Le Pied de bœuf et la queue de chat, mélodrame-féerie-comique en trois actes, en prose, de P.-J. Charrin fils et Maxime de Redon, musique de Bianchi, ballets de Robilllon jeune, 11 juin 1807.
Théâtre des Jeunes Artistes
Sur la page de titre de la brochure, à Paris, chez Hénée et Dumas, chez Martinet, chez Barba, 1807 :
Le Pied de bœuf et la queue de chat, mélodrame-féerie-comique, en trois actes, en prose, Mêlé de Chants, Danses et Combats ; Paroles de Messieurs P.-J. Charrin fils, et Maxime de Redon ; Musique d'il signor Bianchi ; Ballets de la composition de M. Robillon jeune ; Décors de MM. Matis et Desroches ; Machines de M. Panelle ; Représenté pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre des Jeunes Artistes, rue de Bondy, le 9 Juin 1807.
Annoncée une première fois le 9 juin par le Journal de Paris, la première représentation est de nouveau annoncée le 11, tandis que le 12, le Journal de Paris annonce la deuxième représentation. Troisième représentation le 13. Quatrième le 15. Cinquième le 16. Sixième le 17. Septième le 18. Huitième le 19. Neuvième le 20. Dixième le 22. Onzième le 23. Douzième le 24. Treizième le 25. Quatorzième le 26. Quinzième le 27. Seizième le 29. Dix-septième le 30. Je ne suis pas allé au-delà du 30 juin.
Le Journal de l'Empire ne donne pas le programme du Théâtre des Jeunes Artistes le 9 juin, mais signale la première représentation le 11 juin. C'est donc très probablement la date exacte de cette prmeière.
Journal de Paris, n° 166 du 15 juin 1807, p. 1197 :
[Non pas un compte rendu, mais une lettre (de lecteur ? On peut en douter) vantant tout ce qu'on voit dans la pièce nouvelle : « tous les pays, tous les contrastes, tous les plaisirs ». L'auteur de la lettre ne ménage pas ses éloges, et prend même soin d'inclure un propos réticent au sein de ce bouquet de compliments. La conclusion va de soi : allez voir ce spectacle.]
Aux Rédacteurs du Journal.
Eh! vite, messieurs, vite au théâtre de la rue de Bondi : c’est là que vous verrez le Pied de Bœuf & la Queue du Chat, double talisman en une seule pièce, double source de prodiges & d’enchantement ! c’est là que vous passerez en revue tous les pays, tous les contrastes, tous les plaisirs : l’Espagne avec sa noble magnificence, & la Chine avec son luxe de papillotage ; des espèces de géants, tombant comme des nues dans un pays de pygmées, & emportant sur les épaules le plus gros vaisseau de la marine royale du monarque lilliputien ; Pluton, dans son royaume de feu, profilant aux ébats infernaux de ses démons en goguette ; Neptune tenant sa cour au sein de son brillant palais de crystal, ou parcourant le liquide empire sur une conque traînée par d’aimables Naïades qui semblent effleurer à peine 1a surface de la mer ; des ascensions aërostatiqnes, & des naufrages ; des ballets joyeux, & des combats ; une danse chinoise, avec accompagnement de sonnettes toujours en harmonie, & d’un effet tout-à-fait neuf ; une musique bien assortie aux situations diverses ; de petits enfans qui chantent très-joliment, & de grands acteurs qui déclament plus joliment encore ; un dialogue assez naturel, mais qui pouvait être parfois plus spirituel & plus gai ; enfin, ce qui constitue presque exclusivement le mérite du genre, un jeu infini de machines, une richesse & une fraîcheur de coutumes & de décorations surtout, au-dessus de tout ce qu’on voit ailleurs de plus brillant sous ce rapport ; en un mot, un tel effort de soins & de dépenses, qu'on ne peut se dispenser de redire : Vîte, vîte.. messieurs, allez voir le Pied de Bœuf & la Queue du Chat !
Signé Opticomane.
