Les Ruines de Babylone, ou Giafar et Zaïda

Les Ruines de Babylone, ou Giafar et Zaïda, mélodrame historique en trois actes, de Guilbert de Pixerécourt, musique de Gérardin-Lacour, ballets de Hullin, décors d'Alaux, 30 octobre 1810.

Théâtre de la Gaîté.

Titre :

Ruines de Babylone (les), ou Giafar et Zaïda

Genre

mélodrame historique

Nombre d'actes :

3

Vers ou prose ,

en prose

Musique :

oui

Date de création :

30 octobre 1810

Théâtre :

Théâtre de la Gaîté

Auteur(s) des paroles :

R. C. Guilbert Pixerécourt

Compositeur(s) :

Gérardin-Lacour

Chorégraphe(s) :

Hullin

Décorateur(s) :

Alaux

Sur la page de titre de la brochure,

Les Ruines de Babylone, ou Giafar et Zaïda, mélodrame historique en trois actes, en prose, et à grand spectacle, par R. C. Guilbert Pixerécourt. Représenté, pour la première fois, à Paris, sur le théâtre de la Gaîté, le 30 octobre 1810. Musique de M. Gérardin-Lacour. Ballets de M. Hullin. Décors de M. Alaux.

Le texte de la pièce est précédé, pages 2 et 3, d’une « Note historique » :

Le trait qui m'a fourni le sujet de cette pièce, quoique l'un des plus intéressans de l'histoire de l'orient, n'est peut-être pas assez généralement connu pour qu'il soit inutile de le rappeler ici.

Giafar-le-Barmécide était premier Visir du Calife Haroun-al-Raschid, ami et contemporain de Charlemagne, et l'un des plus illustres souverains de son siècle. Ce prince avait une sœur très-aimable, près de laquelle il passait tous les momens que lui laissait le soin des affaires publiques. Son ministre et cette sœur chérie étaient les deux personnes qu'il aimait le plus : il eût voulu les réunir auprès de lui, pour jouir à-la-fois de leur entretien ; mais les mœurs de l'Orient ne permettant pas que la sœur du Calife parût devant un étranger, Haroun résolut de les marier. Seulement, comme il se faisait un point de religion qu'aucun sujet ne mêlât son sang avec celui d'Ali, qui était sacré chez les Mahométans, il exigea de Giafar la promesse qu'il n'userait jamais des droits du mariage; Barmécide s'y engagea par serment : il n'avait pas encore vu l'épouse que son maître lui destinait. Quand il la connut, son cœur se révolta contre l'engagement qu'il avait pris ; il le trouva injuste et cruel. Malgré les ordres et la surveillance du Calife, il eut d'Abassa un fils qu'il fit élever secrètement à la Mecque. Haroun, quoique rempli d'ailleurs d'excellentes qualités, était d'un caractère extrêmement violent. Ayant eu connaissance de ce commerce secret, il s'abandonna aux plus grands excès où puissent porter la colère et le despotisme. Il condamna à mort Giafar et sa famille ; tous les Barmécides, au nombre de quarante, furent égorgés dans une seule nuit; Abassa fut chassée honteusement du palais et de Bagdad. Réduite à la condition la plus déplorable, elle mourut bientôt de douleur et de misère.

Voilà ce qu'on lit dans l'Histoire des Arabes. Je n'ai pris de ces événemens et de cette catastrophe éminemment tragique que ce qu'il # fallu pour fonder ma pièce ; tout le reste est d'invention.

Les Tablettes de Polymnie, journal consacré à tout ce qui intéresse l’art musical, (Minkoff Reprints, Genève), n° 19 du 5 mars 1811, p. 294-295 :

[Le critique rend compte dans le même article de deux nouveautés au Théâtre de la Gaîté. Les Ruines de Babylone, une pièce du prolifique Guilbert-Pixerécourt, transportent le spectateur dans l’histoire arabe des Barmécides, mais l’article ne dit rien de l’intrigue, et se limite à vanter la beauté du spectacle, intrigue, situations, ballets, musique, décorations, costumes. La pièce a du succès, et c’est justifié.]

