Grisélidis, ou la Vertu à l'épreuve, mélodrame en 3 actes, de P. J. Noël, 7 germinal an 12 [28 mars 1804].
Théâtre de l'Ambigu-Comique.
D'après Albert Soubies, Notes théâtrales, p. 43, c'est la reprise, sous un nouveau titre, de la Bergère de Saluces.
D'après le Courrier des spectacles, la première a eu lieu le 7 germinal an 12 [28 mars 1804]. Deuxième représentation le 8 germinal [29 mars]. Troisième le 9 germinal [30 mars]. Autres représentations les 11 et 12 germinal [1er et 2 avril 1804]
Courrier des spectacles, n° 2589 du 9 germinal an 12 [30 mars 1804], p. 2 :
[L'article commence par le rappel du succès de l'apparition précédente du personnage de Griseldis (ou Griselda) sur le théâtre. Sa présence dans un mélodrame semblait prometteuse, « mais l'essai n'en a pas été heureux ». Le sort imposé à Griseldis n'a pas été accepté par les spectateurs, qui n'ont pas accepté les « nouveaux sujets de chagrin » imposés à une épouse parfaite. Le résumé de l'intrigue qui suit souligne le caractère romanesque de ce que subit Griseldis, obligée de revenir à son état antérieur de bergère tandis que le confident de son mari montre son désir de s'unir à elle. Griseldis n'est sauvée que par le dévouement d'un « jeune seigneur ». Et quand son mari lui annonce qu'il veut se remarier, elle accepte d'être répudiée. Mais, coup de théâtre final, « tout étoit feint », la rivale supposée est la fille du mari et non sa future nouvelle épouse, et son père la marie au sauveur de Griseldis. Vient le moment de juger la pièce. C'est un mélodrame manqué, malgré tout ce que promettait le sujet. Scènes trop longues, action languissante, style « lâche et diffus », rien ne va. Le caractère du « méchant », indispensable dans un mélodrame, est trop peu exploité. Seul est bien tracé le portrait du sauveur de Griseldis, d'autant que l'acteur qui joue ce rôle, blessé dans une représentation, a augmenté l'attention que le public lui porte. Les autres acteurs ont droit à un jugement positif. Par contre, le critique suggère qu'il faudrait faire « des coupures et des corrections » pour sauver la pièce. « L'auteur a gardé l'anonyme »...]
Théâtre de l’Ambigu-Comique.
Premiers représentation de Griseldis, ou la Vertu à l’Epreuve.
Après le succès qu’obtint l’année derniere le sujet de Griseldis, mis en opéra buffa ; après l’intérêt même qu’avoit inspiré le rôle de la Griselda, si bien rendu par mad Georgi-Belloc, il étoit permis d’espérer qu’un mélodrame, brodé sur le même fonds, et soutenu par le prestige de ce genre de spectacle, ne pourroit que réussir. Mais l’essai n’en a pas été heureux. Les épreuves auxquelles l’époux de Griseldis a condamné sa femme, les nouvelles auxquelles il veut la soumettre n’ont point eu l’approbation des spectateurs. Ils n’ont pu lui pardonner la fantaisie, peu motivée, qui le porte à inventer de nouveaux sujets de chagrin à la plus tendre, à la plus résignée des épouses. Depuis cinq ans Gauthier, comte de Salaces, tient Griseldis, éloignée de la cour, et dans un château où elle ne voit que son fils et quelques femmes attachées à son service. Non content de cet abandon, il veut éprouver si la patience de Griseldis résistera à l'ordre de reprendre ses habits de bergere, et de retourner à son hameau. L’infortunée reçoit cet ordre sans se plaindre, quitte son costume de princesse, et rejoint la cabane qu’elle a quittée il y a seize ans, pour suivre le prince. Là elle est sur le point d’être enlevée par Alberti, confident de Gauthier, qui n’a conseillé à ce seigneur de divorcer avec Griseldis, que pour réussir plus facilement dans les projets qu’il a formés sur elle. Un jeune seigneur (St.-Aibi) la délivre et tue Alberti, dont il va annoncer la mort à Gauthier. Celui ci arrive au hameau, et annonce à Griseldis qu’il va se remarier, et il l’invite à venir à la cour, pour faire tous les préparatifs nécessaires à la réception de sa nouvelle épouse. Pour cette fois l’épreuve est trop forte, le parterre s’y oppose de toutes ses forces ; mais Griseldis, qui sembloit avoir pris pour devise vox mariti, vox Dei, s’y sou met encore, et part pour Saluce. Elle y trouve celle qui doit lui succéder dans le rang de comtesse, et qui, s’ignorant elle même, semble résignée à tout ce qu’exigera d’elle le comte, son bienfaiteur. Mais Gauthier est content des épreuves. Tout s’explique ; son divorce avec Griseldis, l’enlevement de son père et de son fils, son mariage avec une rivale, tout étoit feint ; et cette rivale il la lui présente comme sa fille, et à St.-Albi comme l’épouse qu’il lui a destinée.
Il y avoit dans ce sujet de quoi faire un mélodrame intéressant, mais l’auteur n’a pas su en tirer parti. Les scenes sont longues et décousues, l’action languit, le style en est lâche et diffus. Le caractère méchant d'Alberti et ses projets ne sont point assez développés. Ils donnent à peine lieu à un très-court épisode du deuxieme acte. Le rôle de Saint-Albi est le mieux tracé, il a encore le mérite d’être bien joué, La blessure que le cit. Vignaux reçut avant hier dans le combat avec Alberti ne contribua pas peu à lui donner un nouveau degré d’intérêt.
Mlle Levèque est très-bien dans le personnage de Griseldis.
Les autres rôles sont rendus avec ensemble par MM. Tautin, Dumont, Dufresne, et par Mlle Planté.
Avec des coupures et des corrections, cet ouvrage pourra se relever, et même être vu avec plaisir.
L’auteur a gardé l’anonyme.
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