Arlequin journaliste, comédie-vaudeville en un acte, de Ravrio et Thésigny, 14 thermidor, an 5 [1er août 1797].
Théâtre de la Cité
Almanach des Muses 1798.
Jean Rime, « Arlequin journaliste, ou le personnage en jeu : du théâtre à la scène médiatique », Colloquium helveticum : cahiers suisses de littérature générale et comparée, 2012, 43, pp.267-287.
[Le premier Arlequin journaliste, c'est, dans l'article de Rime celui de Chazet, Mardelle et Dupaty (Jean Rime doute de l'existence du vraiment premier Arlequin journaliste, celui de Delrieu, qui n'a pas été imprimé).]
Dans le second Arlequin journaliste, une comédie de Ravrio et Domillier de Thésigny, la situation est inversée : Arlequin est promu directeur de journal, et Gilles n’est que son employé. Naguère chroniqueur ingénu, l’homme de presse incarné par Arlequin endosse les vices de la fonction : corruptible, paresseux, menteur, illettré. En son absence, son subalterne dresse de la profession un portrait au vitriol :
A-t-il faim, on le voit triste ;
Se faire bientôt Clubiste,
Tournant à chaque vent,
Sa plume qu’au plus offrant il vend : …
Voilà bien maint Journaliste.
Patriote ou royaliste,
Athéiste, évangéliste,
Mentir est son emploi ;
Le mensonge est sa plus chère loi :…
Voilà bien maint Journaliste.
Au-delà de la satire, qui doit beaucoup à l’ironie frondeuse du personnage, cette seconde comédie est intéressante en ce qu’elle intègre explicitement au curriculum vitæ d’Arlequin l’évolution de la figure au fil de ses apparitions dans l’histoire du théâtre : « Que d’états j’eus subitement, / Afficheur, et maître de danse ; / Tailleur, puis clerc de procureur ; / Nègre, bon fils et parodiste ; / Santeuil un jour me vit acteur ; / Me voilà journaliste. » En réalité, les qualificatifs que se donne Arlequin sont les titres de plusieurs arlequinades contemporaines – Arlequin afficheur, Arlequin tailleur, etc.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Barba, 1797 :
Arlequin journaliste. Comédie-vaudeville en un acte. Représentée pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre de la Cité-Variétés, le 14 thermidor, l'an 5. de la République française. 1.er août 1797. Par le C. R.***. Ou M. R.***.
Liste des personnages.
PERSONNAGES.
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ARTISTES.
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ARLEQUIN, journaliste.
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M. Frédérik.
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GILLES, son gançon.
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M. Raffile.
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CASSANDRE.
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M. Dumont.
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Mde. PERNELLE.
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Mde. Lacaille.
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ISABELLE, sa fille.
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Mde. Julie.
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La vieille Ragon.
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Caricature accessoire.
M. Brunet.
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Le Théâtre représente l'intérieur du cabinet d'un journaliste.
[La Bibliothèque de Soleinne fait de [François Denis Domillier] de Thésigny le coauteur de la pièce de Ravrio.]
Courrier des spectacles, n° 208 du 15 thermidor an 5 [2 août 1797], p. 2 :
[La pièce « a eu beaucoup de succès », grâce à sa gaîté et à ses couplets. Pièce à tiroirs, on ne peut guère en faire une analyse : Arlequin publie dans son journal des annonces matrimoniales, et on voit défiler les gens qui recourent à ses services. Comme dans toute arlequinade, on y voit Arlequin à la recherche de l'âme sœur, qu'il trouve dans la personne de la fille de madame Pernelle, qu'il doit d'abord marier à Cassandre, s'il veut épouser sa fille. Le critique en profite pour signaler l'éloge en forme de jeu de mot que la pièce fait de Laporte, dont le nom se prête en effet aux calembours. Rien sur les auteurs...]
Théâtre de la Cité.
Le vaudeville dont la première représentation fut donnée hier à ce théâtre, sous le titre d'Arlequin journaliste, a eu beaucoup de succès. De la gaité et grand nombre de couplets agréables lui ont attiré des applaudissemens universels. Cette pièce étant du genre de celles à tiroirs, n’offre point d’intrigue et prête peu à l’analyse.
Parmi les demandes faites dans le journal d'Arlequin, on distingue celles d’une jeune veuve et d’un homme encore verd, qui désirent l’un, trouver un jeune époux, et l’autre, une fille jeune et aimable. A la réception du journal, M. Cassandre qui s’est donné pour l’homme en question, et Mad. Pernelle qui s’est annoncée pour la jeune veuve, arrivent chez Arlequin, chacun pour prendre des renseignemens sur l’annonce qu’il trouve lui convenir. Isabelle, fille de Mad. Pernelle, qui a vu avec intérêt Arlequin la fixer à la promenade, est venue, sous prétexte de se faire annoncer dans son journal ; mais en effet, pour lui faire connoitre l’état de son cœur ; l’obstacle vient de ce que Mad. Pernelle ne veut marier sa fille, qu'après s’être remariée elle-même. Arlequin parvient à l’unir à M. Cassandre qui devient son sixième mari, et notre journaliste épouse Isabelle.
Parmi les couplets qui ont été fort applaudis , il en est un que l’on a fait répéter, et dans lequel Arlequin, en parlant de Dominique et de Carlin, dit qu’en s’en allant ils ont laissé leurs talens à la porte ; le public a saisi avec enthousiasme l’occasion de payer à M. Laporte, arlequin du Vaudeville, auquel s’adressoit cet éloge, le tribut de reconnoissance qui lui est dû pour le zèle qu’il montre dans son emploi. M. Frédérik s’est fort bien acquitté de son rôle.
Dans la base César, seules les 8 représentations au Théâtre de la Cité, du 1er au 29 août 1797 sont à porter au crédit de la pièce de Ravrio et Thésigny. Les 15 représentations au Théâtre du Vaudeville, du 12 décembre 1797 au 11 avril 1798, appartiennent très probablement à la pièce de Dupaty, Chazet et Mardelle.
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