Les Deux jaloux

Les Deux jaloux, opéra-comique en un acte, de Jean-Baptiste-Charles Vial, musique de Sophie Gail, 7 mars 1813.

Théâtre de l'Opéra-Comique.

Titre :

Deux jaloux (les)

Genre

opéra-comique

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

oui

Date de création :

7 mars 1813

Théâtre :

Théâtre de l’Opéra Comique

Auteur(s) des paroles :

Jean-Baptiste-Charles Vial

Compositeur(s) :

Sophie Gail

Almanach des Muses 1814.

Le Jaloux malgré lui, comédie en cinq actes, de Dufresny, réduite en un acte. Musique très-agréable, ne ressemblant nullement à celle qu'on s'efforce de mettre à la mode, et qui, si elle opérait une révolution, satisferait plus d'un amateur.

Sur la page de titre de la partition, Paris, chez Mr Gaveaux :

Les deux Jaloux, Opéra-Comique en un Acte et en Prose Paroles de M*** Musique de Mme Sophie G... Représenté à Paris pour la première fois sur le Théâtre Impérial de l'Opéra Comique par les Comédiens Ordinaires de Sa Majesté Impériale et Royale le 27 mars 1813.

L'identité des deux auteurs ne fait pas de doute : Vial et Sophie Gail.

L'édition de la pièce chez Barba présente la pièce comme une « comédie en un acte et en prose, mêlée d'ariettes, imitée de Dufresny ».

Liste des personnages et lieu de la scène :

PERSONNAGES.

ACTEURS.

LE PRÉSIDENT.

M. Gavaudan.

LA PRÉSIDENTE, sa Femme.

Mad. Belmont.

LUCIE, nièce du Président.

Mad. Moreau.

DAMIS, amoureux de Lucie, jeune Officier.

M. Ponchard.

THIBAUT, Jardinier du Président.

M. Lesage.

FANCHETTE, Paysanne, servant de femme-de-chambre à la Présidente.

Mad Gavaudan.

FRONTIN, valet-de-chambre du Président.

M. Batiste.

La scène se passe dans le château du Président,
à un quart de lieue de Rouen.

Le décor est décrit avant le texte de la pièce :

Le Théâtre représente une partie du parc ; sur le côté, un pavillon, qui est le cabinet d'été du Président, et dont la porte, en s'ouvrant, laisse voir l'intérieur. Une fenêtre praticable avec une jalousie.

La pièce s'achève par un chœur où les différents personnages disent tour à tour qu'il ne faut pas être jaloux (p. 54).

L’Esprit des journaux français et étrangers, tome V, mai 1813, p. 274-279 ;

[Après l’échec du Prince de Catane, les succès se suivent à l’Opéra-Comique. Cette fois, il s’agit de l’imitation d’une pièce bien oubliée en cinq actes, qui se trouve réduite en un seul. Après avoir présenté la situation initiale, le critique analyse l’action de cet acte rempli d’incidents nombreux, autour de la jalousie de deux hommes, un maître et un valet, et du mariage de la pupille du maître, qui préférerait épouser le jeune galant que le vieux prétendant choisi par son oncle. A coups de ruses et de déguisements, tout finit par s’arranger : le maître n’est plus jaloux, la pupille épouse son galant, et le second jaloux est chassé du château : il est le seul que le dénouement ne rend pas heureux. Ainsi réduit, l’ouvrage nouveau est plus rapide (heureusement !) et plus gai. Il a été bien distribué et bien joué. Quant à la musique, elle est due à une dame (ce qui permet de tourner en dérision Rousseau, « le sévère Jean-Jacques », qui pensait « qu'il n'était pas donné aux femmes de réussir dans les arts d'imagination » : cette anonyme que tout le monde a reconnue a écrit « une des musiques les plus piquantes, les plus gracieuses que l'on ait entendues depuis long-temps à l'Opéra-Comique », et de plus originale (« les idées sont toutes à elle »). Gage de qualité, « son style est formé à l'école des Mozart et des Cimarosa ». L’auteur des paroles a également gardé l’anonymat.]

THÉATRE DE L'OPÉRA – COMIQUE.

Les Deux Jaloux, opéra en un acte.

