Michel-Ange, opéra en un acte des citoyens Delrieux et Nicolò Isouard. 20 frimaire an 11 [11 décembre 1802].
Théâtre de l'Opéra Comique, rue Favart
D’après Nicole Wild et David Charlton, Théâtre de l'Opéra-Comique Paris : répertoire 1762-1972, la pièce a été reprise en juin 1804, avec un ajout d’un air et d’un duo. Elle a été jouée jusqu’en 1829.
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Titre :
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Michel Ange
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Genre
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opéra
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Nombre d'actes :
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1
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Vers ou prose ,
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Musique :
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oui
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Date de création :
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20 frimaire an XI (11 décembre 1802)
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Théâtre :
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Théâtre de l’Opéra-Comique, rue Favart
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Auteur(s) des paroles :
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Delrieux
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Compositeur(s) :
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Nicolò Isouard
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Almanach des Muses 1804
Michel-Ange aime Florina, fille du célèbre Pérugin. celui-ci meurt, et, par son testament, il accorde la main de sa fille au peintre le plus digne d'achever son tableau de Saint-Michel terrassant le démon. Florina est entre les mains de Scopa, son tuteur, peintre médiocre, et qui desire l'épouser. Michel-Ange, que Scopa avait fait passer pour mort, arrive, et s'introduit chez le tuteur, sous le nom de Fabio. Il profite de l'absence de Scopa, et achève le tableau que celui-ci avait déjà gâté, en voulant y travailler. Scopa, d'après les intentions du testateur, fait assembler les peintres les plus célèbres, et leur présente le tableau. Ceux-ci en admirent la touche large et vigoureuse, et déclarent l'ouvrage digne du prix, lorsque Michel-Ange paraît. Scopa est confondu, et Michel-Ange obtint la main de Florina.
Quelques intentions comiques ; musique agréable, mais sans couleur.
Sur la page de titre de la brochure, Paris, chez Barba, an XI (1802) :
Michel-Ange, opéra, en un acte, en prose ; Paroles de E. J. B. Delrieu. Musique de Nicolo Isouard. Représenté, pour la première fois, sur le théâtre Faydeau, le 20 frimaire, an 11.
Courrier des spectacles, n° 2107 du 21 frimaire an 11 [12 décembre 1802], p. 2 :
[Le critique se pose en gardien du temple, et il s’en prend à « une manie » récente, mettre sur la scène un peintre amoureux, qu’on représente comme « un amant presque toujours tendre et passionné »sans souci de vérité historique, et c’est ce qui arrive cette fois avec un Michel Ange de fantaisie, revenant de la cour de Charles-Quint alors qu’on le croit mort, et qui rejoint l’atelier du peintre Scopa, le tuteur de son amante, où il broie les couleurs. Cette amant, fille du Perrugin, épousera celui qui saura finir un tableau que le maître a laissé inachevé. Profitant de l’absence de Scopa, Michel-Ange achève en secret le tableau, et tout le monde reconnaît son talent. Il se montre, et épouse celle qu’il aime. Outre le rôle du valet qui a bien mal gardé le tableau, une caricature de poltron, il y a dans la pièce une suivante dont le rôle égaie beaucoup. Sans transition, le critique souligne que la pièce a eu beaucoup de succès, mais il lui reproche des réminiscences de plusieurs pièces, on pourrait dire des plagiats. La musique est très appréciée du critique, qui énumère, outre l’ouverture, « d’une facture savante », toute une série d’airs remarquables. Un seul petit reproche : « quelquefois on eut desiré moins de bruit ». L’article finit par le nom des auteurs, paroles et musique, et par la liste des acteurs, qui ont joué « avec beaucoup d’ensemble ». Une chanteuse est particulièrement mise en valeur : elle joue de façon charmante « le petit rôle » de la suivante.
Théâtre de l’Opéra-Comique, rue Feydeau.
Première représentation de Michel-Ange.
