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L'Intrigue dans la hotte

L'Intrigue dans la hotte, vaudeville en un actede MM. Armand Gouffé et Simonnin, 8 février 1806.

Théâtre Montansier.

Almanach des Muses 1807.

Sur la page de titre de la brochure, Paris, Barba, 1809 :

L'Intrigue dans la hotte, vaudeville en un acte ; Par MM Armand Gouffé et Simonnin ; Représenté, pour la première fois à Paris, sur Montansier, le 8 février 1806 ; Remise au Théâtre des Variétés, en Janvier 1808. Seconde édition.

Courrier des spectacles n° 3298 du 11 février 1806, p. 2-3 :

[Avant d’analyser la pièce nouvelle (dont il déforme le titre), le critique tient à montrer sa désapprobation de l’évolution du Théâtre Montansier, où on joue de plus en plus souvent des pièces peu convenables : jusqu’où descendra-t-on dans ces intrigues ? Jusqu’à « l’intrigue du cabinet » ? Suit l’analyse d’une intrigue peu originale (un oncle qui veut marier sa nièce à quelqu’un dont elle ne veut pas, mais dont on finit par s’apercevoir qu’il est malhonnête, ce qui permet qu’elle se marie avec son bien aimé. Ce garçon est joué par Brunet, l’acteur capable de tous les déguisements, et qui se travestit en femme pour s’introduire auprès de sa maîtresse. Pour supporter une telle pièce, il faut supporter « une foule de lazzis, de calembourgs et de jeux de mots d’un assez mauvais genre ». Mais l’essentiel pour le public du Théâtre Montansier est qu’on rie. Le critique condamne bien sûr ce qu’il appelle « désordre d’idées », « prostitution des règles du goût », mais il trouve aussi « quelques traits qui décèlent l’homme d’esprit », mais un homme d’esprit pris de boisson... Deux auteurs, dont un a souhaité rester anonyme.]

Théâtre Montansier.

L'Intrigue dans une hotte.

On devoit espérer que le succès du joli vaudeville de Maître Adam convertiroit les auteurs de ce théâtre ; qu’ils se persuaderoient enfin que pour réussir, il n’est pas toujours nécessaire d’avoir recours à des images grotesques, à des idées basses, à un style ignoble.

Il est constant que les Chevilles de Maître Adam sont plus recherchées que toutes les farces des Jocrises, des Sapajou, et de M. Vautour. On peut quelquefois s’amuser de ces parades burlesques, de ces imitations facétieuses dont les sujets sont pris dans les mœurs et le langage du petit peuple. Dulce est desipere in loco, mais il faut des bornes en tout ; et si l’on peut se permettre de descendre, ce ne doit jamais être jusqu’à l’abjection.

Celui qui le premier a mis sur la scène une Intrigue aux fenêtres, a donné un fort mauvais exemple. Ce n’était qu’une farce de carnaval, mais le succès qu’elle a obtenu a porté un coup très-préjudiciable à l’honneur théâtral. On a voulu renchérir sur elle ; on nous a promenés successivement sur les toits, dans les gouttières, sur les ponts, dans les caves ; et voici qu’on veut nous enfermer dans une hotte. Si cette maladie continue, il est difficile de savoir jusqu’où l’on ne nous mènera pas ; et je n’oserois désigner le lieu où il seroit possible que le génie de quelques auteurs s’avisât un jour de placer le siège de ses conceptions dramatiques. Pourquoi n’aurions - nous pas bieutôt l’Intrigue du cabinet ?

L’Intrigue dans la hotte ressemble beaucoup, pour le fonds et les détails, à toutes les pièces de ce genre jouées depuis quelque tems sur le Théâtre Montansier.

M. Dutilleul, marchand herboriste, veut marier sa nièce Patience à M. Propet , marchand de plumeaux ; mais Mlle. Patience lui préfère un jeune égrillard nommé Malice. Comme Dutilleul vend des simples aux malades , on s’adresse souvent à lui pour trouver des gardes-malades. Malice qui a besoin de se déguiser pour voir sa chere Patience, profite de ce moyen pour s’introduire dans la maison de Dutilleul. Il se présente en habits de femme, et se propose au bon herboriste pour soigner les malades de sa connoissance.

Brunet qui joue ce rôle, s’en acquitte d’une manière très-burlesque. Propet est un assez mauvais sujet, qui emprunte de l’argent, ne le rend point, et contracte des dettes tous les jours. Malice, qui lui avoit prêté 500 francs, est fort en peine des moyens de les recouvrer, il sait que son rival a des fonds chez un notaire ; il se propose de former une opposition à leur délivrance ; mais il ne sait pas l’adresse du notaire. Pour se tirer de cet embarras, il se niche adroitement dans la hotte de Propet, et se dispose à se laisser ainsi colporter dans les rues ; mais Propet préfère de laisser sa hotte chez Dutilleul. Cet incident, loin de nuire à Malice, le sert merveilleusement, il voit sa maîtresse, et concerte ses projets avec elle.

La manière dont Brunet satisfait à tous ces détails amuse beaucoup le public ; tautôt c’est sa tête qui passe hors de la hotte, tautôt c’est son rival qui est sur le point de le jetter dans la rivière. Enfin, comme il convient que justice soit rendue à tout le monde, on découvre que Propet est un mauvais sujet ; que Malice est un amant très-fidèle et très-tendre ; et on lui accorde la main de Mlle. Patience.

Si l’on vouloit juger tout cela sérieusement, il faudroit beaucoup de patience pour supporter une foule de lazzis, de calembourgs et de jeux de mots d’un assez mauvais genre, et l’on pourroit dire qu’il n’a pas fallu beaucoup de malice aux auteurs pour inventer toutes ces belles choses ; mais on rit de ce rire large qui dilate les poumons, et c’est à-peu-près tout ce qu’il faut pour beaucoup de spectateurs. Au milieu de ce désordre d’idées et de cette prostitution des règles du goût, on remarque pourtant quelques traits qui décèlent l’homme d’esprit ; mais l’homme d’esprit dans l’état où l’on nous peint Caton, quand on dit de lui : Narratur et Prisci Catonis sæpè mero caluisse virtus.

Les auteurs sont M. Simonin et un anonyme.

La citation latine de la fin provient d’une ode d’Horace (l’ode 21 du livre 3) et peut se traduire littéralement ainsi : « On raconte que la vertu de Caton l’Ancien était échauffée souvent par du vin pur ».

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