Il semble qu'une divinité secourable se fasse un devoir de consoler les sociétaires de Feydeau d'avoir joué le Prince de Catane, et nous de l'avoir vu. Depuis la triste apparition de ce malheureux prince, voici trois nouveautés qui ont su se faire applaudir. sans l'assistance du tailleur, du décorateur et du fournisseur de lampions. On ne peut trop louer les auteurs de ne s'être pas livrés au repos après le Mari de Circonstance. La brillante destinée de ce charmant ouvrage n'a été pour eux que l'aliment d'un nouveau zèle et le présage de nouveaux succès. Les Deux Jaloux sont déjà le prix de cette louable émulation.

Avec plus de modestie encore que de prudence, l'auteur de ce petit opéra n'a omis aucun moyen de prévenir ses juges que l'ouvrage qu'il voulait leur soumettre n'était que l'imitation d'un autre. Cette loyauté est d'autant plus remarquable, que la pièce dont il s'agit est déjà oubliée depuis plus d'un siècle. Le Jaloux Honteux (c'est son titre) ne se trouve même pas dans toutes les éditions de Dufresny. La chute de cette comédie fut complette dans l'origine : Collé l'a retouchée long-temps après ; mais on ne voit pas qu'elle soit restée au théâtre. Elle n'a pas moins de cinq actes : en essayant de les analyser, on reconnaîtra que c'est beaucoup pour un fond aussi léger.

Un président au parlement de Rennes a la faiblesse d'être jaloux de sa femme qui l'aime sincèrement ; mais il met sa vanité à ne point le paraître. Il a recueilli dans sa maison une jeune personne nommée Lucie, qui est à-la-fois sa nièce et sa pupille. Deux prétendus, Argan et Damis, recherchent la main de cette riche héritière. Le premier est vieux, le second est jeune : le président a déjà décidé in petto qu'un homme grave comme Argan convenait beaucoup mieux à Lucie. D'ailleurs, Damis a commis envers lui une offense qu'il ne peut lui pardonner, quoiqu'elle fût bien involontaire. Dans un bal masqué, où la présidente et Lucie portaient le même déguisement, il a pris la tante pour la nièce, et lui a fait une déclaration passionnée, dont le mari jaloux n'a pas perdu un seul mot. Mais Damis est bien fort ; il a pour lui la jeune personne et Lisette sa suivante.

