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Le Prétendu de Troyes

Le Prétendu de Troyes, comédie en un acte ; 6 messidor an 13.

Théâtre Montansier.

Almanach des Muses 1806.

Courrier des spectacles, n° 3070 du 25 messidor an 13 [14 juillet 1805], p. 2 :

Le Prétendu de Troyes, représenté hier au Théâtre Montansier, n’ a eu qu’un succès médiocre.

Courrier des spectacles, n° 3071 du 26 messidor an 13 [15 juillet 1805], p. 2 :

[Le compte rendu laisse entendre d’emblée que la pièce n’a pas connu le succès, puisqu’il commence par souligner qu’un succès au Théâtre Montansier ne peut que tomber dans des excès à grand renfort « de bouffonneries, de propos grivois, de pointes, de rebus, de calembonrgs » pour prendre la suite des pièces à succès de ce théâtre poru lequel le critique ne semble pas avoir beaucoup d’estime. La pièce nouvelle n’est pas sans mérite, ne serait-ce que parce qu’elle est écrite en vers, et des vers pas si mauvais, « faciles et agréables ». Mais elle n’a rien de neuf, ni de « très-comique » : elle ne franchit pas les bornes. Suit l’analyse de la pièce, effectivement riche en moyens éculés (le jeune prétendu couvert de dettes ; l’autre prétendu, un niais ; le valet plein de ruses ; le papier perdu). Le dénouement est par ailleurs d’un arbitraire parfait : le père du prétendu endetté paie les dettes de son fils, lui assure des rentes et rend ainsi le mariage plus que possible : un avare comme le père de la jeune fille ne peut pas résister à autant de coïncidences. En deux lignes, le jugement est donné : l’auteur n’est pas nommé, et la représentation a connu des hauts et des bas.]

Théâtre Montansier.

Le Prétendu de Troyes.

Quand on prétend amuser le public au théâtre Montansier, il faut faire provision de bouffonneries, de propos grivois, de pointes, de rebus, de calembonrgs. Après les Jocrisses, le Pont des-Arts et M Vautour, de quel succès prétendroit se flatter l’auteur d’une pièce froidement régulière, compassée dans son style, discrète dans ses situations, ménagée dans sa gaieté. C’est là qu’il faut écarter tout scrupule et renoncer à la pruderie.

Le Prétendu de Troyes n’est pas une pièce sans talent ; elle est écrite en vers, et souvent en vers faciles et agréables. Les situations sont assez raisonnables et calculées avec justesse ; mais elles n’ont rien de neuf, rien de très-comique ; elles suffiroient peut-être sur une autre théâtre ; ici il faut passer les bornes.

Un Monsieur Ducrédit, homme avare et sordide, n’a qu’une fille plus remarquable par ses grâces et ses heureuses qualités que par la fortune qu’elle a droit d'attendre. Elle a pour amant Fréminville, jeune homme aimable, mais qui fait des dettes et emprunte même de l’argent au père de son amante. On sent bien que M. Ducrédit ne sauroit s’accommoder d’un pareil gendre ; aussi en fait-il venir un de Troyes qui doit épouser sa fille sans dot. C'est ce prétendu qu’il faut écarter. Crispin, valet de Fréminville, se charge de l’affaire. Il commence par espionner Ducrédit, se tient derrière lui, tandis qu’il compte les billets de son porte feuille, et ne manque pas de ramasser promptement un de ces billets que l’avare laisse tomber. Ce billet se trouve être précisément celui de son maître ; fier de cette bonne-fortune, Crispin médite des exploits dignes de lui. Le prétendu de Troyes, qu’on nomme Ménager, arrive presque aussitôt. C’est une espèce de niais crotté jusqu’à l’échine, courant les rues pour savoir où demeure son beau-pere.

Crispin s’empare du nigaud, se fait passer pour le valet de Ducrédit et meue sou hôte chez le restaurateur. Cette scène, dont l’idée n’est pas nouvelle, est une des meilleures du la pièce ; elle a éié jouée d’une manière très-gaie par Bosquier-Gavaudan.

Ménager, qui ne demande pas mieux que de bien dîner, suit sans façon le valet de son beau-père. Crispin l’enivre, lui fait changer d’habits, le quitte et se présente lui-même chez M. Ducrédit comme le gendre qui doit lui arriver de Troyes. Bosquier joue encore très-bien cette scène. Le prétendu ne manque pas de dire toutes les sottises possibles, de prendre avec Ducrédit les plus impertinentes familiarités, et de se conduire de manière à se faire promptement chasser.

A peine est-il parti que le véritable gendre se présente, toujours crotté, mais de plus, dans un état d’ivresse complet. Il veut présenter ses lettres de crédit ; mais comme il a changé d’habit avec Crispin, il ne trouve que la lettre-de-change que son beau-père avoit perdu ; alors la soubrette de Mlle. Ducrédit imagine de faire passer le nouveau venu pour Fréminville lui-même ; l’avare beau-père se saisit alors de sa proie et demande impérieusement le paiement de sa lettre-de-change. Le pauvre Champenois ne sait ce qu’on veut lui dire, et justement courroucé de toutes ses aventures se dispose à se retirer. Alors le véritable Fréminville se présente. « Monsieur, dit-il à Ducrédit, je sais que vous avez perdu ma lettre-de-change, mais mon engagement n’en est pas moins sacré. Voici les 12 mille francs que je vous dois. Mon père a bien voulu acquitter mes dettes et m’assurer un revenu de six mille francs. Si mon amour pour votre fille et ma situation présente vous paroissent des titres suffisans, je réclame l’honneur de devenir votre gendre. » Ducrédit ne se fait point presser et consent au mariage de sa fille. On n’a point nommé l’auteur de cette pièce, dont la représentation a été mêlé de triomphes et de revers.

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