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Cassandre malade imaginaire

Cassandre malade imaginaire, arlequinade en un acte mêlée de vaudevilles, de Lafortelle, 22 fructidor an 13 [9 septembre 1805].

Théâtre du Vaudeville.

Titre :

Cassandre malade imginaire

Genre

arlequinade

Nombre d'actes :

1

Vers / prose ?

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

22 fructidor an 13 [9 septembre 1805]

Théâtre :

Théâtre du Vaudeville

Auteur(s) des paroles :

Lafortelle

Mercure de France, volume 21, p. 614-617 :

[La critique s’ouvre sur la question de la hiérarchie des genres : cette pièce est une parade, pas une comédie, et il faut la juger comme telle, même si ce genre de bouffonnerie, moins à la mode, a plus sa place ailleurs qu’au Vaudeville : « le Vaudeville qu'on aime le mieux est celui qui se rapproche le plus de la comédie ». « Malade imaginaire », cela fait penser à Molière, et le critique nous rassure : rien de commun, sinon qu’on s’y moque un peu des médecins, ainsi dans le couplet d’annonce, qui a fait rire. Hélas, « le reste n’a pas été si bien » (usage assassin de la litote). Le résumé de l’intrigue qui suit en montre assez bien la faiblesse, ce que le critique souligne ensuite : « ce plan ne brille point par l'invention », et le caractère de Cassandre (« on n'a pas beaucoup vu de Cassandres de la bêtise de celui-ci ») est jugé excessif, même pour une arlequinade. Les plaisanteries de la pièce sont durement traitées : « ces absurdités ne pourraient être tolérées que sur ces tréteaux subalternes, où rien ne révolte ». En énumérant toute une série de traits qui ne lui paraissent pas « très-piquans », le critique montre encore ses réticences : la pièce ne lui paraît pas très bonne, y compris dans ses meilleurs couplets, mais, conclut-il, « il ne faut pas examiner trop sévèrement de pareilles bagatelles ». Les auteurs (trois ?) demandés ont préféré ne pas paraître, et Mlle Arsène, seule actrice nommée, n’a pas à s’en réjouir : « Mlle Arsène à qui l'on desirerait un peu plus de mordant et moins de timidité, m'a paru avoir fait quelques progrès » ; on ne sait pas ce qu'elle a pensé de ce jugement.]

THÉATRE DU VAUDEVILLE.

Cassandre malade imaginaire, arlequinade en un acte.

Ce titre annonçant une parade, il serait injuste de juger l'ouvrage comme une comédie. On pourrait tout au plus demander si les parades sont à leur place au Vaudeville, et je pense qu'il n'y a pas d'inconvénient à les y tolérer tandis que ce théâtre aura un Arlequin, un Cassandre et un Pierrot, personnages dont il serait difficile qu'il se passât dans les bouffonneries, dans les parodies, et qui sont tous trois bien remplis en ce moment. Il est vrai qu'ils commencent à passer de mode, et que le Vaudeville qu'on aime le mieux est celui qui se rapproche le plus de la comédie.

Ce nouveau Malade imaginaire n'a de commun avec celui de Molière que le titre, et une plaisanterie ou deux contre les médecins. Celle du couplet d'annonce a fait rire :

En dépit du censeur maussade,
Sauvez-le d'un fâcheux destin ;
Songez qu'il est votre malade,
N'agissez pas en médecin.

La supplique présentée par madame Hervey, qui venait de jouer avec sa grace accoutumée , a singulièrement réussi. Le reste n'a pas été si bien.

On a d'abord vu un billet jeté de la rue par la fenêtre ; il est d'Arlequin à sa chère Colombine. La réponse lui est faite par la même voie. On a dû croire qu'on allait avoir une répétition de l'Intrigue aux Fenêtres. Effectivement celles de Colombine servent beaucoup, non seulement à sa correspondance, mais à toute l'action. Pierrot, rival d'Arlequin, les préfère à la porte, pour entrer ou se montrer chez sa maîtresse, et donner avis à Cassandre des intrigues de sa fille.

