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L'Opéra de province

 L'Opéra de province, parodie d'Armide, de Gluck, en deux actes, de Barré, Després, Piis et Richard, 17 juillet 1811.

Théâtre du Vaudeville.

Il s'agit de la reprise d'une vieille parodie à l'occasion d'une des nombreuses reprises de l'opéra de Gluck, représenté dix fois du 12 juin au 6 décembre 1811.

Almanach des Muses 1812.

Journal de Paris, n° 199, du jeudi 18 Juillet 1811, p. 1421 :

[Pour ce qui est une reprise (ce n'est pas dit de façon explicité), le critique se contente de rappeler la liste des personnages et de résumer rapidement l'intrigue avant de souligner la déception provoquée par le décalage du temps (ce qui était drôle naguère a beaucoup perdu de son sel) et par la médiocrité des interprètes, à une exception près. Ce qui vaut mieux, c'est la beauté des interprètes féminines, dont l'une pourrait devoir beaucoup à la transparence de son costume.]

L'Opera de Province, parodie d'Armide.

Voici les noms des principaux personnages qui figurent dans cette parodie : Adélaïde, directrice d'une troupe d'opéra, nouvellement établie en Champagne. Rigaud, jeune légiste, qui a été chassé de son école (comme Renaud fut exilé du camp de Godefroy), et qui vient étourdiment se réfugier dans les coulisses d'un théâtre contre lequel il a cabalé ; Hiradote, vieil acteur qui veut jouer la comédie malgré tout le monde  ; M. Jourdain, oncle de Rigaud, et M. Mouton, maître en droit. Ces deux derniers, dont les rôles correspondent à ceux d'Ubalde et du chevalier danois, cherchent de tous côtés le jeune fugitif, et le trouvent engagé dans la troupe d'Adélaïde ; l'insensé paroit à leurs yeux sous des habits de théâtre, prêt à répéter le rôle de Renaud avec une nouvelle -Armide. Au moyen d'un miroir de poche, on lui fait voir le ridicule de son accoutrement ; il en rougit, se repent de son erreur, et va fuit avec son oncle, quand Adélaïde reparoissant tout à coup, s'efforce de le retenir. Il s'échappe, elle s'évanouit, et finit par vouloir brûler le théâtre.

Cette pièce écrite en vers agréables, est semée de traits fins et spirituels, qui dans la nouveauté d'Armide, et à l'époque des factions musicales, durent avoir un succès prodigieux. Aujourd'hui ces plaisanteries de circonstance ont nécessairement perdu de leur sel ; aussi ont-elles été moins vivement applaudies. Il est vrai que la pièce est remise de la manière la plus misérable, et que presque tous les rôles, celui de M. Mouton excepté, ont été joués sans intelligence. M. Lenoble, qui remplissoit celui d'Hiradote, a si complétement radoté, pour justifier le nom de son personnage, que le public a été sur le point de siffler ce naturel poussé à l'excès. M.lle Arsène est très belle dans le rôle d'Adélaïde, et M.lle Betzy ne le paroît pas moins sous sa robe de gaze transparente.

F. P.          

Journal de Paris, de politique et de littérature, n° 4744, du Lundi 22 Juillet 1811, an VII de l'Empire, p. 4 :

[Un article amusant, sur la folie des querelles musicales du XVIIIe siècle, entre Italiens et Allemands, entre harmonistes et mélodistes. Un oubli toutefois : la date de création de L'Opéra de province.]

Théâtre du Vaudeville.

L'Opéra de Province, parodie d'Armide en deux actes, en vers.

La musique, au sein de ses révolutions, a vu des légions de braves se défier l'écritoire à la main, se combattre avec des phrases, s'exterminer avec les irrésistibles argumens de la fugue ou du contrepoint, et finir ces débats, plus risibles que meurtriers, sous le poids du ridicule qui assommait les deux partis. On n'imagine que difficilement le délire qu'ont produit sept notes innocentes, dont le malheur fut de passer des mains des italiens dans celles des allemands ; on couvrirait trois fois la surface du globe de toutes les paperasses barbouillées à ce sujet ; l'abus que l'on a fait, celui qu'on se permet encore tous les jours des vingt-quatre lettres de l'alphabet n'est rien comparativement à l'absurde combinaison que l'on a faite des notes de la musique : on s'amuse bien encore à ces bagatelles aujourd'hui, mais cela ne tire pas à conséquence, cela ne fait battre personne, au contraire, tout le monde se réunît dans les salles de spectacles pour admirer, applaudir, couronner unanimement la musique et le musicien de la pièce nouvelle. Il fallait être possédé du démon de la cadence pour trouver dans les bizarres monosyllabes ut re mi fa sol la si le germe d'une guerre aussi mal soutenue que follement déclarée.

