Le Pour et le contre, comédie en un acte, en prose et vaudevilles, de Bourgueil. 16 Floréal an 6 [6 mai 1798].
Théâtre du Vaudeville
-
Titre :
|
Pour et le contre (le)
|
Genre
|
comédie en vaudevilles
|
Nombre d'actes :
|
1
|
Vers ou prose ,
|
en prose, avec des couplets en vers
|
Musique :
|
vaudevilles
|
Date de création :
|
16 floréal an VI (6 mai 1798)
|
Théâtre :
|
Théâtre du Vaudeville
|
Auteur(s) des paroles :
|
Bourgueil
|
Almanach des Muses 1799.
Pièce qui paraît avoir été faite à la suite de la dispute qui s'est élevée sur le mérite littéraire des femmes.
Peu de fonds, mais des détails piquans, de très jolis couplets.
Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Barba, an X (1802) :
Pour et contre, comédie en un acte, en prose et vaudevilles, Par Bourgueil. Représenté sur le théâtre du Vaudeville.
La Décade philosophique, littéraire et politique, an VI, IIIe trimestre, n° 24 du 30 Floréal, p. 366 :
[Le compte rendu évoque le débat contemporain sur « le mérite littéraire des femmes », la pièce brodant sur ce supposé mérite en général, mais sans tomber dans les travers qu’un tel sujet peut provoquer. Sur un fonds léger, des détails charmants et des couplets spirituels. Pièce bien jouée, mise en avant du personnage du vieil oncle.]
Théâtre du Vaudeville.
Le Pour et le Contre.
La dispute récemment élevée sur le mérite littéraire des femmes, et qui nous a valu bien des discussions en vers et en prose, a sans doute fourni l'idée de cette pièce, qui, d'ailleurs, ne prête à aucune allusion.
Le fonds en est léger, mais il y a des détails charmans ; la plupart des couplets offrent de l'esprit et de la grâce, et ils ont été vivement applaudis. Les femmes y sont louées sans fadeur ; le spectateur partage volontiers à leur égard l'aimable et douce philosophie d'un vieil oncle, (rôle supérieurement joué par le C. Rosière) qui, plein de reconnaissance pour elles, excuse leurs défauts en faveur de tous les beaux jours dont elles ont embelli sa vie.
Des femmes plus d'un censeur
Se montrerait moins austère,
S'il pouvait trouver leur cœur
Moins fier pour lui, moins sévere.
Contre elles son vain dépit
Fait parler la médisance ;
Toujours le mal qu'il en dit
Prouve le bien qu'il en pense.
L'auteur est le C. Bourgueil.
Le Censeur dramatique, tome quatrième (1798), n° 30 (30 Prairial an 6), p. 168-175 :
[En donnant la parole à ce supposé « amateur du Vaudeville », Grimod de la Reynière veut s'autoriser une ironie envers la pièce et certains des acteurs. Il y gagne une liberté de ton et une fantaisie qu'il n'aurait sans doute pas pu assumer en écrivant sous son nom propre.]
THÉÂTRE DU VAUDEVILLE.
« Le 16 Floréal on a donné la première Representation du Pour et le Contre, Comédie en un acte, mêlée de Vaudevilles, par M. Bourgueil.
« Dercourt aime Élvire à la fureur, et d’un autre côté s'avise de faire insérer dans les Journaux, des Couplets satyriques contre les Femmes, ce qui paroit peu conséquent en soi, sans pourtant l'être effectivement. Il résulte de sa conduite, qu’il craint de laisser connoître ses vers à sa maîtresse, et de se montrer au Public, Amant de cette dernière. On conçoit aisément tout cela. Il a son Amour et sa gloire d‘Auteur tout ensemble à conserver. Il a le talent de retenir Elvire à la campagne, où -il passe une partie de son tems auprès d'elle : il doit aller à Paris pour soccuper de l'impression de quelques nouveaux Couplets en réponse à un Défenseur des Dames. Malheureusement surpris par Elvire et voulant cacher ses papiers avec précipitation, il laisse tomber les Couplets qu'Elvire trouve après son départ ; elle n’y voit rien de très galant. Dolban son oncle arrive, il se trouve être justement l'adversaire de Dercourt dans la querelle des Dames : comme cette querelle fait grand bruit dans le monde, elle devient bientôt le sujet .de leur conversation, et Dolban apprend à sa nièce que son Antagoniste n’est autre que le jeune Dercourt ; les Couplets trouvés viennent à l'appui de cette découverte ; Elvire est piquée et veut se venger. On fait cacher Dolban ; Dercourt revient en cherchant ses Couplets,-Elvire lui avoue qu'elle les a trouvés, les lui rend en l'obligeant de les chanter tout haut, ce qu'il est obligé de faire. Il cherche ensuite â se justifier de son mieux, mais Elvire menace de se brouiller ; elle exige qu'il fasse sur-le-champ trois autres Couplets en l'honneur des Femmes, pour faire oublier les premiers, et met son pardon à ce prix ; elle ne lui donne même qu'un quart-d'heure pour les faire, délai qui nous paroît bien court, vu la difficulté du sujet. Néanmoins, comme rien n'est impossible à un Amant vraiment épris, il en vient à bout ; rapporte les Couplets, et est bien étonné de trouver Dolban son Adversaire, devant lequel il est obligé de les chanter. L'implacable Elvire exige encore qu’il les signe pour les faire imprimer. Dercourt vaincu, consent à tout. Mais satisfaite de ce dernier acte de contrition ; l'amour-propre d'Elvire s'appaise et fait grâce. Dolban les marie en observant à Delcourt qu'il faut mieux être son Neveu que son Adversaire.
