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Les Portefeuilles

Les Porte-feuilles, comédie en deux actes en prose, de Collot d'Herbois, 10 février 1791.

Théâtre de la rue Feydeau

Titre

Porte-feuilles (les)

Genre

comédie

Nombre d'actes :

2

Vers / prose ?

prose

Musique :

non

Date de création :

10 février 1791

Théâtre :

Théâtre de Monsieur / Feydeau

Auteur(s) des paroles :

Collot d’Herbois

Almanach des Muses 1792

L'une des meilleures pièces de M. Collot d'Herbois. Du mouvement, de la gaîté. Plan bien combiné.

M. de la Corée vient de perdre toute sa fortune. On lui a volé son porte-feuille qui contenoit cent mille écus. Cependant un valet nommé Julien, qui fait tous les jours son petit commerce au bout de la rue Vivienne, s'est associé avec un coquin qui, pour augmenter son bénéfice, s'amuse dans ses momens de loisir à dévaliser les passans. Ce dernier vient de voler un porte-feuille, et se réfugie justement dans la maison de M. de la Corée, où il demande asile à Julien. Ce domestique commence à former des soupçons contre lui : il le place dans un cabinet, bien résolu de lui redemander ses fonds et de rompre avec lui. Sur ces entre-faites, un M. Blondeau, homme franc et honnête, vient rendre à M. de la Corée son porte-feuille qui est singulièrement tombé entre ses mains. Il a saisi un voleur qui lui enlevoit le sien où il n'y avoit que trente mille livres : ce voleur intimidé et perdant la tête lui en rend un autre qui en contient trois cent mille ; c'est celui qu'il rapporte, et il a la générosité de ne pas vouloir prélever ses trente mille francs. Mais Blondeau est le père d'un jeune homme aimé de la fille de la maison. Cette jeune personne envoie sa suivante chercher son portrait dans le cabinet. Le filou que Julien y a fait cacher veut s'enfuir : on l'arrête : c'est le voleur des mille francs de M. Blondeau, et cet honnête homme retrouve ainsi son porte-feuille.

Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez la Veuve Duchesne et Fils, 1791 :

Les Porte-feuilles, comédie en deux actes et en prose, Représentée à Paris pour la première fois, sur le Théâtre de Monsieur, rue Feydeau, le 10 Février 1791.

Réimpression de l'ancien Moniteur, tome septième, Gazette nationale ou le Moniteur universel, n° 41 du jeudi 10 février 1791 : p. 339 :

[Avant la première représentation, une mise en garde de Collot d'Herbois : sa pièce va être victime d'une cabale montée par les financiers contre sa pièce, qui dénonce les agioteurs :]

Tout le monde sait, Monsieur, quelle fut la colère des financiers contre le Sage alors qu'il fit jouer Turcaret ; ils l'ont persécuté de toutes manières. On m'assure que ceux qui nous font payer aujourd'hui les écus si cher ont pour moi les mêmes bontés ; ils cabalent fortement, me dit-on, contre une pièce intitulée les Portefeuilles, qui doit être jouée ce soir au théâtre de Monsieur, et dont le but moral est en partie de redresser quelques consciences trop usurières, ou de les vouer à la honte, seul moyen juste et raisonnable de les punir. Cependant je plaide les intérêts de tous ceux qui souffrent des abus excessifs de l'agiotage, et le nombre en est grand. J'espère que si mon ouvrage heur parait digne d'un meilleur sort, ils sauront le préserver de celui que MM. Raffle et compagnie lui destinent. Le second acte de la pièce correspond, par de grands traits de vertu et de probité, avec l'âme de tous les honnêtes gens, et je doute que le cœur d'un usurier puisse y être tout a fait insensible.

L'auteur des Portefeuilles.

Réimpression de l'ancien Moniteur, tome septième, Gazette nationale ou le Moniteur universel, n° 48 du jeudi 17 février 1791 : p. 400 :

[Une semaine après la mise en garde contre la cabale, un compte rendu favorable à la pièce, et qui n'évoque pas cette cabale :]

THÉÂTRE DE MONSIEUR.

