Le Père d'occasion, comédie en un acte et en prose ; par les cit. Pain et P.-A. Vieillard. 5 pluviôse an 11 [25 janvier 1803].
Théâtre Français, rue de Louvois
Pièce à ne pas confondre avec le Père d'occasion ou le Veuf de cinquante ans, comédie en trois actes, en vers, de Dumolard, lue à l'Odéon le 4 août 1814, refusée à plusieurs reprises par plusieurs théâtres et jamais représentée.
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Titre :
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Père d’occasion (le)
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Genre
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comédie (puis comédie mêlée de vaudevilles)
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Nombre d'actes :
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1
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Vers ou prose ,
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en prose (puis avec des couplets en vers)
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Musique :
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non (puis vaudevilles)
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Date de création :
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5 pluviôse an 11 [25 janvier 1803], puis 18 juin 1810 pour le vaudeville
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Théâtre :
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Théâtre Français rue de Louvois, puis Théâtre du Vaudeville
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Auteur(s) des paroles :
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Pain et P.-A.Vieillard
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Almanach des Muses 1804
Petit ouvrage dans lequel on a trouvé de l'esprit, de la gaieté, et que l'on a vu avec plaisir.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Barba, an XI – 1803 :
Le Père d'occasion, comédie en un acte, en prose, Représentée, pour la première fois, sur le théâtre Louvois, le 5 pluviôse an XI. Par MM. Joseph Pain et P. A. Vieillard.
La pièce reparaît en 1810, toujours chez Barba, agrémentée de vaudevilles :
Le Père d'occasion, comédie en un acte, en prose, mise en vaudeville Par MM. Joseph Pain et P. A. Vieillard. Représentée, pour la première fois, sur le théâtre du Vaudeville, le 18 juin 1810.
Courrier des spectacles, n° 2152 du 6 pluviôse an 11 [26 janvier 1803], p. 2 :
[Dans un compte rendu fâché avec l’orthographe des noms propres (celui d’un des auteurs, et celui de certains personnages), c’est un succès que constate le critique, si on excepte « une tache » facile à effacer, la façon dont le père du jeune homme lui accorde son pardon. L’intrigue porte sur la question de la paternité : une jeune veuve fort riche ne veut épouser son amant, lui-même couvert de dettes, que s’il obtient le consentement de son père. Devant le refus du père, le valet du jeune homme tente de recourir à la ruse, qui consiste à faire passer un des créanciers pour le père de l’amant (comme le mariage enrichirait le jeune homme, le créancier y trouve son intérêt). La ruse ne réussit pas, mais le père accepte de payer les dettes de son fils, et laisse à la jeune veuve la responsabilité d’accepter son fils pour époux. Et bien sûr elle accepte. C’est ce pardon indirect qui a déplu au public. Une légère modification de la fin de la pièce règlerait le problème (qui est en effet réglé en 1810, dans la version nouvelle avec vaudevilles).]
Théâtre I.ouvois.
Première représentation du Père d'occasion.
Succès mérité, véritable comédie. Qui le croiroit ? dans un tems où le public appelle si légèrement auteurs et acteurs, cet honneur a été sur le point d’être refusé aux auteurs d’un fort joli ouvrage bien conçu, bien intrigué, bien conduit, et de plus très-comique par la seule raison qu’il présente au dénouement une tache qu’il est aisé de faire disparoitre. Que M. J. Pein et Vieillard revoyent leur piece depuis la derniere entrée de M. Dubreuille, ils corrigeront quelques mots adressés par celui-ci à son fils ; ils feront accorder le pardon directement à ce dernier, et nous garantissons à leur comédie un succès durable.
Armand est aimé de Mad. de Rozelle, jeune veuve fort ricbe qui ne veut l’épouser que quand il aura reçu le consentement de son père qui est à Bordeaux ; sept créanciers tourmentent le jeune amant. Chacun a son jour dans la semaine pour recevoir audience. Le vendredi est celui à M. Richardet ; il ne manque pas de se présenter. Sur le point d’être éconduit par le valet, il appercoit le maître qui espère pouvoir le calmer par deux lettres qu’il reçoit ; la première de Mad. de Rozele, la deuxieme de son propre pere ; mais la première exige le consentement du second, et celui-ci le refuse. L’usurier Richard n’en est que plus pressant. Germain, c’est le nom du valet d’Armand, imagine, attendu que la lettre de M. Dubreuille porte qu'il est retenu chez lui par la goute, de faire passer Richard pour le pere d’Armand qui de son consentement recevra la main de Mad. de Rozelle et payera ses créanciers. Cette derniere considération gagne Richard, Armand cède à la première ; mais l’esprit intéressé de l’homme à l’argent et la répugnance à tromper qu’éprouve l’amant sincère, inspirent des soupçons à Mad. de Rozeile et Laurette sa suivante.
Les actions de celle-ci et celles de Germain ont été épiées depuis deux jours par un inconnu. Ce même homme qui n’est autre que Dubreuil pere d’Armand entre au moment où Mad. Derozelle et sa suivante s’énoncent peu favorablement sur son compte.