« Telle est l'esquisse de cet Ouvrage qui a obtenu un assez beau succès, On peut imaginer qu'aujourdhui un homme ayant assez de courage pour oser dire la vérité... aux Dames, devoit faire naître quelqu'intérêt à la Scène, et, sous ce point de vue, le dessein de l'Auteur est vraiment louable d'avoir osé ébaucher un pareil Sujet. Pour peu que d'ailleurs il soit aimable et courtisé des Dames ; comme nous n'en doutons pas, le mérite est encore plus grand. Mais cependant nous devons l'avouer, on voit clairement qu'il a été obligé de sacrifier aux Préjugés de son Siècle, et il eût rendu son Ouvrage bien plus moral, et plus utile, s'il eût donné à son principal Personnage un peu plus de tenue dans ses principes, et qu'il ne l'eut pas fait céder à une simple bourrasque. Ce Sujet eût pu servir de base à une Pièce de caractère que j'aurois appelée l'Homme du bon sens par excellence, et dont j'aurois, moi, assuré le succès, quoiqu'elle eût eu plus d'une cabale à redouter. Ce qu'il n'a. pas osé faire, peut-être qu'un autre l'entreprendra, espérons-le, au moins le chemin est tracé.
« Qu'on ne croye pas au reste, que ce soit par stérilité que l'Auteur du Mur mitoyen n'a pas voulu entreprendre un tel Sujet ; tout au contraire, et il nous le dit lui-même dans sa Pièce :
Dolban.
Si l’on disoit des femmes tout le mal....
Elvire, l'interrompant.
Il y auroit trop à dire.
c"est donc par simple économie de travail, et l'excuse est recevable. Qu'on imagine, si l'on veut, un Littérateur abordant le projet de l'Encyclopérlie.
« On trouvé dans cet Ouvrage, du-Sentiment, (pour me servir de l'expression de la Comtesse Almaviva, dans un moment de présence d'esprit,) du Marivaudage, et un certain je ne sais quoi, qui montre l'adresse d'un Auteur cherchant à caresser d'une main le Chat qu'il éveille de l'autre. Semblable à l'Ange qui se battit avec Jacob, ou si l'on veut à cet Anglois qui voulant se défendre contre Jeanne d'Arc dans le Couvent, étoit cependant retenu par la vue de ses charmes nus ; on voit qu'il craint de porter des coups trop forts, et que souvent il ne peut s'empêcher de rompre la mesure. Cette partialité, ou plutôt cette faiblesse se fait voir dans la manière dont il défend le Pour et le Contre. Voici par exemple , le plus mordant des Couplets annoncés contre les Femmes, et trouvés par Elvire :
Lîcidas contre moi des femmes
Descend et l'esprit et l'honneur ;
En vérité je plains ces Dames.
D'avoir un pareil Défenseur ;
De leur cœur, de leur caractère
Peut-être, amis, je ferois cas,
Si Licidas
N’en parloit guère,
Si Licidas
N’en parloit pas.
Sans vouloir aucunement faire la critique de ce joli Couplet, il nous a semblé qu'il ne templissoit pas le but proposé ; c'est une personnalité d’Avocat qui ne prouve rien dans la cause. Nous sommes bien loin de prétendre à la gloire d'accoler nos Couplets à ceux de M. Bourgyeil, mais il nous semble que trois Couplets dans le sens du suivant, eussent été plus vrai: en situation.
Comme un autre j'aime à défendre
Des dames la gloire et l'honneur ;
Je leur accorde une ame tendre,
Franchise, loyauté, douceur ;
Je leur sais le cœur très sincère,
Mille vertus ; mais en tout cas,
Je crois qu'il faut n'en parer guère,
Plutôt même n'en parler pas.