M. Collot (d'Herbois) a donné à ce théâtre une jolie comédie, intitulée les Deux Portefeuilles.

On a volé à un homme son portefeuille qui contenait 100,000 écus. C'est toute sa fortune et celle d'une fille qu'il chérit. Il est au désespoir. Le même jour, au même moment, au même lieu, le même voleur a pris un autre portefeuille ; mais celui à qui il appartient, M. Blondeau, homme d'un caractère assez singulier, a remarqué le voleur, l'a suivi, l'a fait entrer dans une allée, et là, par force et par menace, s'est fait rendre le portefeuille volé. Mais, rentré chez lui, il a vu que le portefeuille n'était pas le sien ; c'est celui de l'homme aux 100,000 écus. Il court chez lui, le lui rend, et la joie qu'il a de ramener le bonheur dans cette maison lui fait oublier sa propre perte. Mais le voleur, qui s'était réfugié dans cette maison même, y est pris, et le second portefeuille est rendu.

Ce généreux Blondeau, juge de paix de la section, a un fils qui, non moins généreux, a sauvé la vie de la jeune fille, il y a plus d'un an. Quoiqu'ils se soient perdus de vue, les deux jeunes gens n'ont cessé de penser l'un à l'autre. Ils se retrouvent par le moyen des portefeuilles, où l'on puise la dot qui sert à les unir.

Ce n'est pas sur une froide analyse qu'il faudrait juger cette pièce, qui fourmille de traits, de mots heureux, et qui est pleine de mouvement et de sensibilité. M. Collot (d'Herbois) a déjà donné plusieurs preuves d'un talent distingué sur différents théâtres.

Mercure de France, tome CXXXIX, n° 8 du samedi 19 février 1791, p. 148-149 :

[Les débuts du Théâtre de Monsieur dans sa nouvelle salle rue Feydeau ne sont pas simples : la salle est critiquée, mais le Mercure, généralement favorable à ce théâtre, ne partage pas la sévérité de ces critiques ; par contre, les pièces nouvelles n’ont pas été heureuses : chute d’une comédie, faible succès d’un opéra, heureusement, la « charmante petite Piece, intitulée les Porte-feuilles » permet au théâtre de se relever. Le compte rendu analyse l’intrigue, riche en rebondissements et en coïncidence (mais le critique n’y voit pas d'invraisemblance). Le jugement porté ensuite est favorable : « des détails charmans, des traits heureux, un dialogue vif & serré, une marche rapide & claire », que de qualités ! L’auteur est nommé, avec rappel de ses succès antérieurs, « preuves d’un véritable talent ».]

Le Théatre de Monsieur occupe maintenant, rue Feydeau, une Salle nouvelle, qui, comme toutes les autres, essuie beaucoup de critiques, mais qui, mieux que la plupart, en impose à ces mêmes critiques, & satisfait le Public en général par des beautés d'un ordre supérieur : elle est de MM. Le Grand & Molinos.

Nous attendions, pour en parler à nos Lecteurs, que ce Théatre nous offrît quelque Nouveauté intéressante. La chute de la premiere Comédie, & le peu de succès de l'Opéra qu'on y a donnés, ont éloigné ce moment. Mais la Troupe de Comédie vient de s'y relever par une charmante petite Piece, intitulée les Porte-feuilles. Un de ces Marchands d'argent qui obstruent l'approche du Palais-Royal, a volé à M. de la Corée un porte-feuille qui contient cent mille écus. C'est toute sa fortune. Le même homme a pris à M. Blondeau un autre Porte-feuille qui contient 39,000 francs. Celui ci ne perd pas la tête. Il devine son voleur, le suit, le rencogne dans une allée, & le force à lui rendre ce qu'il a pris, & le laisse aller. L'homme a rendu, en effet, à M. Blondeau un Porte-feuille, mais ce n'est pas le sien, c'est celui de M. de la Corée. Blondeau, caractere singulier & un peu brusque, mais généreux & noble, n'hésite pas. Il arrive chez le vieillard plus malheureux que lui, il trouve le désespoir dans la maison, & y rapporte le bonheur en rendant le Porte-feuille. Son action honnête est réccmpensée sur le champ. Le voleur était réfugié chez M. de la Corée ; il y est surpris, & est obligé de rendre le second Porte-feuille.

M. Blondeau, Juge de Paix de sa Section, a un fils qui, dans une bagarre, a sauvé la vie à la fille de M. de la Corée, il y a un an. Les deux jeunes gens n'ont pu se retrouver depuis ce temps ; mais ils ne se sont pas oubliés. On juge bien que les Porte-feuilles sont employés à les unir.

