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Il Matrimonio secreto

Il Matrimonio secreto, opéra-bouffe italien en deux actes, livret de Bertatti, musique de Cimarosa. 20 floréal an IX (10 mai 1801).

Théâtre Italien de l’Opéra Buffa.

[L’opéra de Cimarosa a été créé à Vienne en 1792, et à Paris le 10 mai 1801. Il a connu un succès prodigieux.]

Titre :

Matrimonio secreto (Il)

Genre

opéra-bouffe

Nombre d'actes :

2

Vers ou prose ,

 

Musique :

oui

Date de création :

20 floréal an IX (10 mai 1801)

Théâtre :

Théâtre italien de l’Opéra-Buffa

Auteur(s) des paroles :

Bertatti

Compositeur(s) :

Cimarosa

L’Esprit des journaux français et étrangers, trentième année, tome X, thermidor an IX [août 1801], p. 221 :

[L’ouverture d’un nouvel Opéra Buffa à Paris, pendant l’été 1801, ne paraît pas une bonne idée au critique, ce qui ne l’empêche pas d’apprécier l’opéra de Cimarosa.

On a donné avec succès il Matrimonio segreto, del signor Cimarosa ; c'est, à mon avis, un des meilleurs ouvrages de ce célèbre compositeur, & plusieurs pièces de ce genre doivent momentanément réussir : mais cela ne suffit pas pour détruire la crainte dans laquelle je persiste, que cette nouvelle entreprise n’obtienne jamais un succès durable.

Le Nouvel Esprit des journaux français et étrangers, tome second, brumaire an XII [octobre 1803], p. 222-224 :

[La reprise de l’opéra de Cimarosa est l’occasion de faire le bilan de la création du nouvel opéra-buffa de Paris, deux ans auparavant. Le critique continue à douter de la viabilité de ce spectacle qu’il invite à ne pas se limiter à des reprises et à créer de nouveaux opéras. Après ces considérations sur le destin du spectacle, il reconnaît la qualité de l'œuvre, chef-d'œuvre de Cimarosa comme de l’opéra-bouffon italien. Et les chanteurs vedettes ont été des interprètes remarquables.]

Théâtre Italien de l'Opêra-Buffa.

Il Matrimonio Secreto. — Musique de Cimarosa.

L'empressement avec lequel le public s'est porté à la reprise de ce chef-d'œuvre, l'enthousiasme toujours nouveau qu'il excite, et l'affluence des amateurs qui constamment s'y portent, sont une preuve bien évidente que l'administration- de ce spectacle, pour s'assurer le plein succès et donner à cet établissement toute la consistance et tout l'éclat dont il est susceptible, n'a besoin que de quelques efforts, par exemple, de mettre à profit, pour notre plus grand plaisir, tous les talens dont maintenant elle dispose. S'il faut nécessairement sur les autres théâtres alimenter la curiosité publique par une pièce nouvelle presque à chaque semaine, il n'en est pas de même sur celui-ci, où un opéra tel que il Matrimonio Secreto peut être entendu dix fois, vingt fois, toujours avec le même plaisir. Cependant, là comme ailleurs, il y a un terme qu'il ne faut point passer, et la variété y est toujours nécessaire. Or, c'est cet avantage qui jusqu'à présent a manqué à l'Opéra-Buffa, et qui peut lui manquer long-temps encore , si l'administration ne songe pas au plutôt à augmenter son répertoire, évidemment insuffisant pour l'objet qu'elle se propose. Cet objet même ne sera qu'imparfaitement rempli par la reprise annoncée de l’Italiana in Londra, puisque cet opéra, malgré tout son mérite, n'est plus depuis long-temps une nouveauté pour nous. On ne saurait donc trop conseiller à l'administration d'exciter la curiosité par quelque ouvrage non encore connu ni représenté en France et pourtant digne de l'être. A cet égard elle ne peut être embarrassée que du choix, et sa troupe est assez nombreuse et assez bien composée pour qu'elle ait en cela aucun obstacle à craindre. De ces chefs-d'œuvre en si grand nombre et que les amateurs doivent être si avides de connaître, la Griselda est le seul que la troupe nouvelle ait représenté depuis plus de six mois qu'elle existe dans son état actuel, et les amateurs ont au moins droit de s'en étonner.

Ces considérations mises à part, il est certain que la reprise du Matrimonio Secreto n'a rien laissé à désirer sons tous les rapports, et que jamais les amateurs n'ont été plus à portée de sentir tout le mérite de cet ouvrage, reconnu maintenant pour être non-seulement le chef-d'œuvre de son auteur, mais le premier peut-être des opéra-bouffons italiens. Mme. Strina Sacchi, qui n'est engagée que pour douze représentations, a- complètement rempli l'attente des amateurs, qui ont dû penser qu'après un long repos, elle avait acquis encore de nouveaux moyens ou du moins perfectionné ceux qu'elle a déjà si bien fait valoir. Nozari n'a pas reçu moins d'epplaudissemens dans le rôle de Paolino. Sa voix fraîche et son talent extraordinaire les lui mériteront toujours dans tous les rôles dont il pourra se charger. En général les amateurs les plus instruits, parmi lesquels étaient beaucoup d'Italiens, sont convenus qu'on pourrait difficilement, même en Italie, exécuter cet ouvrage avec plus de perfection et d'ensemble.

Le Nouvel Esprit des journaux français et étrangers, tome quatrième, nivôse an XII [décembre 1803], p. 284-287 :

[Le critique s’intéresse surtout aux chanteurs de ce nouveau théâtre qui vient de jouer il Matrimonio secretto avec succès : tous les publics, amateurs, passionnés, compositeurs, trouvent leur plaisir dans une telle œuvre. La dernière représentation n’a pas ravi le critique, mais son tour des chanteurs en vogue est largement positif. Il énumère ensuite toutes les pièces qu’on attend de voir représenter, en insistant sur la nécessité de varier les opéras présentés : si en Italie, on peut jouer jusqu’à satiété la même pièce, ce n’est pas possible à paris, où le public est plus limité.]