Je suis assuré que trois couplets travaillés sur ce cannevas, par la plume aimable de M. Bourgueil, n'eusscnt pas manqué de faire le plus grand Plaisir au Public. Que ne suis-je Poëte !
Voici l’un des couplets en faveur du beau Sexe :
Des femmes, plus d'un Censeur
Se montreroit moins austère,
S'il pouvoit trouver leur cœur ;
Moins fier pour lui, moins sévère.
Contr'elles son vain dépit
Fait parler la médisance :
Toujours le mal qu'on en dit
Prouve le bien qu'il en pense.
Tout estimable que soit ce Couplet, nous sommes loin de savoir gré à l'Auteur d’avoir cherché à propager une erreur que nous sommes bien loin de partager. Il est malheureusement trop vrai de dire qu’à l'égard des Femmes, la plupart des médisans cumulent encore la qualité d'ingrats, tandis que par une contrariété inconcevable leurs plus dévoués défenseurs, assez généralement, se désesperent d’espérer toujours. Je m’en rapporte à M. Bourgueil lui-même. Nous ne croyons nullement dangereux d'ouvrir la main pour laisser sortir cette Vérité, d’autant que la réforme qui s'opère journellement dans nos mœurs nous donne lieu d'espérer un changement notable sur ce point.
« L'Auteur du Pour et du Contre, a trouvé le moyen de glisser dans cette Pièce, un Jardinier et sa Jardinière, deux Personnages dont à la rigueur on auroit fort bien pu se passer, quoiqu'ils servent à donner au Public l'exposition du sujet d'une manière vraiment adroite, en se racontant l'un à l'autre, à propos de mariage, ce qu'ils savoient déja, et ce qui se passe dans la maison de campagne où demeure Elvire. Des personnes qui se prétendent instruites des secrettes raisons de l'Auteur, nous ont assuré que son but avoit été de donner au Public la satisfaction de voir dans sa Pièce, Mlle. Blosseville dont on ne peut plus se passer à ce Théâtre, et dont les progrès deviennent. tous les jours un sujet d'étonnement pour les Curieux. J'avoue alors que ma reconnaissance pour l'Auteur est proportionnée au bienfait.
Mme Sara remplit d'une manière distinguée le rôle d'Elvire. On lui adresse à la fin de la Pièce un Couplet finissant par ces mots :
C'est du bien que l'on en dit,
C'est du bien que l'on en pense.
dont on lui a fait l'application, ce qui nous a causé d'autant plus de plaisir, que nous avions cru qu'une partie de ceux qui chantaient ce refrein, n'avoient pas toujours dit et pensé de même.
« Mlle. Blosseville remplit de son mieux, mais non pas au mieux le rôle de la Jardinière Annette. C'est toujours Mlle. Blosseville sauf les petites différences produites par les embellissemens qui s'opèrent en elle tous les jours, car on ne peut nier de grandes augmentations, qui la concentreront bientôt dans l'emploi des Musiciennes, seule espèce de rôle où, à notre avis, elle fasse complettement illusion.
« M. Henri a eu des détails vraiment heureux dans le rôle de Dercourt, il est celui de cette Pièce dans lequel nous ayons remarqué le plus de progrès. Beaucoup d'aplomb mêlé à la légèreté convenable. Maître de son rôle, il l'a vraiment joué, ce qui est rare au Vaudeville, où le Genre guindé est fort à la mode. Nous devons cependant lui observer qu’il a un peu brusqué sa première sortie déjà un peu brusque par ellemême.
« M. Rozière a été suffisament applaudi dans le rôle de Dolban ; il y a mis la plus grande aisauce, et la plus belle simplicité. Nous l'avons rarement vu meilleur que dans ce rôle.
« M. Carpentier n’a été ni bien ni mal dans le rôle de Georges. Les fins Observateurs qui aiment à faire sentir les petites nuances, ont remarqué qu'il avoir choisi pour modèle l'espèce de Jardinier qui convenoit en ce moment, et qu'il étoit Légumier plutôt que Fleuriste».
Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 4e année, 1798, tome I, p. 549 :
La petite pièce de Pour et Contre au Vaudeville, a eu un succès que lui ont mérité les détails gracieux dont elle est remplie. L’intrigue est fort peu de chose, et même invraisemblable ; mais les couplets pour et contre les femmes ont été vivement applaudis.
D'après la base César, la pièce a été représentée 47 fois au Théâtre du Vaudeville (30 fois en 1798, à partir du 5 mai, et 17 fois en 1799).
Ajouter un commentaire