La ruse est découverte, et pour la déjouer, il se fait passer, auprès de Richard, pour le pere de Mad. de Rozelle, arrivant des Iles ; et, à ce titre, il s’oppose au mariage de sa fille avec le jeune Armand : celui-ci, devant qui son pere ne se montre pas, accuse sa maîtresse d’employer une défaite pour rompre leur mariage. Tandis que Richard est avec elle, en soutenant toujours son rôle de pere d’Armand, on annonce les six autres créanciers qui ont reçu avis du pere de leur débiteur, d’apporter leurs titres pour être payés. On se doute bien que dès ce moment le rôle déplait à Richard. Dubreuille vient le remplir à sa place ; et après avoir satisfait les créanciers, il repousse d’abord son fils, ne veut plus, dit-il, être le pere que de Mad. de Rozelle ; si elle le veut, il consentira à son union avec Armand.
Cette maniéré d’accorder le pardon a déplu au public, et il a eu raison ; mais il est facile de lui donner satisfaction entière, et sans doute les auteurs n’y manqueront pas.
La Décade philosophique, littéraire et politique, an XI, IIme trimestre, n° 18 (30 ventose), p. 569-571 :
[Article repris dans l’Esprit des journaux français et étrangers, trente-deuxième année, ventôse an XI [mars 1803], p. 187-189.
Une critique de la comédie : la lutte entre les avares et les jeunes gens qui souhaitent échapper à leurs créanciers est un sujet déjà traité avec succès, mais où l’on peut encore glaner. Le fonds de la pièce, résumé bienveillamment, est jugé « très-léger ». Mais la pièce est comique et son dialogue est d’une « étincelante rapidité ». Elle a été jugée immorale par des censeurs sévères qui voudraient « que le théâtre soit absolument une école de mœurs et un cours de prédication ». C’est oublier que si les pièces morales ne rendent pas meilleur le spectateur, les pièces immorales ne le pervertissent pas non plus. Et on peut de toute façon trouver une morale dans cette comédie, le danger des dettes, et les ennuis qu’on peut s’attirer « en prenant le nom d’un autre ». Succès donc.]
Le Père d'occasion , en trois actes et en prose.
La cupidité des usuriers et les ruses des jeunes gens pour se soustraire à leurs créanciers, ont déjà fourni matière à de fort jolies comédies, et particulièrement à celle du C. Andrieux, intitulée les Etourdis [les Etourdis, ou le mort supposé, comédie en trois actes en vers, créée le 14 décembre 1787, et jouée devant le roi et la reine le 11 janvier 1788], consacrée par un succès réel : mais la fécondité du sujet laissait encore aux glaneurs une assez jolie part dans la récolte, et les CC. Pain et Vieilard ont mis en œuvre, avec beaucoup d'esprit, les matériaux dont ils se sont -emparés.
M. Richard est un créancier obstiné à la poursuite de son débiteur : celui-ci n'a pour s'acquitter que l'espérance d'un mariage avantageux. Il a demandé pour cet effet le consentement à son père, qui demeure à Bordeaux, parce que la jeune veuve qu'il aime et dont il est aimé, ne veut lui donner sa main et sa fortune qu'avec l'aveu de ce père. Le créancier Richard se trouve donc intéressé à ce consentement. Il est témoin de la réception de la lettre qui, au lieu d'accorder ce consentement, le refuse formellement, il voit disparaître ainsi l'hypothèque de sa créance. Le valet du jeune homme ne trouve d'expédient à ce malheur que de tromper la jeune veuve en donnant un père d'occasion à son maître : il engage Richard à se charger du rôle. Mais le véritable père, qui n'a écrit sa lettre de refus que pour inquiéter un moment son fils, est arrivé à Paris lui-même ; et fort surpris de se trouver remplacé, s'amuse à mystifier son Sosie en se faisant passer pour le père de la jeune veuve, et détruisant ainsi toutes les espérances du mariage proposé. On pense bien que tout s'explique à la confrontation, et que le véritable père accorde un généreux pardon à l'espiéglerie, dont il apprend que son fils n'a partagé qu'avec regret le stratagême.
De ce fonds très-léger, les auteurs ont tiré des scènes réellement comiques, que l'étincelante rapidité d'un dialogue spirituel rendent en général très-piquantes.
Des censeurs moralistes ont trouvé le sujet immoral. Rien n'est en vérité plus risible que cette affectation de vouloir que le théâtre soit absolument une école de mœurs et un cours de prédication : à ce compte, il faudrait supprimer les trois quarts des comédies. Ne se persuadera-t-on jamais que la comédie est la représentation d'une action amusante, puisée dans les habitudes ou dans les tableaux de la société, que tout ce qui atteint le but d'amuser par la vérité des peintures est du domaine de Thalie, et que si, comme on l'a répété souvent, la comédie morale ne corrige personne, celle qui ne l'est pas ne saurait influer non plus sur la dépravation : d'ailleurs ce reproche si souvent répété est plus souvent encore très-mal appliqué, et la petite comédie du Père d'occasion en est la preuve : elle tend à démontrer au contraire combien il est dangereux de s'endetter, et à quels inconvéniens on s'expose en prenant le nom d'un autre.