Théâtre de la Gaîté.

Les Ruines de Babylone.

L'Enfant prodigue, ou le Panier percé.

Les Ruines de Babylone recèlent des mines d'argent que le directeur de ce Théâtre exploite sans relâche depuis trois mois. Ces mines semblent être intarissables, et le précieux, métal ne cesse d'abonder chez le caissier qui, comme on sait, est le juge le plus irrécusable du mérite d'une pièce. Déjà, depuis long-temps, M. Guilbert-Pixerécourt règne, avec un sceptre d'or, sur les états situés entre la porte St.-Martin et la porte St.-Antoine ; il a tout-à-fait consolidé sa gloire en ornant son char de triomphe de ce nouveau chef-d'œuvre. Les Ruines de Babylone sembleraient être le nec plus ultra du mélodrame, si l'on ne connaissait l'inépuisable fécondité de leur auteur. Cette pièce dont le sujet est emprunté des Barmécides de Laharpe, joint à une intrigue filée et soutenue avec art, à des situations remplies d'intérêt, une pompe de spectacle digne de la splendeur qui régnait à la cour du fameux calife Haraoun Raschild. De charmans ballets dessinés avec un goût original par M. Hullin, une musique agréable composée par M. Gérardin-Lacour, des décorations magnifiques, des costumes très-frais, voilà plus de titres qu'il n'en faut pour motiver l'affluence extraordinaire qui se porte à ce Théâtre.

Pour la critique de l'Enfant prodigue, ou le Panier percé, voir sous ce titre.

Dans l’édition de son Théâtre choisi, tome 3 (1842), p. 13-19, l’éditeur a fait figurer une riche sélection d’extraits de presse concernant la pièce, tous très élogieux (mais le choix de l’éditeur n’est pas neutre) :

Journal des spectacles. 31 octobre 1810.

Les personnages mis en scène dans ce mélodrame sont en partie les mêmes que ceux de la tragédie des Barmecides, par Laharpe ; mais les circonstances de l'action en sont différentes : on voit sur le premier plan du tableau, Haroun-al-Raschid, sa sœur Abassa et son visir Giafar.

Haroun-al-Raschid fut le cinquième calife de la race des Abassides. On l'a comparé à Charlemagne ; mais combien était grande la supériorité que le monarque français avait sur le despote oriental ! Dans toutes les grandes choses que fit Haroun , on vit toujours près de lui son visir Giafar le Barmecide, né d'une famille de tout temps célèbre en Orient par sa générosité ; ce ministre partageait la gloire de son maître, prévenait les fautes qu'il pouvait faire, et lui donnait d'excellentes leçons. Or, il serait difficile de nommer le ministre de Charlemagne; c'est particulièrement de ce prince qu'on aurait pu dire :

Et qui seul, sans ministre, à l'exemple des Dieux,
Soutiens tout par toi-même et vois tout par tes yeux.

Haroun portait à Giafar une amitié si tendre, qu'il ne pouvait s'en séparer un instant. Il aimait également sa sœur Abassa ; mais les lois musulmanes, dont il était rigide observateur, lui défendaient d'admettre cette dernière en présence d'un homme et surtout d'un sujet.

Afin de jouir en même temps de la société de deux êtres qui lui étaient si chers, il imagina de les marier ensemble. Cependant, comme il était religieusement convaincu que, sans commettre un sacrilége, le pur sang des Abassides ne pouvait être mêlé à celui d'un homme appartenant à une autre race, quelque illustre qu'elle fût, il exigea de Giafar le serment de ne jamais faire usage des droits d'époux. Le visir ne balança point à faire ce serment ; mais dès qu'il eut vu Abassa, l'amour qu'il conçut pour elle et qu'il lui inspira, lui fit sentir qu'il avait promis plus qu'il ne pourrait tenir. Bientôt les deux époux s'oublièrent ; ils eurent un fils qu'ils envoyèrent secrètement élever à la Mecque. Haroun fut informé que son visir avait trahi son serment : alors, étouffant tout sentiment d'amitié, de tendresse fraternelle et de reconnaissance, et n'écoutant plus que son courroux, il fit mettre à mort Giafar et toute sa famille : plus de quarante Barmecides périrent du dernier supplice, et l'intéressante Abassa fut impitoyablement chassée du palais et réduite à l'état le plus misérable. Cette princesse, que l'on avait citée comme un prodige de grâce et d'esprit, qui faisait de jolis vers, qui s'était assise sur le trône près de son frère, et que des centaines d'esclaves avaient servie, fut réduite à n'avoir que deux peaux de mouton, l'une pour lui tenir lieu de chemise, l'autre de robe, .et à vivre du pain de la charité. Cruel et bizarre effet des vicissitudes humaines !

