La Fille de l'hospice, ou la Nouvelle Antigone, mélodrame en trois actes, à grand spectacle, tiré du roman de M. Ducray-Duminil, de Cammaille Saint-Aubin, musique de Quaisin et Darondeau, ballet de Richard, créé 15 prairial an 13 [4 juin 1805].
Théâtre de l'Ambigu-Comique.
Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Barba, an 13 [1805] :
La Fille de l'hospice, ou la Nouvelle Antigone, mélodrame en trois actes, à grand spectacle, Tiré du Roman de M. Ducray Duminil, Par M. Cammaille Saint-Aubin, Musique de M. Quaisain et Darondeau. Ballets de M. Richard, pensionnaire de l'Académie Impériale de Musique. Représenté, pour la première fois, sur le théâtre de l'Ambigu-Comique, le 15 prairial an 13, (4 juin 1805.)
Comme OEdipe tout l'abandonne,
Son aspect fait frémir d'horreur,
Plus malheureux près de son cœur
Il ne sent pas son Antigone.
Abel, Acte II, Scène XII.
Courrier des spectacles, n° 3033 du 17 prairial an 13 [6 juin 1805], p. 2-3 :
[L'échec d'un mélodrame au Théâtre du Vaudeville ne signifie pas le déclin du genre, puisque sur les Boulevards les mélodrames réussissent, comme à l'Ambigu-Comique, où une nouvelle adaptation d'un roman de Ducray-Duminil a réussi grâce à une plus grande ambition. Tout ce qui fait réussir un mélodrame figure dans la pièce : le critique fait la liste des personnages indispensables, en finissant sur celui du fou, qualifié de « personnage d’élite, celui qui garantit le succès d’une pièce ». Le théâtre possède un acteur qui s'acquitte avec talent de ce genre de rôle. Le rôle de la jeune fille est dévolu à une actrice jugée un peu trop âgée, mais elle montre « une grande décence et beaucoup de sensibilité ». L'ensemble des acteurs a d'ailleurs été satisfaisant, le plus attendu étant Corse, le directeur du théâtre, qui a joué le rôle de l'indispensable officier. De plus il a su donner aux décors l'importance qu'ils méritent et qu'il a parfois négligés. Le critique décrit un intéressant procédé pour créer une impression de profondeur « dont les effets sont très-pittoresques ». Même satisfaction pour les ballets, dus à M. Richard, sur une musique de M. Quaisin.
Le roman de Ducray-Duminil qui a été adapté par Cammaille, c'est Elmonde, ou la Fille de l'hospice (1804). Il avait déjà été adapté par Hyacinthe Pessey, Elmonde, ou la Fille de l'hospice, joué sur le Théâtre de la Gaîté à partir du 23 pluviôse an 13 [12 février 1805].]
Théâtre de l’Ambigu-Comique.
Tandis que l’on siffloit, au théâtre du Vaudeville, le mélodrame en 17 scènes, deux mélodrames nouveaux triomphoient avec éclat aux théâtres des boulevards.
L’Ambigu-Comique faisoit représenter la Fille de l'Hospice, ou la Nouvelle Antigone. Ce sujet n’est pas neuf. Il est emprunté d’un roman connu, et il a déjà été traité au théâtre de la Gaîté. Mais ou a cru qu’il étoit susceptible de plus grands développemens, d’une pompe plus imposante, d’un appareil plus majestueux.
M. Camaille-Saint-Aubin s’est chargé de cette régénération, et M. Corse n’a rien omis pour répondre à ses desseins. Aussi la représentation a-t-elle eu le plus grand succès. On y trouve tout ce qui, dans ce genre, peut exciter l’admiration et ravir les suffrages Un capitaine tantôt farouche et terrible, tantôt tendre et sensible ; un grand seigneur qui n’est qu’un misérable, sans honneur et sans conscience, une jeune fille persécutée, qui se dévoue pour son père ; un malheureux banni, couvert de lambeaux, et en dernier lieu un fou. C’est là surtout le personnage d’élite, celui qui garantit le succès d’une pièce.
Les rôles de fous sont joués habituellement par M. Joigny, et il s’en acquitte à merveille. Personne ne sait mieux que lui altérer sa voix, décomposer son visage, briser sa prononciation, accélérer les hocquets, rendre enfin tout ce qui constitue un bon et véritable fou.
C’est Mlle. Lévêque qui joue le rôle d’Elmonde. Cette actrice n’a pas cette première fleur de jeunesse qu’on pourroit peut-être réclamer pour son emploi ; mais elle rachète ce défaut par une grande décence et beaucoup de sensibilité. En général, non-seulement le public a été content du mélodrame, mais il l'a été de tous les acteurs.
Enfin la satisfaction est devenue universelle lorsque l'on a vu paroître M. Corse, dans le rôle du capitaine Fréming. M. Corse est l’ame de son spectacle. Sa présence et son jeu vivifient tout. Il étoit malade depuis quelque tems, et l'on attendoit son retour avec impatience. Son apparition a rendu la joie à toute sa troupe et à tous les spectateurs.
On a pu remarquer quelquefois que M. Corse sacrifioit un peu moins que ses confrères à la pompe extérieure du théâtre ; qu’il comptoit plus sur le génie de l’auteur que sur le talent du décorateur, mais pour cette fois il a voulu que le décorateur participât aussi à la gloire de l’auteur, Les décorations sont donc fort belles ; celle du second acte est formée de transparens derrière lesquels s'étend une forêt qui ne laisse voir les objets que dans une perspective éloignée, dont les effets sont très-pittoresques. Le ballet du troisième acte est aussi d’un dessin et d’une exécution très-agréables. Divers danseurs y déploient des talens intéressans. Ces ballets sont de la composition de M. Richard ; la musique est de M Quaisin.
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