Des détails charmans, des traits heureux, un dialogue vif & serré, une marche rapide & claire forment le mérite de cet Ouvrage, & ont assuré son succès. Il est de M. Collot d'Herbois, qui déjà, sur plusieurs autres Théatres, a donné des preuves d'un véritable talent.

L'Esprit des journaux, françois et étrangers, vingtième année, tome III, mars 1791, p. 324 :

Le jeudi 10 février on a donné, avec un grand succès, la première représentation des Porte-feuilles, comédie nouvelle en deux actes ; par M. Collot d'Herbois. En voici la fable abrégée.

M. de la Corée, ci-devant noble, étoit sur le point d'établir sa fille, lorsqu'en passant au coin de la rue Vivienne, on lui a pris son porte-feuille, qui contenoit la plus grande partie de sa fortune. Il est obligé de renoncer à tous ses projets de bonheur, de quitter la ville, après avoir vendu ce qui lui reste, & de se retirer à la campagne. Il est pourtant un peu consolé de son désastre par la tendresse & la résignation de sa fille. A l'instant où il va congédier ses gens, payer ce qu'il peut devoir, un inconnu demande & s'obstine à lui parler. Ce particulier, volé comme M. de la Corée au coin de la rue Vivienne, a cherché, deviné, reconnu son voleur, l'a forcé, par la crainte des tribunaux, de lui rendre son vol. Le fripon s'est trompé, a rendu un porte-feuille qui contient 300 mille livres, & le particulier le rapporte à M. de la Corée, à qui il juge qu'il doit appartenir, d'après les réclamations publiques que celui-ci en a faites. Mais ce généreux inconnu n'a point retrouvé ce qu'il a perdu ; son porte-feuille contenoit 30 mille livres. M. de la Corée veut au moins les lui rendre. L'inconnu repousse la proposition avec autant de délicatesse que de fierté. Un incident remet tout à sa place. Julien valet de M. de la Corée, a cédé au désir de s'enrichir par l'agiotage ; il avoit de l'argent ; pour le faire valoir, il s'est associé un commissionnaire public ; & celui-ci est positivement le voleur des deux porte-feuilles. Dénoncé & poursuivi, sur son signalement, il a été caché par Julien dans un coin de la maison de M. de la Corée ; il est découvert ; il fuit ; on le rattrape, & la restitution du second porte-feuille rend la joie générale. Quel est cet inconnu ? on lui demande enfin son nom. C'est un nouveau juge de paix, M. Blondeau, ci devant des Tournelles ; c'est le pere du jeune amant de mademoiselle de la Corée. Cette découverte ajoute au bonheur de tout le monde, & le mariage des jeunes gens est décidé.

Cet ouvrage, où l'horrible agiotage qui désole la capitale est présenté sous les couleurs les plus vraies comme les plus odieuses, joint au mérite d'une gaîté très comique celui d'un intérêt très-vif, très-naturel, & tiré du fond du sujet ; l'intrigue en est d'ailleurs sagement et chaudement établie ; pas une scene qui languisse, pas un mot inutile & qui ne marche à l'action. La piece de M. Collot d'Herbois, prouve que dans la société des amis de la constitution il y a des hommes qui savent aimer la révolution, l'ordre, la vérité, les principes, la monarchie & la loi.

Mercure de France, tome CXXXIX, n° 25 du samedi 18 juin 1791, p. 117 :

[Publication de la brochure. La pièce continue à avoir du succès (en fait, elle a été jouée régulièrement jusqu’au mois de mars 1792, et une dernière représentation a eu lieu le 5 mai ; il faudra attendre 1795 pour que la pièce ait une seconde carrière, bien plus modeste).

Les Porte-feuilles, Comédie en deux Actes & en prose, représentée pour la premiere fois, sur le Théatrc de Monsieur, rue Feydeau, le 10 Févier 1791 ; par M. Collot d'Herbois. A Paris, chez la veuve Duchesne & fils, Libr. rue Saint Jacques , Nº. 47.

Cette Piece, pleine d'intérêt, de gaîté, de se1 & d'effet théatral, ne doit pas moins réussir à la lecture qu'au Théatre, où elle se soutient toujours avec beaucoup de succès.

D'après la base César, la pièce a été représentée 53 fois au Théâtre Feydeau, du 10 février 1791 au 5 mai 1792 (43 fois en 1791, 10 fois en 1792) ; elle a été reprise 8 fois au Théâtre du Marais, du 8 décembre 1795 au 18 juillet 1796.

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