C'est ce trait qui fait le sujet du mélodrame nouveau représenté hier. L'auteur l'a intitulé les Ruines de Babylone, parce que la scène se passe à Bagdad, que plusieurs voyageurs prétendent avoir été bâtie par le calife Abugiafar-Almansor, l'an de J.-C. 762, sur les ruines même de l'ancienne Babylone. Mais ces voyageurs se trompent, car l'ancienne Babylone était bâtie sur les bords de l'Euphrate, tandis que Bagdad a été élevée près des ruines de Séleucie, sur les bords du Tigre qui la sépare en deux parties.

Il faudrait un volume pour analyser en détail ce mélodrame, dont l'intrigue est singulièrement compliquée. Les moyens les plus extraordinaires y sont employés pour amener des effets et causer des surprises. Raymond lui seul vaut un génie pour les deux amants ; il ne faut qu'une baguette, et cette pièce historique, à peu de choses près, sera une pièce féerie. Elle a obtenu beaucoup de succès ; plusieurs scènes ont paru très-intéressantes : le dénoûment est extrêmement dramatique et du plus bel effet. Les décorations des trois actes sont neuves et d'une magnificence rare, surtout au théâtre des Boulevards. On a également peu vu au même théâtre des ballets aussi agréablement dessinés et aussi bien exécutés ; en un mot, ce mélodrame sera vu longtemps avec plaisir. L'auteur est M. de Pixerécourt; la musique est de M. Gérardin-Lacour ; les ballets de M. Hullin, et les décorations ont été peintes par M. Allaux.

Dusaulchoy.          

Petites Affiches. 31 octobre 1810.

Ce mélodrame est bien conçu, bien traité, bien conduit et surtout bien écrit. Il démontre dans son auteur une parfaite intelligence de la scène. Le dénoûment inattendu est très-beau et produit un grand effet. Le succès de l'ouvrage est assuré pour plus de cent cinquante représentations. L'administration a prodigué dans cette pièce tout ce que le luxe asiatique offre de plus brillant et de plus recherché, tant pour les costumes que pour les décors. Elle a dû faire de grandes dépenses ; mais ses avances lui seront remboursées avec usure, et elle y trouvera ensuite de grands bénéfices. Les ballets de M. Hullin offrent une variété de pas et de dessins qui font honneur à ce compositeur, dont aucune production ne se ressemble. La musique de M. Gérardin-Lacour a un style local et bien adapté au sujet. Enfin, cet ouvrage est parfaitement rendu par Marty, Lafargue, Tautin, Duménis, et par Mmes Rouzé-Bourgeois et Hugens.

Rojare.          

Gazette de France. 31 octobre 1810.

