félicité.]
THÉATRE DE LA NATION.
La petite Pièce des Trois Noces, donnée sur ce Théatre le 23 Février, est une bagatelle sans prétention, et non pas sans intérêt. C'est un cadre dans lequel l'Auteur a voulu faire entrer plusieurs événemens du jour, notamment l’arrivée du Roi à l'Assemblée nationale. On y rapporte plusieurs phrases de son Discours, qu'assurément on n'avoit pas oubliées, et qu'on a entendues encore avec délices.
Les paroles et la musique sont de M. Dézede, c'est pour la seconde fois qu'il réussit comme Poëte, puisqu'il étoit l'un des deux Auteurs de la Comédie des Deux Pages, comme Musicien, on sait que ses succès sont plus nombreux, et non moins mérités. Les charmans airs qu'on a vivement applaudis dans les Trois Noces, ont rappelé ce faire pittoresque, original et gracieux qui distingue les Ouvrages de ce Compositeur.
L’Esprit des journaux français et étrangers, 1790, tome IV (avril 1790), p. 328-330 :
[L’auteur de ce compte rendu n’a pas assez de mots pour décrire l’enthousiasme patriotique que cette pièce fait naître, bien que les allusions à la situation politique qui suscitent cet enthousiasme paraissent plaqués arbitrairement sur un imbroglio sentimental un peu confus, et dont on ne connaîtra pas le dénouement. Mais on sait qu’il y a des danses exécutées par les acteurs, et un appareil militaire !]
On a donné le 23 février, la premiere représentation des Trois Noces, piece champêtre
en un acte, avec ses agrémens
C'est dans un village, & à la fête de la dame du lieu , marquise bienfaisante , adorée de ses vassaux, que se célebrent les Trois Noces.
L'une des prétendues est une femme dégourdie, nommée Robert (rôle très-bien joué par Mlle. Joly), qui a d'un premier mari, une fille aussi égrillarde qu'elle, & que M. le Bailli, dans son veuvage, a consolée de maniere qu'il a été obligé de lui faire une promesse de mariage.
M. le bailli, qui a déja eu trois femmes, dont il n'a pas été fort content, n'est rien moins que disposé à en prendre une quatrieme : de là des scenes très plaisantes entre lui & Mde. Robert, entre cette commere & sa fille, & entre celle-ci & un jeune amoureux, filleul du bailli, représenté avec beaucoup de naturel par Mlle de Vienne, qui , bien différent de son parrein, veut à toute force épouser.
Madame la marquise concilie tous ces intérêts : & le village se livre à la joie , malgré l'incursion de quelques brigands qui ont voulu, depuis peu, mettre le feu au château, mais qu'on a dissipés.
Ces brigands, retirés dans les bois, reparoissent tout-à-coup ; ce qui occasionne une grande rumeur. La garde nationale l'appaise promptement, en poursuivant avec vigueur ces scélérats ; action qui se passe au fond du théâtre, & qui, jointe au trouble répandu parmi les villageois, & aux marques d'attachement qu'ils prodiguent à la marquise éperdue, forme un spectacle très-intéressant.
Celle-ci, revenue à elle, n'est pas encore entiérement rassurée : elle attend la comtesse , sa fille, qui revient de Paris, & qui peut avoir été attaquée en route.
Bientôt le retour de cette jeune personne, qui arrive sans avoir éprouvé d'accident, non seulement acheve de tranquilliser tout le monde, mais remplit les cœurs d’allégresse, par les bonnes nouvelles qu'elle apporte. Elle étoit présente à la séance de l’assemblée nationale, où le roi a paru, comme un pere au milieu de ses enfans. Elle peint des couleurs les plus vives ce beau moment, & cite avec attendrissement les traits les plus touchans du discours du roi. Mad. Petit, qui fait ce personnage, a arraché des larmes en rapportant ces traits à jamais mémorables.