Lorsqu'Armide parut, le feu était aux quatre coins de l'empire musical, des armées de virtuoses marchaient sous des étendards de partitions déployées ; les harmonistes, chargés d'instrumens à vent, faisaient un vacarme épouvantable aux oreilles des mélodistes, qui répondaient par les sons de leurs cordes timides ; par-tout ou ces héros se rencontraient ils se ruaient les uns sur les autres, et faisaient un carnage affreux de la raison, du sens commun et de l'esprit. C'était le moment de les saisir pour en triompher ; un auteur ingénieux sut en profiter, il forma le projet de les immoler tous sous les coups mortels de la parodie, et l'Opéra de Province parut.

On vit un marchand courant les rues de Reims pour retrouver son neveu qu'il y avait envoyé dans le dessein d'en faire un chicanneur, et ce bon M. Jourdain rejoignant le jeune Rigaud à la comédie, à l'instant où l'amour qu'il a conçu pour la belle Adélaïde va lui faire boucher un trou au théâtre en remplissant le rôle de Renaud, vaquant par la raison d'un acteur de manque. Le combat entre la nature et l'amour, le triomphe de la nature au départ de Rigaud, et enfin le désespoir de l'actrice qui veut communiquer à la salle le feu dont son tendre cœur est embrâsé.

Un vieil acteur nommé Hiradote, et un M. Mouton, maître en droit, jetés dans cette intrigue la rendirent d'autant plus piquante, qu'alors on reconnut en eux des personnages vivant dans le siècle. Les acteurs parodistes imitèrent les chanteurs de l'Opéra de la manière la plus plaisante, joignons à cela le mérite de la pièce écrite en fort jolis vers, dont le sens a dû souvent échapper à la sagacité des auditeurs étrangers à ce long avant-scène, et nous aurons une juste idée du plaisir d'une partie des spectateurs et de la froideur de l'autre.

La mauvaise distribution des rôles de la pièce a aussi contribué à la sécheresse de l'accueil qu'on lui a fait ; mais son mérite n'en demeure pas moins constant, et je ne batterai pas à terre des acteurs déjà assez malheureux d'être obligés de dire des vers, eux qui ont tant de dispositions à les chanter.

Magasin encyclopédique, ou Journal des sciences, des lettres et des arts, année 1811, tome IV, p. 158-159 :

[Il s'agit bien d'une nouveauté de près de quarante ans ! Une vieille parodie, que l'on ressort à l'occasion d'une des nombreuses reprises de l'opéra de Gluck, représenté dix fois du 12 juin au 6 décembre 1811.]

L'Opéra de Province, parodie d'Armide, jouée le 17 juillet.

Cette parodie a été jouée pour la première fois en 1777. Elle obtint alors beaucoup de succès, et elle le dut à l'esprit de la critique et à la finesse des détails.

M. Jourdain, marchand de Paris, a envoyé son neveu Rigaut à Rheims pour y étudier en droit ; notre écolier prenant trop tôt ses licences, a été chassé par son professeur. Mais l'amour l'accueille favorablement au théâtre de Rheims, où l'on répète l'Opéra d'Armide. Il a inspiré une grande passion à la principale actrice, nommée Adélaide ; séduit par elle, il s'enrôle dans la troupe, et se charge de remplir le personnage de Renaud. Jourdain se met à sa recherche et le décide à le suivre. L'enchanteresse Adélaïde le retient encore quelques instans, mais la raison prend le dessus, et il part ; alors, Adélaïde se livre à sa fureur, et dit :

Il agit en Renaud , agissons en Armide.

Elle ordonne de mettre le feu au théâtre, mais le directeur arrive à temps pour empêcher l'incendie.

Cette pièce a été accueillie un peu froidement.

D’après la base César, la pièce n’aurait eu que trois représentations en 1777, du 17 au 27 décembre 1777 : 2 au Théâtre de l’Hôtel de Bourgogne, 1 au Château de Versailles.

D'après Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, p. 349, les auteurs de la version originale de 1777 étaient Pierre-Yvon Barré, Pierre-Antoine-Augustin de Piis, Jean-Baptiste-Denis Desprès et Louis-Pierre Pantaléon Resnier. La musique en était parodiée de divers compositeurs, Dezède, Gaviniès, Lagarde, Monsigny, Philidor.

Dans la liste des auteurs de la version de 1811, Resnier est désigné par son pseudonyme, Richard.

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