On n'a pas beaucoup vu de Cassandres de la bêtise de celui-ci. Il se croit malade quoiqu'il se porte très-bien, cela n'est pas sans exemple ; mais en remuant les lèvres et en gesticulant devant lui sans proférer une parole, on lui persuade qu'il est sourd. Arlequin se donne pour un docteur en médecine ; il passe les mains sur les oreilles de Cassandre, qui se croit guéri parce qu'on lui parle alors et qu'il entend. Cette cure ne le déterminant pas encore en faveur de celui qui l'a faite, ce dernier, en un tour de main, le rend aveugle. Le bonhomme s'est endormi aux refrains d'une certaine chanson qu'il a prié sa fille de chanter, parce qu'elle la chante à ravir. Aussitôt on ferme les volets : lorsqu'il se réveille, il s'étonne de n'y pas voir, et s'écrie : « Ma surdité m'est tombée sur les yeux ! » Au reste il se console de ce malheur, en songeant qu'il lui est commun avec trois Grecs célèbres, Œdipe, Homère et Milton. Arlequin lui rend encore la vue en lui imposant les mains sur les yeux, tandis que Colombine ouvre les volets. Pierrot vient par la fenêtre révêler toutes ces fourberies ; mais il n'était plus temps. Déjà Cassandre avait donné sa fille à son prétendu bienfaiteur, et il ne veut pas s'en dédire.

On voit que ce plan ne brille point par l'invention. La crédulité, ou plutôt la stupidité de ce Cassandre excède de beaucoup la mesure permise et ordinaire à ses pareils. Les privilèges de l'arlequinade même ne doivent pas aller si loin» En tout cas, ces absurdités ne pourraient être tolérées que sur ces tréteaux subalternes, où rien ne révolte. J'en dis autant de la plaisanterie sur le renouvellement des numéros, lequel nous a tous logés au numéro neuf. Aussi n'a-t-elle pas été goûtée, il s'en faut bien.

On a distingué un certain nombre de traits qui ont eu un meilleur sort, quoiqu'ils ne fussent pas très-piquans; par exemple, en parlant je ne sais de quel ouvrage ni à quel propos : « Le libraire mettra plus de temps à le vendre que l'auteur à le faire. » Plusieurs couplets ont été accueillis. Je ne citerai pas celui où Arlequin parle de la dispute sur le remède des 48 verres d'eau chaude pour la goutte : les uns, dit-il, sont pour l'eau froide, les autres pour l'eau chaude;

Mais moi je penche pour le vin;

Ni celui où il assure à Cassandre que sa vie ne court aucun danger ;

Car chez vous le cœur est très-bon,
Tont le mal n'est que dans la tête.

Voici le seul qu'on ait redemandé outre celui de l'annonce. Arlequin se plaint de la trop grande réserve de Colombine, quoique cette réserve ne lui ait rien dérobé de ce qui pouvait flatter son amour :

Pourriez-vous plus long-temps me taire
Un secret que j'ai respecté ?
La sagesse veut le mystère ;
Il convient mal à la beauté.
Mai» afin que votre ame observe
Tour-à-tour l'une et l'autre loi,
Pour mon rival soyez Minerve,
Ne soyez Vénus que pour moi.

On ne voit pas trop pourquoi le mystère ne conviendrait pas à la beauté, ni pourquoi on voudrait établir un contraste entr'elle et la sagesse. Au reste il ne faut pas examiner trop sévèrement de pareilles bagatelles.

Les auteurs ont été demandés ; on dit qu'il n'y en a pas moins de trois. Mais il s'est élevé un parti d'opposition, et ils n'ont pas voulu le heurter. En conséquence, ils ne sont pas officiellement connus. Mlle Arsène à qui l'on desirerait un peu plus de mordant et moins de timidité, m'a paru avoir fait quelques progrès.

Magasin encyclopédique, ou journal des sciences, des lettres et des arts, 10e année, 1805, tome V, p. 420

THÉATRE DU VAUDEVIL LE.

Ce théâtre, pendant l'absence des premiers sujets, a donné beaucoup de nouveautés, mais point de pièces marquantes.

Cassandre, malade imaginaire, est le plus sot des Cassandres , trompé de la manière la moins adroite. C'est une espèce de contre-épreuve du Mari Hypocondre, de la nouvelle pièce de Picard.

[Le même article consacre quelques lignes à deux autres pièces, Le Lendemain de la pièce tombée de MM. Maurice, Dupaty et Dubois. et La Duègne et le Valet.]

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