Depuis longtemps, malgré la vogue constante qui pousse à nos théâtres secondaires la meilleure compagnie, on n'y avait vu pareille affluence ; les bureaux étaient assiégés avant l'heure fixée pour la distribution des billets, qui se vendaient à la porte, sans marchander, le double de leur valeur. Il était juste qu’un empressement si flatteur eût sa récompense ; aussi, à quelques miracles que le titre pompeux des Ruines de Babylone eût préparé les spectateurs, on peut assurer que l'attente générale a été surpassée. Jamais, peut-être, on n'a vu au théâtre des Boulevards des décorations aussi fraîches, des costumes aussi riches, des ballets aussi gracieux. Le tailleur, le chorégraphe, le décorateur ont fait assaut d'imagination et de talent, et chacun d'eux mérite une couronne. Il ne faut pas croire, cependant, que le succès soit dû tout entier à ces parties essentielles du mélodrame, et l'auteur des paroles n'a eu garde de rester au-dessous de ses rivaux. Intrigue attachante, surprises adroitement ménagées, situations touchantes, caractères largement dessinés, chaleur de dialogue, maximes ronflantes, sentiments admirables d'amour, de générosité, de courage, M. de Pixerécourt n'a rien oublié de ce qui pouvait contribuer au succès de son nouveau chef-d'œuvre. Tout le monde connait la loi génante que le calife Haroun-al-Raschid avait imposée au vaillant Giafar, le Barmecide, son visir, et le soutien de son trône, en lui faisant épouser sa sœur Abassa. Giafar n'avait obtenu l'honneur insigne de s'allier à la famille des Abassides, qu'en jurant sur l'Alcoran de traiter la princesse comme sa sœur, et de ne jamais réclamer auprès d'elle les droits d'un époux. L'engagement était téméraire et difficile à tenir, près d'une femme jeune, belle et spirituelle ; aussi fut-il promptement violé. Le Calife en fut instruit: Giafar et plus de quarante Barmecides furent immolés à sa vengeance, et la malheureuse Abassa ne conserva la vie que pour la trainer dans l'humiliation et la misère.

Ce trait d'histoire, qui a déjà fourni à Laharpe une tragédie qui eut du succès, et qui fut donnée onze fois, vient d'inspirer encore à M. de Pixerécourt un mélodrame qui, suivant toute apparence, aura plus de deux cents représentations. Les deux auteurs n'ont pas, comme on peut bien le croire, suivi la même route. L'un s'est assez scrupuleusement conformé à la vérité de l'histoire, tandis que l'autre, usant dans toute son étendue du privilége de son art, ne s'est embarrassé. que de composer un roman plein d'intérêt. Le calife n'est pas vu par son beau côté dans cet ouvrage ; mais en revanche, l'auteur a tiré de son cerveau un comique français plein d'adresse, de présence d'esprit et de courage. Giafar ne périt pas à la fin de la pièce ; mais on le relève de ses serments, et on lui permet enfin d'être librement le mari de sa femme, ce qui n'est pas très-exact sans doute, mais ce qui produit un très-heureux dénoûment. Je n'en dirai pas davantage : il en est d'un mélodrame comme d'un roman, dont, pour le plaisir des lecteurs, il faut quelquefois se garder de dévoiler les mystères. Une sèche analyse ne pourrait jamais, d'ailleurs, donner qu'une bien faible idée de l'intérêt, du mouvement, de la pompe répandus dans cet ouvrage, et les plus belles phrases du monde ne pourraient remplacer cette danse originale d'esclaves noirs, ou ce pas brillant de deux guerriers combattant et dansant tout à la fois. J'ai déjà nommé l'auteur des paroles. M. Gérardin-Lacour, M. Hullin, M: Allaux ont aussi contribué pour la musique , les ballets et les décorations à ces fameuses Ruines de Babylone, qui feront à coup sûr la fortune du théâtre de la Gaité.

Colnet.          

Journal du Commerce. 31 octobre 1810.

Le nouveau mélodrame intitulé les Ruines de Babylone, ou Giafar et Zaïda, joué hier au soir au théâtre de la Gaîté, a obtenu un succès complet, un succès de véritable enthousiasme. Son titre est un anachronisme contre l'histoire ou la géographie, car le calife Haroun-al-Raschid, dont Giafar a été le visir fidèle et la victime, n'a pas plus séjourné près des ruines de Babylone, que cette cité fameuse n'a occupé le terrain sur lequel on a bâti Bagdad ; mais il fallait un titre imposant, et M. de Pixerécourt, auteur de cette nouvelle production digne des autres merveilles du même genre, qui l'ont fait surnommer le roi du mélodrame, n'a point balancé à changer Babylone de place pour donner un intérêt de plus à des événements qu'il a su entourer de tous les prestiges de son art, et pour lesquels l'administration l'a très-bien secondé par le luxe étonnant des décorations et des costumes, La musique est de M. Gérardin-Lacour, et les ballets de M. Hullin.