Journal de l'Empire, 14 juin 1807, p. 4 :
[Pour une fois, le mélodrame nouveau a été à la hauteur des attentes. Le résumé de l'intrigue insiste sur le caractère merveilleux de ce mélodrame qui est aussi féerie. Il commence par le voyage magique en Chine du héros, où, armé d'un premier talisman, le pied de bœuf, il se retrouve géant dans un pays de nains. Ce voyage en Chine est l'occasion de parler d'un remarquable ballet chinois et de son principal interprète. Ce ballet qui fait intervenir des enfants (les nains...) est un moment fort du spectacle, mais il y a aussi tout l'attirail du mélodrame comique, « des machines, des décorations, des métamorphoses ». Le périple du héros, qui a perdu son premier talisman, comporte un naufrage, et il trouve chez Neptune un second talisman, une queue de chat. Le combat qu'il mène contre son rival amoureux tourne à son avantage. Après ce résumé un peu confus, le critique souligne que la pièce est supérieure à ce qu'on monte habituellement au Théâtre des Jeunes Artistes. Elle cumule tous les genres, « mélodrame, féerie, ballet et vaudeville », bien mis en scène, bien joué, avec de bons couplets. L'article s'achève sur le constat de la multiplicité des pièces à succès au même moment.]
THÉATRE DES JEUNES ARTISTES.
Le Pied de Bœuf et la Queue de Chat.
Ce .mélodrame long-temps attendu n'est point resté, comme il arrive trop souvent, au-dessous de l'opinion : les talismans y sont multipliés ; mais le- miracles le sont aussi. Au premier acte, Valério se trouve avoir un vieux rival nommé Tartarino, qui a le singulier privilège d'envoyer réellement aux Enfers tous ceux qu'il donne au Diable. A peine a-t-il prononcé l'imprécation qu'elle s'exécute. Valério, comme son rival, est celui qu'il donne de meilleur cœur au Diable : mais ce malheureux amant trouve chez le Diable un appui : c'est Pluton qui l'arme d'un pied de bœuf, lequel doit faire des merveilles, et qui en fait véritablement ; mais son règne est trop court. Valério se laisse prendre son pied de bœuf qu'il portoit pendu au col : ainsi dépouillé et désarmé, il se rend à la Chine avec son confident ; et 1à, nouveau Gulliver, il trouve un peuple de nains. Le petit roi de ce petit peuple, jaloux des grandes proportions des deux étrangers, conspire contr'eux ; mais ils sont protégés par la reine qui est une espèce de fée, et qui a une baguette magique. Pour amuser les étrangers qu'elle aime beaucoup, cette reine leur donne un bal chinois, qui est aussi la plus jolie chose du monde ; et il est à observer que ce qu'il y a de plus merveilleux dans ces deux nouveaux mélodrames, de la Gaieté et des Jeunes-Artistes c'et la danse.
Ce ballet chinois, et tous ceux de la pièce, sont l'ouvrage de M. Robillon, jeune danseur de la Porte Saint Martin et qui se distingue par un pas charmant dans 1es Sauvages de la Floride. Il y a long-temps qu'on fait danser des Chinois ; mais M. Robillon a trouvé le secret d'accompagner leur danse d'une espèce de petit concert d'harmonica que les danseurs forment eux-mêmes : invention très-agréable et très- heureuse. Le divertissement chinois, exécuté avec infiniment de grace et de précision par des enfans que M. Robillon a formés, est ce qui a le plus enchanté tout le monde dans cette féerie, où il y a d'ailleurs des machines, des décorations, des métamorphoses qui paroissent encore admirables, après tout ce qu'on a vu dans ce genre.
Les étrangers, pour quitter la Chine, sont obligés de consentir à être réduits à la taille des habitans du pays : ils font naufrage en chemin ; et c'est au fond des eaux que Neptune fait présent à Valério de la queue de chat, comme c'étoit au fond des Enfers que le Diable lui avoit fait présent du pied de bœuf. Avec cette queue, il se rend sans encombre chez sa maîtresse, qui ne le reconnoît pas, et le prend pour un enfant ; mais au moment où elle est prête à épouser son rival, Valério, caché sous l'autel, se montre et attaque le vieux Tartarino. Les deux amans dirigent l'un contre l'autre leurs talismans, comme deux champions dirigent leurs pistolets ; mais la partie serait égale, si on ne trouvoit le moyen d'ôter le pied de bœuf au vieux Tartarino.
Cette féerie, plus extraordinaire que toutes celles qui ont paru jusqu'ici à ce théâtre, est montée avec le plus grand soin, très-bien exécutée et ornée de fort jolis couplets : c'est tout à la-fois mélodrame, féerie, ballet et vaudeville.
Il faut que les Sauvages de la Floride soient bien forts pour avoir lutté le même jour avec avantage contre le Pied de Bœuf et la Queue de Chat et l'Amant Mystérieux,
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