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Victor, ou l'Enfant de la forêt

Victor, ou l'Enfant de la forêt, tragi-comédie héroï-comique en cinq actes, en prose, à spectacles, d'Augustin Prévost, 26 pluviôse an 6 [14 février 1798].

Théâtre Sans Prétention.

La pièce de Prévost ne doit pas être confondue avec la pièce homonyme de Guilbert de Pixerécourt. Toutes deux adaptent un roman très populaire, de Ducray-Duminil, paru en 1797 et qui porte le même titre que les deux pièces.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, sans indication d'éditeur et sans date :

Victor, ou l'Enfant de la forêt, tragi-comédie héroï-comique en cinq actes, en prose, à spectacles. Par Prévost, artiste dramatique et directeur du théâtre sans prétention ; 26 pluviôse, an 6 de la République Française.

Le texte de la pièce est précédé d'un avis :

[Les pièces de Prévost sont souvent accompagnées d'une préface. Ici, c'est un simple avis qu'il a mis en tête de sa brochure. Il consiste d'abord en un diagnostic de l'état du théâtre, que l'auteur trop désastreux  un théâtre d'aventure et de merveilleux, fait « pour piquer la curiosité », et qui ignore les règles du théâtre. Une pièce n'ayant qu'un but moral, et ne faisant pas voyager dans le monde entier les spectateurs ne suscite que l'ennui. A cela s'ajoute l'obligation de « passer sous la férule d'un censeur ». L'auteur affirme que sa pièce ne correspond pas à son goût, et il n'a fait que des concessions partielles au goût du temps : « ne pas sortir des règles, […] introduire un peu de morale et de vraisemblance, et il a pris son « sujet dans un roman en vogue » (le roman homonyme de Ducray-Duminil, paru en 1797, qui a eu un très grand succès). La réussite de la pièce est incertaine, mais Prévost montre qu'il se soucie peu de l'accueil reçu. Il revendique hautement sa facilité : quatre nuits ont suffi pour une pièce en cinq actes, et il affirme que les critiques ne feront que lui faire plaisir.]

AVIS.

Comme les goûts changent, l'on ne sait plus quel sujet traiter dans la comédie : il faut actuellement du merveilleux, des féeries, des diableries, des voleurs, pour piquer la curiosité ; enfin toutes choses qui soient surnaturelles : l'on ne s'embarrasse plus des règles théâtrales ; l'on passe par-dessus toutes les convenances, et celui qui observe ces règles passe pour un sot. L'on bâille en voyant une comédie où il n'y a qu'un but moral et une action simple : l'on veut être porté, en deux heures et dans la même pièce, en Chine, en Turquie, en Perse, en France, en Afrique, en Amérique, en Russie ; en un mot, l'on veut courir d'un pôle à l'autre : l'on veut encore que les Divinités aériennes, infernales et célestes se rassemblent : le bruit, le fer, la flamme, les pluies de feu, la fumée, tout cela forme un spectacle enchanteur et qui ravit : voilà tout le fruit que l'on peut retirer des pièces actuelles. Mais c'est le goût, me dira-t-on que voulez-vous faire ? Il faudroit que des gens éclairés veuillent bien sacrifier leurs veilles pour ramener le bon goût; il n'en manque certainement pas en France. Mais un directeur de spectacle qui voudroit entreprendre de faire jouer ces bons ouvrages, seroit ruiné avant que le bon goût renaisse. En outre, il faut passer sous la férule d'un censeur qui ne laisse dans les ouvrages que ce qui lui plaît ou qui s'accorde avec son caractère ; il faut, par nécessité et malgré soi, suivre la mode.

J'ai donc entrepris de faire cette pièce contre mon goût ; je me suis efforcé cependant de ne pas sortir des règles, d'introduire un peu de morale et de vraisemblance ; ce qui fait qu'elle paraîtra peut-être plus froide que celles qui se jouent actuellement. J'ai pris mon sujet dans un roman en vogue ; ce qui est encore la mode. Plusieurs personnes me reprocheront peut-être de l'avoir trop suivi, d'autres de ne pas l'avoir suivi assez : mais quand je fais quelques ouvrages, je ne réfléchis point à tout cela ; je suis mon idée: ceux à qui elle ne plaira pas ne liront pas ma pièce ; je me suis amusé ; d'autres s'amuseront peut-être aussi à mes dépens. En tout cas, j'ai donné assez matière aux critiques : c'est ma trente-septième pièce de théâtre. Celle-ci ne m'a coûté que quatre nuits ; les autres que j'ai faites encore moins ; ainsi je m'amuse à peu de frais ; vous pouvez en faire de même : critiquez tant que vous voudrez, vous n'échaufferez pas ma bile ; au contraire, c'est une jouissance de plus pour moi.

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Nota. Je déclare que je n'ai cédé à aucun libraire la propriété de la pièce intitulée : Victor, ou l'Enfant de la Forêt ; que tous les exemplaires qui ne seront point signés de ma main, seront regardés comme contrefaçon, et que je poursuivrai les contrefacteurs par-devant les tribunaux.

La base César présente la pièce comme un mélodrame en trois actes en prose, d'Augustin Prévost et lui accorde deux représentations, l'une le 25 septembre 1799 au Théâtre Sans Prétention, l'autre le 6 novembre au Théâtre des Jeunes Artistes.

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