L'ivresse s'est emparée alors de tous les spectateurs ; & ils ont couvert d'applaudissemens, & la piece, & les acteurs, qui tous se sont efforcés, à l'envi, de faire valoir le patriotisme qui y brille.
Une charmante musique, composée par M Dezede, de jolis couplets, qu'on a presque tous redemandés, des tableaux champêtres très-agréables, des danses variées, exécutées par les acteurs mêmes, & un appareil militaire très-bien ordonné, pour prêter le serment civique, tout a contribué au succès brillant qu'a obtenu cette nouveauté, qui ne pouvoit manquer d'exciter un enthousiasme universel.
Correspondance littéraire de Grimm, nouvelle édition, tome quinzième (Paris, 1831), p. 30-31 :
[Grimm nous donne une explication intéressante de l’arrêt précoce des représentations : fondée ou non, cette raison renvoie à la rivalité entre les théâtres, et à la volonté des Comédiens Français de conserver leur répertoire ; il leur faudrait donc montrer qu’ils respectent l’exclusivité des Italiens en matière de chant, pour éviter que ces derniers n’empiètent sur le territoire des Comédiens Français. Le compte rendu souligne que l'intrigue est peu de choses, et que la pièce vaut surtout par les allusions marquées à l'actualité : les brigands tentant de brûler le château, le roi venu à l'Assemblée nationale. Le ballet de la fin montre « le serment civique de la manière la plus solennelle et la plus ingénieuse ». Dezède a réussi au Théâtre de la Nation pour la deuxième fois, comme auteur des paroles et comme compositeur. Et les interprètes sont jugés remarquables.]
Les Trois Noces, quoique représentées sur le Théâtre de la Nation le 23 et le 24 février avec le plus grand succès, n'ont pas tardé à être retirées du répertoire de ce Théâtre, parce qu'il a été décidé dans le conseil intime de M. Molé et de mademoiselle Contat, qui n'y avaient point de rôles, que ce petit ouvrage était d'un genre tout-à-fait étranger à la Comédie Française, et qu'en se permettant de jouer sur leur théâtre des opéras comiques, ils n'oseraient plus trouver mauvais que les Italiens jouassent des pièces de Molière et de Racine. Il est bien vrai que les Trois Noces ne sont véritablement qu'un très-petit opéra comique, mais dont le sujet est tout-à-fait national, car les apprêts des trois noces villageoises dont il s'agit ne sont pour ainsi dire que le prétexte de la pièce; ces apprêts, qui remplissent la première scène d'un tableau digne de la palette riante de Boucher ou de Watteau, sont bientôt troublés par des brigands qui viennent incendier le château de la Dame du lieu ; mais cette Dame n'étant rien moins qu'aristocrate, on vole à son secours, et les gardes nationaux repoussent et dispersent la horde incendiaire. Dans ce moment même arrive de Paris la fille de madame la marquise, qui fait à sa mère le récit le plus touchant de l'arrivée du roi à l'Assemblée nationale. Le tout est terminé par un divertissement où le sieur Deshayes, premier maître des ballets du Théâtre de la Nation, a eu l'art de figurer le serment civique de la manière la plus solennelle et la plus ingénieuse.
Les paroles et la musique sont de M. Dezède, qui réussit pour la seconde fois sur la scène française comme poète et musicien. Le morceau de musique qui nous a paru le plus piquant est une assez longue ariette en prose que chante une mère à sa fille pour lui apprendre comment une femme adroite ne saurait manquer de gouverner son mari. Le rôle de cette mère a été parfaitement bien joué par mademoiselle Joli ; les autres ont été également bien rendus par mesdames Bellecour et Petit, mesdemoiselles de Vienne, Lange, etc. M. Dazincourt a mis dans le rôle du bailli toute la gaieté dont son talent peut être suceptible [sic].
La base César attribue texte et musique à Nicolas Dezède, et ne connaît que deux représentations au théâtre de la Nation, les 23 et 24 février 1790.
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