La scène se passe dans un château à un quart de lieue de Rennes. Les deux rivaux viennent d'y disputer l'objet de leurs vœux ; mais il se trouve dans cette maison de campagne deux personnages plus importans qu'on ne pourrait le croire : c'est Thibaut, valet du président, et une petite jardinière nommée Hortense, qui, tous deux, sont payés pour venir rapporter à leur maître tout ce qu'ils peuvent voir et entendre dans le château et les environs. Thibaut a le même défaut que son maître ; mais loin de s'en cacher, comme lui, il parle de sa jalousie à tout venant : il prétend que c'est une vertu naturelle, comme de boire et de manger. Aussi, ce rustaut, moitié niais, moitié rusé, n'a-t-il pas plutôt apperçu Damis, qu'il tremble pour sa petite Hortense ; et il la croit tout-à-fait perdue, quand il croit s'appercevoir qu'elle est sensible aux prévenances de Frontin, valet d'Argan. II redouble de vigilance pour découvrir tout ce qui se passe autour de lui. Le président, toujours en affectant de badiner, le questionne sans cesse pour se tenir au courant. L'opposition apparente et l'accord parfait du jaloux honteux et du franc jaloux, donnent lieu à des scènes assez plaisantes. Les rapports continuels de la petite jardinière embrouillent de plus en plus les choses, au lieu de les éclaircir. Elle a trouvé un billet de Damis dans la cassette de Lucie : le valet d'Argan lui conseille de le donner au président, en lui faisant croire qu'il était adressé à sa femme. En attendant l'occasion de remettre le billet, la curiosité la pousse à savoir ce qu'il contient. Le président et Thibaut surviennent derrière elle: chacun d'eux est jaloux pour son propre compte. Thibaut essaie d'enlever le papier des mains d'Hortense ; dans son dépit, elle le déchire. Le valet se hâte d'en ramasser les morceaux ; le maître, tout en se moquant de lui, s'empare soigneusement des nouvelles preuves qu'il croit avoir de la perfidie de sa fidelle moitié. Thibaut, du moins, sait bientôt à quoi s'en tenir sur le compte de sa petite Hortense. Le président, forcé de partir pour Rennes, et voulant néanmoins cacher son absence aux habitans du château, ordonne à son valet de prendre sa robe de chambre et son bonnet, puis de s'enfermer dans son cabinet, mais de manière à y être vu. Hortense, qui arrive en ce moment, croit parler à son maître; elle lui demande une grâce, et cette grâce est de ne pas être contrainte à épouser Thibaut, parce qu'il est vieux et jaloux. Lucie ferait volontiers la même prière à son oncle ; mais elle ne se croit pas assez instruite de la sincérité des sentimens de Damis. Le jaloux président a tant répété que c'était sa femme qu'il poursuivait, que la jeune personne imagine de lui faire subir une épreuve. Elle prend les habits de la présidente, et fait dire à Damis qu'elle désire l'entretenir en particulier. Le jeune homme est si franc dans l'explication, il touche tellement Lucie, qu'elle soulève son voile pour se laisser reconnaître. Dans son ravissement, Damis tombe à ses pieds. Le président survient ; il veut égorger l'audacieux séducteur : Lucie se découvre ; il reconnaît son erreur et tous ses torts. Le dénouement satisfait tout le monde, excepté Thibaut, à qui le président ôte la petite jardinière pour la donner à Frontin, afin, dit-il, qu'il n'y ait plus de mari jaloux au château. Il fallait, sans doute, de l'intelligence et une connaissance peu commune de la scène, pour réduire ces cinq actes en un seul, sans y jetter de confusion ni d'obscurité. L'auteur a supprimé non-seulement beaucoup de verbiage, mais même deux rôles entiers de son original : ceux de M. Argan et de Lisette. L'ensemble de l'ouvrage, grâce à ces coupures, est devenu plus rapide et plus gai. Il est joué de la manière la plus agréable : Mme. Gavaudan a obtenu un véritable triomphe dans le charmant rôle de la petite jardinière ; la coiffure cauchoise lui sied à ravir : Lesage rend très-naïvement la jalousie burlesque de Thibaut, et Gavaudan met de l'art dans les nuances commandées par son caractère. Batiste a été plus enjoué et plus ferme qu'il ne l'est ordinairement dans le rôle de Frontin. Ceux de la présidente et de Lucie conviennent parfaitement à mesdames Belmont et Moreau.

Le sévère Jean-Jacques a osé avancer qu'il n'était pas donné aux femmes de réussir dans les arts d'imagination : il prétend que leurs ouvrages sont froids et jolis comme elles. Il regardait comme impossible, par conséquent, qu'une femme pût composer de la bonne musique, et l'expérience, il est vrai, vient à l'appui de l'opinion du philosophe de Genève ; mais il aurait reçu aujourd'hui un démenti complet au Théâtre-Feydeau. C'est à une dame (qui n'a pas voulu être nommée, mais que tout le monde nommait) que nous sommes redevables d'une des musiques les plus piquantes, les plus gracieuses que l'on ait entendues depuis long-temps à l'Opéra-Comique. Les idées sont toutes à elle, chose devenue extrêmement rare ; et son style est formé à l'école des Mozart et des Cimarosa. Un trio charmant et des couplets délicieux, chantés avec un goût exquis par Mme. Gavaudan, ont excité des transports d'enthousiasme.

L'auteur des paroles a désiré pareillement garder l'anonyme.                   S.

Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : Répertoire 1762-1972 (2005), p. 216

Les deux Jaloux

Comédie mêlée d'ariettes imitée de Dufresny (L), opéra-comique en 1 acte. Livret de Jean-Baptiste-Charles Vial. Musique de Sophie Gail. 27 mars 1813 (Feydeau).

Titre porté sur le livret ms. : Les Deux Jaloux ou la Déclaration. – Livret d'après Le Jaloux honteux de l'être, comédie de Charles Rivière du Fresny.

A été joué jusqu'en 1839.

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