Depuis quelque tems c’est une manie de mettre des peintres en scène. On fait voyager un jeune peintre, on en fait un amant presque toujours tendre et passionné. C’est assez naturel, le peintre est comme le poëte. Ut pictura poesis. Il est passionné, enthousiaste, c’est un caractère qui plait assez au théâtre. Souvent aussi de pareils personnages sont imaginaires et embélis par l’acteur. Heureux celui qui trouve un caractère véritable, qui nous retrace un peintre célebre et le met adroitement en scène ! Le nom seul de son héros est déjà une presque certitude du succès. Parmi ceux dont la gloire n’est point contestée on vient de choisir Michel-Ange, ce prince des peintres italiens. Né en 1474, il étonna par des prodiges dans son art toutes les cours de l’Europe, qui cherchèrent tour à-tour à se l’attacher. C’est de lui que l’on lit ce conte, démenti à présent, qu’il avoit attaché un homme en croix pour mieux représenter les traits du Christ mourant ; comme si ,dit 1’historien, la tête d’un homme qui meurt désespéré pouvoit bien exprimer un Dieu s’immolant volontairement pour les hommes ! Michel-Ange n’avoit pas besoin de cette ressource : elle est d’ailleurs entièrement opposée a ce qu’on rapporte de son caractère et de ses mœurs.
Michel-Ange, attiré à la cour de Charles-Quint, a laissé à Florence, sous la tutelle du peintre Scopa, son amante Fiorina, à qui le tuteur a voulu persuader que Michel-Ange étoit mort en Espagne. Il revient en Italie, s’introduit dans l’atelier de Scopa comme broyeur, et là il trouve l’occasion de faire savoir son retour à Fiorina.
Parmi les tableaux qui garnissent l’attelier du peintre, il en est un que Michel-Ange reconnoit pour être de son maitre Perrugin, père de sa maîtresse ; c’est un Auge [sic] exterminateur dont la tète n’est pas finie, et une clause du testament de Perrugin dit expressément que celui qui mettra la derniere main à ce tableau sera l’époux de sa fille : Scopa veut le terminer et rendre tous ses rivaux en peinture témoins de son bonheur. Il va les convoquer et laisse l’atelier sous la garde de son valet Pasquino. Celui-ci n’ose rester en présence d’un Diable qui depuis deux jours à peine est là, et dont l’aspect le fait trembler. Il le couvre d’une tapisserie et s’endort. Michel-Ange rentre sans bruit, ôte la tapisserie et se met à refaire le tableau de son maitre. La tête de l’Ange est terminée, Pasquino se réveille ; il entend du bruit, voit son Diable découvert, se jette à genoux, fait sa priere et s’enfuit. Michel-Ange profite de ce moment pour entretenir Fiorina. Mais à l’arrivée Scopa et des peintres il se cache. Léonard de Vinci et les autres admirent la tète de l’Ange ; Scopa lui-même est étonné ; tous s’accordent à dire que Michel-Ange seul a pu faire ce chef-d’œuvre. Il se montre, embrasse ses amis, et reçoit Fiorina des mains de son tuteur,
Il y a un petit rôle de Zerbine, suivante, qui se croit aimée par le garçon broyeur et dont la folie et la naïveté jettent beaucoup de gaité sur cet ouvrage. Ce nouvel opéra a obtenu un brillant succès. Il vient cependant un peu tard, car on peut l’accuser d’offrir plusieurs réminiscences, et de ressembler en deux ou trois scènes à Une folie. Dans ce dernier opéra, c’est un valet qui se fait admettre comme broyeur chez le peintre, ici c’est l’amant. Le valet dans Une Folie chante et se découvre à la demoiselle en travaillant, ici l’amant cherche à faire la même chose dans une situation pareille. La scène de la romance de Fiorina rappelle aussi celle des Visitandines. Le caractère de Pasquino est le peureux du Secret, du Souterrein, etc.
La musique est digne des plus grands éloges : l’ouverture est d’une facture savante, et offre des motifs très-ingénieux. On a sur-tout le duo entre Zerbine et Michel-Ange, et l’air du Gondolier. Ces deux morceaux sont charmans. L’air : Talent heureux, art séducteur, chanté par Michel-Ange, et l’Invocation à la Mélancolie par Fiorina sont encore remarquables. Les accompagnemens ont été particulièrement soignés, mais quelquefois on eut desiré moins de bruit.
Les auteurs sont, pour les paroles, le cit. Delrieu, et pour la musique, le cit. Nicolo.
Les différens rôles sont rendus avec beaucoup d’ensemble par les cit. Elleviou, Chenard, Dozainville, et par mesd. Scio-Messié et St-Aubin. Cette dernière sur-tout est charmante dans le petit rôle de Zerbine.
