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Le Maître de Musique (il Maestro di Capella)

Le Maître de Musique (il Maestro di Capella), opéra italien (intermède comique), par M. Cimarosa, 21 messidor an 9 (10 juillet 1801).

Théâtre Favart.

Titre :

Maître de musique (le) (il Maestro di Capella)

Genre

opéra italien (intermède comique)

Nombre d'actes :

 

Vers / prose

 

Musique :

oui

Date de création :

21 messidor an ç (10 juillet 1801)

Théâtre :

Théâtre Favart

Auteur(s) des paroles :

 

Compositeur(s) :

Cimarosa

Courrier des spectacles, n° 1594 du 23 messidor an 9 [11 juillet 1801], p. 2 :

[Le compte rendu parle du chanteur (plutôt en bien, avec des réserves sur ses moyens), de l’orchestre du théâtre, qui joue très bien. Mais rien sur la pièce, qu’il faut seulement, sans doute ranger dans les « bons ouvrages d’Italie ».]

Théâtre Favart.

Il Maestro di Capella, intermède de Cimarosa joué par le bouffon Ellemenreich, a fait grand plaisir. Cet acteur est d’un comique admirable ; il paroit excellent musicien.

Sa voix sans être forte, ne manque pas d’étendue ; il ne l’assure pas toujours avec succès, mais il sauve par le goût la faiblesse de ses moyens. Il joue plus qu’il ne chante, mais il joue avec beaucoup de singularité ; seul il anime la scène et enchaîne l’attention du spectateur.

L’orchestre Favart exécute en perfection, et il ne sauroit trop profiter de la présence de cet étranger pour nous faire jouir de quelques autres bons ouvrages d’Italie.

B * * *.

Gazette nationale, ou le Moniteur universel, 24 messidor an 9, p. 1222 :

[Dans ce compte rendu en forme de fourre-tout, le critique reprend des questions de fonds, sur la relation de l’Opéra-Comique et de la musique italienne, sur la question de la longueur excessive des œuvres italiennes, mais aussi des questions d’actualité, comme l’apparition de ce chanteur allemand venu suppléer des chanteurs français en congé. Le compte rendu de la représentation du 21 messidor en devient secondaire, au point de poser (assez mal) la question de l’auteur (qui est bien Cimarosa, nul n’en doute !]

Depuis quelque tems, l'Opéra-Comique paraît cesser d'être national, et vouloir redevenir Théatre Italien, suivant son ancienne dénomination. De jeunes compositeurs des écoles de Rome et de Naples lui consacrent leurs productions, et le public a un opéra bouffon , à côté de l opéra buffa.

Après avoir donné à un tonnellier français une maniere de chanter qui ne lui convenait gueres, le compositeur Nicolo lsoard a reçu des mains du citoyen Delzieu, auteur connu par quelques succès au théâtre, l'Impromptu de Campagne de Poisson, arrangé pour la scene lyri-comique. Les morceaux consacrés à la musique y sont en général bien placés, c'est sans doute le seul éloge auquel l'auteur d’une telle métamorphose semble devoir prétendre. Quant aux morceaux eux-mêmes, on n'a paru remarquer que le premier rondo, chanté de la maniere la plus agréable par mademoiselle Phillis ainée, et un duo de femmes, dont la terminaison est très-heureuse. Dans un sextuor, le compositeur saisit l'occasion de tourner en ridicule l'ancienne musique française : et assurément personne ne lui en conteste le droit ; mais son goût aurait dû l'avertir de ne pas choisir. pour l'opposer à l'école moderne, l'ancien air : Dans notre heureux asyle, air qu'on regardera toujours, quelle que soit sa date et le nom de son auteur : comme un modele d'expression de naturel et de mélodie.

En l'absence de ses premiers sujets (madame Saint-Aubin, Martin et Elleviou sont en congé), l’Opéra-Comique a depuis quelques jours donné accès à un allemand, M. Elmerinck, qui offre une réunion de moyens et de talens très-extraordinaires. Musicien consommé, bouffon assez original, imitateur exercé connaissant presque tous les instrumens, chantant tous les genres connus, ayant à sa disposition toutes les sortes de voix, parcourant toutes les gammes, juste dans toutes les octaves, rivalisant tour-à-tour avec tous les instrumens qu il contrefait, depuis le flageolet dans ses sons les plus aigus, jusqu'à la contre-basse lorsqu'elle fait gronder sa note la plus grave ; cet étranger est en quelque sorte à lui seul une troupe entiere, et un orchestre complet. Il est presqu'inutile d'ajouter que son talent, par sa nature même, est plus susceptible d’étonner que de plaire. L'auditeur est rarement surpris à s'écrier: Cela est charmant ; mais de tous les côtés on entend répéter : Cela est incroyable.

Il a d'abord paru dans un intermede de Paësiello, intitulé : Il Calzolaro (le Cordonnier ) ; là , il n'a eu l'occasion que de déployer son talent pour l'imitation.