Coupart.          

Journal d'Indications. 31 octobre 1810.

Qui pourrait décrire toutes les merveilles qu'offrent les Ruines de Babylone ! Cette peinture ne pourrait être qu'imparfaite, et donner une faible idée de la vérité ; je me bornerai donc à dire que les trois décorations nouvelles ont paru de la plus grande beauté, que les ballets ont excité l'enthousiasme, et que les costumes qui sont d'une magnificence rare, ont été généralement admirés. On n'avait point encore, aux Boulevards, établi de mélodrame d'une manière aussi brillante.

Suit l'analyse :

Cet ouvrage doit dédommager amplement l'administration des dépenses considérables qu'elle a faites.

Tous les acteurs, les danseurs et les danseuses se distinguent à l'envi dans les Ruines. Les paroles sont de M. de Pixerécourt, les ballets de M. Hullin, et la musique de M. Gérardin-Lacour.

Babié.          

Journal du Soir. 31 octobre 1810.

Jamais « Iphigénie en Aulide immolée » ; jamais le Misanthrope ou le Tartuffe n'ont peut-être vu une foule aussi considérable se porter à leurs premières représentations, que le mélodrame d'hier. Toutes les loges louées sans exception, le Boulevard encombré d'un nombre immense de spectateurs ou d'aspirants à l'être ; enfin, les barrières qu'une sage prévoyance opposait à leur impatience, renversées par eux, voilà ce que nous avons vu hier à nos risques et périls.

Il est vrai que la renommée avait publié d'avance que l'ouvrage nouveau était du coryphée de ce genre ; on savait aussi que la pièce devait être montée avec un soin tout particulier : tout conspirait donc à exciter la curiosité, cette passion qui tient lieu de beaucoup d'autres aux habitants d'une grande ville. Au surplus, hâtons-nous de dire qu'elle n'a pas été trompée, et que ce mélodrame a obtenu un succès complet.

Suit l'analyse.

Je me suis bien gardé de prévenir les lecteurs sur une multiplicité d'événements qui occupent constamment l'attention du spectateur , et qui ont fait l'immense succès de cet ouvrage.

Tautin et Marty ont mis beaucoup de feu dans les rôles de Raymond et de Giafar. Les auteurs, demandés à grands cris, sont MM. de Pixerécourt pour les paroles, Gérardin-Lacour pour la musique ; les ballets sont du fécond et inventif Hullin, et M. Allaux a peint les décorations, qui toutes trois ont eu leur bonne part de la réussite. Tout porte à croire que l'administration sera amplement dédommagée des dépenses qu'elle a faites pour cette pièce, et que les Ruines de Babylone contribueront pendant longtemps au succès de ce théâtre.

Beaumont.          

Journal des Arts. 4 novembre.

On n'a point encore de Cendrillon, et il n'est pas même question d'en avoir sur les théâtres des Boulevards; mais lorsqu'on possède la baguette de M. de Pixerécourt, on se passe à merveille de toutes les fées et de tous les enchanteurs du monde. L'auteur des Ruines de Babylone n'est-il pas en effet un véritable magicien ? et ne faut-il pas encore plus d'art pour émouvoir et frapper d'étonnement avec des combinaisons simples, que pour surprendre par des moyens surnaturels ? Intérêt soutenu, mouvement rapide, situation touchante, voilà ce qu'on trouve réuni, dans cette nouvelle inspiration de la muse mélodramatique, à un dialogue vif et spirituel, dans lequel l'auteur a mêlé avec beaucoup d'adresse le langage du sentiment à d'ingénieuses plaisanteries. Nous nous sommes déjà plu à rendre justice aux brillants accessoires qui ont concouru au succès prodigieux de ces fameuses ruines ; mais il ne faut pas croire qu'ils l'aient décidé. De jolis ballets, des décorations fraiches, voilà pour les yeux ; mais le cœur et l'esprit ont aussi besoin d'être intéressés, et l'affluence prodigieuse qui se porte aux représentations multipliées de cet ouvrage, prouvent suffisamment que l'auteur n'a négligé aucun moyen de plaire et de toucher.

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