F. J. B. P. G ***.
L’Esprit des journaux français et étrangers, trente-deuxième année, nivôse an XI [janvier 1803], p. 190-191 :
[Pièce d’invention : elle ne respecte ni la vie, ni le caractère de Michel Ange tels qu’on les connaît. L’intrigue est rapidement résumée (elle n’est pas bien neuve !), et le jugement commence par noter le succès d’une pièce qui n’a guère de lien avec le personnage qui lui donne son nom. C’est qu’elle comporte à la fois des « détails ingénieux » et « le charme réel d'une musique pure, harmonieuse & spirituelle ». Les auteurs ont eu droit à de chaleureux applaudissements.]
THÉATRE DE L' OPÉRA COMIQUE,, RUE FEYDEAU.
Michel-Ange, comédie.
Ce n'est ni dans la vie de Michel Ange, ni dans son caractère connu que les auteurs ont puisé le sujet de cette petite comédie, On peut la regarder comme d'invention.
Le Pérugin est mort, &, par son testament, il a signifié l'intention que la main de sa fille appartînt à l'artiste digne d'achever son tableau de St-Michel, terrassant le démon.
La fille du Pérugin est entre les mains de Scopa, peintre très-médiocre, qui, suivant l'usage, devient amoureux de sa pupille. Florina, c'est son nom, aime Michel-Ange absent ; le tuteur, pour triompher de son rival, le fait passer pour mort ; mais Michel-Ange revient sous le nom de Fabio, communique son secret à son amante, achève en l'absence de Scopa le tableau du Pérugin, que le barbouilleur avoit déjà gâté.
Un jury vient pour examiner si Scopa a réellement rempli les intentions du testateur ; & confondu d'étonnement de voir la touche ferme & vigoureuse qui caractérise l'ouvrage, est prêt à couronner l'espoir de Scopa, lorsque Michel-Ange se nomme & réclame la main de Florina qu'il obtient.
Le public a vivement applaudi l'intention d'un ouvrage dont le but est d'honorer les arts & la mémoire d'un artiste aussi célèbre que Michel Ange. Ceux qui ont étudié la vie de cet artiste, auroient désiré y retrouver ce caractère âpre & un peu sauvage que lui donne l'histoire ; ils ont paru s'accoutumer difficilement à le voir représenter comme un Collin d'opéra comique.
Mais les détails ingénieux dont ce petit ouvrage est semé, & surtout le charme réel d'une musique pure, harmonieuse & spirituelle, ont déterminé le succès complet de la pièce. Elle est du C. Delrieux, auteur de la jolie comédie du Jaloux malgré lui ; & pour la musique, du C. Nicolo Isoard. lls ont été demandés, ont paru, & ont été vivement applaudis.
Annales dramatiques : ou, Dictionnaire général des théâtres, tome sixième (1810), p. 287-288 :
MICHEL ANGE, opéra en un acte, par M. Delrieu, musique de M. Nicolo, à Feydeau, 1802.
Le poème et la musique de ce petit opéra ont obtenu un succès mérité ; l'un et l'autre sont remplis de details agréables.
Michel-Ange, attiré à la cour de Charles-Quint, a laissé à Florence, sous la tutelle du peintre Scopa, son amante Fionna, fille du Perrugin. Scopa, épris des charmes de sa pupille, lui fait croire que Michel-Ange a perdu la vie. Cependant le jeune artiste, rappellé par l'amour, revient en Italie, où il apprend tout ce qui se passe ; il se déguise, s'introduit dans l'attelier de Scopa comme broyeur, et trouve moyen d'instruire Fiorina de son retour.
Parmi ses tableaux,Scopa possède un Ange Exterminateur, ouvrage que la mort n'a point laissé le tems de finir au Perrugin, qui, par sou testament a promis la main de sa fille à celui qui le terminerait d'une manière digne de lui. Scopa, décidé à y mettre la dernière main, est allé convoquer ses amis, pour les rendre témoins de son triomphe. Il a laissé la garde de son attellier à son valet Pasquino, qui, effrayé de la figure du diable, la couvre d'une tapisserie et s'endort, ce qui n'est pas vraisemblable. Cependant Michel-Ange enlève le voile, saisit les pinceaux, et se met à l'ouvrage. Le tableau est terminé, quand Pasquino se reveille : à l'aspect du diable découvert, il s'enfuit de frayeur. Michel-Ange profite de son absence pour entretenir Fiorina. Scopa revient avec ses amis, surpris de trouver l'ouvrage parfaitement terminé : tous s'accordent à dire que Michel-Ange seul a pu produire ce chef-d'œuvre. Le Peintre, qui s'était caché reparait et est reconnu. Scopa lui-même est dans l'admiration, et cède volontiers à l'amour et au génie, ses prétentions sur sa pupille.
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