THÉATRE DE L'OPÉRA-BUFFA.

Il Matrimonio Secretto.

Une administration nouvelle a fait hier l'ouverture de ce théâtre : les artistes eux-mêmes paraissent en avoir pris les rènes, et par conséquent avoir établi pour mesure de leurs bénéfices, leur zèle, leurs travaux et leur émulation.

Ils ont exécuté il Matrimonio Secretto. Tout a été dit depuis long-tems sur ce chef-d'œuvre : ceux qui ne le connaissent pas, doivent y aller chercher des sensations toutes nouvelles ; ceux qui en ont fait une étude approfondie, n'ont pas besoin qu'on leur recommande d'y aller épier des beautés non encore apperçues. Quant aux compositeurs, aux progrès desquels l'étude de ce bel ouvrage est particulièrement nécessaire, n'y ont ils pas déjà cherché à surprendre le secret de cette composition agréable et savante, qui, par le plus habile ou le plus simple des mécanismes, sait allier si constamment le chant à l'expression, la vérité comique à la phrase musicale, la richesse de l'accompagnement à l'accent vrai de la déclamation la plus juste ? Cet opéra sera toujours un sujet d'étonnement pour ceux qui ne l'ont entendu qu'une fois, et pour ceux qui le savent par cœur ; pour ceux qui en entendent, qui en prévoient, en suivent tous les motifs, une source féconde de jouissances, un sujet inépuisable d'admiration.

Hier, il a été exécuté d'une manière inégale, et il faut convenir que si la troupe actuelle a désarmé tous les critiques aux représentations del Griselda, elle peut les armer quelquefois aux représentations del Matrimonio.

Martinelli a toutefois fait des progrès sensibles dans le rôle de Jeronimo : son jeu est plus naturel, et conséquemment plus comique ; ses licences sont heureuses ; ce qu'il improvise est bien placé, et peu-à-peu il paraît devoir parvenir à effacer le souvenir de Raffanelli. Il est parfaitement secondé par Crucciati, chanteur sage, pur et méthodiste qui gagne à être entendu souvent, c'est-à-dire, qui mérite d'être apprécié.

Mme. Strina Sacchi, moins inégale cette année que la précédente, mais toujours aussi hardie, toujours entrainée par la verve musicale la plus heureuse, n'a besoin que de modérer son ardeur, de régler ses élans, d'éviter les tons trop élevés, auxquels elle pourrait se laisser entraîner imprudemment et sans nécessité. Expressive, pathétique et savante, son chant est toujours d'un grand effet : pour qu'il soit toujours étonnant, et qu'il ne cesse jamais d'être agréable, Mme. Strina Sacchi, n'a qu'un soin à prendre, c'est de se surveiller elle-même, et de ne s'abandonner à son inspiration que. lorsque ses moyens sont dans toute leur pureté, dans toute leur étendue.

Nozari, dont nous avons, à si juste titre, vanté le talent dans il Principe di Tarenta et dans la Griselda, est bien loin d'avoir soutenu cette opinion favorable dans l’Italiana in Londra, et dans il Matrimonio : soit que son rôle, particulièrement dans ce dernier opéra, ne soit pas écrit précisément pour sa voix, soit qu'une première faute sentie en ait entraîné d'autres, et que la certitude d'avoir déplu enleve presque toujours les moyens de plaire, Nozari, dans le rôle de Paolino, a constamment été froid, sans expression, comme acteur ; sans méihode, et ce qu'il y a de pis, sans justesse, comme chanteur. Hier, le public ne l'a pas reconnu ; et il n'est pas étonnant qu'il n'ait pas lui-même reconnu le public, en se voyant tout-à-coup privé de ses faveurs accoutumées.

Lazzarini était très aimé, parce qu'il était plein d'expression. Aliprandi rappelle sa manière, son excellente méthode, et le remplace bien ; ce chanteur habile va paraître dans plusieurs opéras célèbres, et sera secondé par sa femme, la signora Nerva Alipiandi, qui arrive à Paris précédée d'une grande réputation.

La nouvelle société paraît avoir étudié l’esprit de cette grande cité, calculé le nombre des amateurs qu'elle peut attirer, et s'être convaincue que ce n'est qu'en variant son repertoire qu'elle peut balancer les succès des théâtres nationaux : elle annonce comme prochaines les représentations del re Theodoro, l'un des ouvrages du célèbre Paësiello, qui ont le plus solidement établi sa réputation ; on nous promet aussi la Cosa rara, chef d'œuvre de goût et de délicatesse, dû à Vincendo Martini, dont le succès en 1791, est encore présent aux amateurs ; gli Horatii e Curacii, opéra sérieux, dont il est impossible de présager le succès ou la chûte, quel que soit le mérite reconnu de la partition de Cimarosa, et divers autres ouvrages estimés. Cette variété est, pour l'opéra italien établi à Paris, en concurrence avec deux autres théâtres lyriques, riches en talens, et en possession de répertoires très-étendus, un premier, un indispensable moyen de succès. Dans l'Italie, où un seul théâtre peut réunir les amis de l'art musical, c'est-à-dire tous les citoyens, on peut donner jusqu'à la satiété le même ouvrage ; à Paris, où un petit nombre de spectateurs peuvent suivre avec goût les représentations de l'Opéra-Buffa, ce dernier théâtre ne peut trouver que dans un zèle soutenu, un goût sûr, et un travail infatigable, son aliment et sa récompense.

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