Le second interméde dans lequel il vient de chanter, secondé par sa femme, mademoiseIle Philiis et Dozainville, sans être plus propre à notre scene, offre un peu plus de variété. Son titre est : Il Maestro di Capella : production connue et estimée en Italie, que l’Opéra-Comique attribue à Cimarosa , et que le Journal de Paris revendique en faveur de Paësiello ; toutes fois il ne faut pas confondre cet intermede avec Il Maestro di Musica, que le traducteur de la Servante Maitresse, Baurans, donna parodié en 1755, à la comédie Italienne, avec moins de succès que le chef-d'œuvre de Pergoleze.

On entend dans cet ouvrage une espece de mélodrame de l'effet le plus piquant : il est beaucoup trop long pour la scene française : il est trop court pour ceux qui voudraient avoir le tems de bien apprécier combien tous les motifs de chant ont du naturel et de la grace, combien les phrases d'accompagnement qui lient le récitatif, ou soutiennent le chant sont spirituelles et variées. Dans ce morceau, le maître de musique, mécontent de son orchestre, veut lui donner une leçon : il veut apprendre à chaque instrument comment il doit exécuter ses solo, ses cadences, ses roulades : il marque les piano, les forte, les pizzicato, les col arco, etc. etc. L'orchestre obéit avec une ponctualité, avec une précision d'autant plus précieuses, que ces qualités sont indispensables pour l'effet du morceau. Le maitre de musique donne ensuite ses leçons : un duo à la maniere des nocturnes italiens donne occasion à madame Elmerinch, de faire entendre une voix pure, pleine, grave, d'une nature presqu'aussi extraordinaire que celle de son mari : madame Phillis et l'Etranger exécutent ensuite avec un goût exquis un duo charmant de l'opéra intitulé (i schiavi per amore) ; une scene de pure bouffonnerie termine cet intermede, dont le public fait répéter presque tous les morceaux.

Quel que soit le succés de M. Elmerinch, nous ne terminerons pas sans exprimer quelqu'étonnement de voir l'Opéra-Comique sortir, en l'admettant, du genre qui a constamment fait le succès de ce théatre. Au théâtre de l'Opéra-Buffa, l'étranger dont il s'agit eût été mieux placé sans doute. Un inconvénient majeur peut d'ailleurs naître de ces spectacles extraordinaires ; ils peuvent entraîner les artistes jusqu'à de la négligence pour les chefs-d'œuvre dont ils sont en possession. Hier n'a-t-on pas vu Stratonice, l'une des plus belles productions lyriques qui existent, sans exception, exécutée sous tous les rapports et dans toutes ses parties, avec une faiblesse au-dessous de la médiocrité, et cela sans doute parce que cette belle composition allait être suivie d'Il Maestro di Capella. Si l'exemple d'une telle négligence se répétait, sans humeur, ne pourrait-on pas se plaindre du mauvais goùt, ou même de l'ingratitude qui l'aurait fait maître?

Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, 7e année, 1801, tome II, p. 276 :

Il Maestro di Capella

(Le Maître de Musique)

Cet intermède italien, musique de Cimarosa a été joué e 21 messidor, par le C. Ellmenreich, son épouse, Dozainville, et M.lle Philis ; le C. Ellmenreich s'est montré aussi bon comique que dans le Calzolaro ; il a été aussi vivement applaudi.

La Décade philosophique, littéraire et politique, an XII, n° 21 (30 germinal), p. 182-184 :

[Ce compte rendu d’un concert (plus que d’une représentation théâtrale) date du 20 avril 1804. Mêlant la critique de plusieurs œuvres de plusieurs musiciens, il laisse voir une conception intéressante de la musique, en particulier le rejet de tout ce qui est interprété comme longueur. C’est ce qui explique la condamnation forte du récitatif : il faut que le poète et le musicien prennent garde à ne pas lasser l’oreille des spectateurs.

On note au passage l’attaque vigoureuse contre un certain critique, qui ne peut être que l’illustre critique de la Gazette nationale, ou le Moniteur universel, futur Journal de l’Empire, Geoffroy...]

Théâtre Italien de l'Opéra – Buffa.

Il Maestro di Capella (le Maître de Chapelle) et l'Avaro (l’Avare), intermèdes, musique de Cimarosa. Le Stabat Mater de Pergolèse. Il re Teodoro (le Roi Théodore ), musique de Paësiello.