Le succès de ce petit acte est dû à la rapidité de son action et à l'esprit du dialogue. Sous ces deux rapports elle fait honneur au talent des deux auteurs. L. C.
Mercure de France, journal littéraire et politique, tome quarante-deuxième, 1810, n° CCCCLXVI du samedi 23 juin 1810, p. 491-492 :
[Une critique du vaudeville : après le résumé de l’intrigue, l’article est consacré aux rapports entre la comédie et le vaudeville. La tendance est, au Théâtre du Vaudeville, de présenter les spectacles proposés plutôt sous le nom de comédie que comme vaudeville, ce qui représente une sorte de promotion pour eux. Mais la remarque ne vaut pas pour le Père d’occasion, comédie authentique, qui a réussi comme telle, et que le critique préfère d’ailleurs sous son ancienne forme. L’introduction de couplets chantés n’enrichit pas nécessairement une pièce qui vaut par la qualité de son dialogue. Mais le vaudeville nouveau paraît appelé à durer longtemps.]
Théâtre du Vaudeville. — Le Père d'occasion, vaudeville en un acte de M. Joseph Pain.
Armand est un jeune homme que M. Dubreuil, son père, envoie de Bordeaux à Paris, pour y faire son droit ; mais, au lieu d'étudier, Armand fait des folies et des dettes. Au milieu de ces folies, il aperçoit Mme de Roselle, jeune et riche veuve ; il en devient amoureux et demande sa main, mais Mme de Roselle exige le consentement de son père ; celui-ci, instruit des déréglemens de son fils, lui écrit pour lui annoncer, qu'indigné de la conduite qu'il mène dans la capitale, il 1'abandonne à jamais. Le valet d'Armand, véritable valet de comédie, fait consentir son maître à présenter un étranger, sous le nom de Dubreuil, à Mme de Roselle. Cet étranger est Richard, créancier d'Armand, qui se prête à cette intrigue, dans l'espérance d'être payé le lendemain de la signature du contrat. Le véritable Dubreuil arrive, se fait connaître de Mme de Roselle, et celle-ci à son tour le présente comme son père à l'imprudent jeune homme, en supposant qu'il arrive à Paris tout exprès pour mettre obstacle à leur union. Quel embarras pour Armand, qui se trouve placé entre son véritable père, dans les bras duquel il n'ose se jeter, et son père d'occasion, dont il rougit ! mais l'indulgence paternelle n'a pas de bornes, surtout au théâtre ; Dubreuil pardonne et les amans sont unis.
Depuis quelque tems on ne donne plus de vaudevilles sur le théâtre du Vaudeville, ce sont des comédies que l'on a la prétention d'y faire représenter ; l'affiche ne les annonce plus que sous ce titre. Ce serait faire en effet un bel éloge d'un vaudeville, que de dire qu'il mérite le nom de comédie ; car cela signifierait que l'on y trouve un plan, des caractères ou une intrigue bien ourdie , mais l'affiche ne tient pas toujours ce qu'elle promet. Quoique cette réflexion nous soit suggérée par le Père d'occasion, ce n'est pourtant pas à lui qu'elle s'adresse. Ce petit ouvrage est bien une comédie, puisqu'il a réussi sous ce titre et sans le secours des couplets, au théâtre de la rue de Louvois. C'est sans doute parce que l'Odéon ne le tenait plus au courant du répertoire, que l'auteur a cru devoir le transporter au Vaudeville, en y ajoutant des couplets. Mais quoiqu'il ait été vivement applaudi sous sa nouvelle forme, il me semble cependant qu'il plaisait davantage sous la première. Les traits du dialogue de la comédie ne sont pas toujours propres à aiguiser la pointe des couplets ; la rapidité du débit ajoute encore à la force comique d'une répartie ; chantez-la au lieu de la dire, et vous l'affaiblissez. Le Barbier de Séville offre une preuve de ce que j'avance ; cet ouvrage n'est pas irréprochable sous le rapport du plan, mais on convient généralement que le dialogue en est vif et spirituel ; eh ! bien traduit presque littéralement en italien et mis en musique par Paësiello, il a perdu entièrement cette partie de son mérite, et celui de la musique l'a seul soutenu. Il est vrai que les amateurs y trouvaient un dédommagement convenable, mais il est permis de douter que ce dédommagement soit le même, lorsqu'il est donné non en musique délicieuse, mais en refrains et en couplets.
Malgré ces observations, le Père d'occasion fournira sans doute au Vaudeville une carrière honorable, fût-elle même moins longue qu'au théâtre Louvois. Cet ouvrage y avait eu une centaine de représentations, et l'on sait que les centenaires ne sont pas plus communs au théâtre que dans le monde.
La BNF propose deux représentations de personnages de cette pièce, une aquarelle représentant l'acteur Édouard dans le rôle de Richard, et une eau-forte montrant le costume de ce même Édouard.
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