Après avoir donné successivement plusieurs opéras-bouffons dont nous avons rendu compte, et qui n'ont eu et mérité qu'un succès médiocre, la troupe actuelle vient de faire dans un autre genre un essai qui lui a parfaitement réussi et qui prouve à la fois contre ses détracteurs et contre ceux qui prétendent que le nombre des amateurs n'est pas assez grand pour l'entretien d'un tel spectacle à Paris, tout le parti qu'elle peut tirer de cette nouvelle ressource et la bonne disposition du public : nous parlons ici de ces opuscules musicaux connus sous le nom d'intermèdes. On sait combien l'Italie offre de richesses en ce genre, qui nous sont totalement inconnues et qui seraient pour nous la source d'un plaisir chaque jour plus vif et plus varié. Graces à un ou deux de ces intermèdes représentés avant ou après un opéra-bouffon ordinaire, celui-ci pourrait être réduit au point de n'offrir que les morceaux véritablement dignes d'être entendus, et les amateurs n'auraient pas à supporter, comme ils l'ont eu jusqu'à présent, beaucoup de morceaux de remplissage, et sur-tout l'assommante longueur d'un récitatif que personne n'écoute. Quant au mérite dramatique de ces intermèdes en général, il ne suppose guères de plus grands efforts d'esprit de la part du poète que celui des opéras-bouffons. Mais n'eussent-ils sous ce point de vue rien de remarquable, ils ont au moins sur ceux-ci l'avantage d'être très-courts, et dans ce cas on est naturellement plus disposé à les traiter avec indulgence ; et comme assez souvent ils n'offrent qu'une situation isolée, il n'a pas été difficile au poëte de la rendre assez piquante pour soutenir l'intérêt au moins pendant un quart d'heure, et c'est tout ce qu'il faut au musicien pour y déployer toutes les richesses de son art.

Sous ce double point de vue, il Maestro di Capella et l’Avaro peuvent être mis au nombre des plus jolis intermèdes connus. L'acteur qui a été chargé de ces rôles, les a joués et chantés tous deux avec goût et intelligence ; mais par l'effet de la faiblesse de ses moyens, le second de ces intermèdes exigeant davantage du chanteur, a été beaucoup moins senti et consequemment moins favorablement accueilli que le premier. Aussi n'a-t-il été représenté qu'une seule fois ; mais nous sommes persuadés qu'un autre chanteur de la troupe (M. Martinelli par exemple), chargé de ce même intermède, en eût assuré le succès.

A la suite de chacun de ces deux intermèdes, le Stabat de Pergolèse a été chanté par mesdames Strina-Sacchi et Cantoni, et cette fois au moins le public a joui du plaisir d'entendre chanter dans son entier ce chef-d'œuvre de musique sacrée que deux noms célèbres nous rendent recommandable, même sous le rapport des paroles (1), et dont on n'exécute jamais dans les concerts publics, à Paris, que cinq ou six strophes choisies. Il faut d'ailleurs être bien aveuglé par l'esprit de dénigrement pour prétendre, comme l'a fait ces jours derniers un critique connu par son injustice et sa malveillance habituelles, que livrer le Stabat aux Bouffons, c’est crucifier Pergolèse. Ce critique si porté à favoriser la catholicité dans toutes les institutions qui y tiennent, eût-il préféré l'entendre exécuté dans une cathédrale par des castrats ? Tout en lui accordant ce que les deux cantatrices peuvent laisser à desirer, notamment la dernière sous le rapport de l'expression, du moelleux et de la flexibilité, il est faux pourtant que l'exécution de la première strophe ait été manquèe par elles ; il est encore plus faux que la contenance du public annonçait, vers les dernières strophes, plus de fatigue que de plaisir. Si ces dernières strophes ont fait une impression sensiblement moins vive, c'est tout simplement parce qu'étant d'une composition plus savante, elles sont moins susceptibles d'être senties par le commun des amateurs. Mais comment le même critique n'a-1-il pas rendu justice à la manière simple et touchante dont madame Strina-Sacchi a chanté toute sa partie, notamment le dum emisit spiritum et toute la strophe qui l'amène ? En général on doit dire que ce bel ouvrage a été exécuté dans toutes ses parties avec un degré de soin et de perfection, qui a dû satisfaire les oreilles les plus délicates et les connaisseurs les plus difficiles; et l'affluence constante du public à chacune des trois fois que le Stabat a été chanté, en a donné, à ce qu'il nous semble, une preuve suffisante.

L'espace nous manque pour parler aussi longuement que nous le voudrions du Roi Théodore, attendu avec impatience, et dont le compositeur même avait préparé l'exécution. L'ouvrage, depuis long-tems connu en France et consacré dans l'opinion, n'a pas besoin de nos éloges ; mais on a eu à se plaindre de son excessive longueur. Quelques suppressions de récitatifs faites à la seconde représentation, ne suffisent point pour réduire la durée de cet opéra à ses justes bornes. L'ouïe est peut-être de tous nos sens celui dont les plaisirs ont le plus besoin d'être ménagés. Cette considération décidera sans doute Paisiello lui-même à consentir à de nouveaux retranchemens, et dès-lors cet ouvrage, exécuté comme il vient de l'être, sera toujours entendu avec le plus vif intérêt.                            G. P.

(1) Beaucoup de personnes ignorent sans doute que Pétrarque est l'auteur du Stabat Mater. Ce fait est constaté dans le Petrarcus redivivus et dans la Vie de Pétrarque , en 3 vol. in-40.

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