Rancune, ou les Charcutiers de Troie

Rancune, ou les Charcutiers de Troyes, parodie d'Hécube, en un acte, de Léger, Villiers, Guilbert de Pixerécourt, Armand-Gouffé, Georges Duval et P.-A. Vieillard, 21 Floréal an 8 [11 mai 1800].

Théâtre des Troubadours

Titre :

Rancune, ou les Charcutiers de Troyes

Genre

parodie

Nombre d'actes :

1

Vers ou prose ,

en prose, avec des couplets en vers

Musique :

vaudevilles

Date de création :

21 floréal an 8 [11 mai 1800]

Théâtre :

Théâtre des Troubadours

Auteur(s) des paroles :

Léger, Villiers, Guilbert-Pixerécourt, Armand-Gouffé, Georges Duval et P.-A. Vieillard

Almanach des Muses 1801

L'Almanach des Muses orthographie le nom de la ville charcutière Troie.

Fragile, élève en chirurgie, a tué Retare, fils de Criam, charcutier, en lui tirant trop de sang dans une saignée ; de-là, haine et dissension entre les garçons charcutiers, et les élèves en chirurgie de Troie en Champagne. Pour appaiser les deux partis, Criam se décide à marier sa fille Proxilène avec Fragile ; Rancune, son épouse, voudrait empêcher cet hymen, et ne pouvant y parvenir, engage sa fille à se venger de Fragile, en l'endormant avec de l'opium ; mais Proxilène préfère de se poignarder avec un couteau lorsqu'elle marchera à l'autel. Cependant une rixe s'est élevée entre les charcutiers et les élèves en chirurgie ; le sang va couler : Proxilène se dévoue, et reçoit la main de Fragile.

Farce composée, apprise et jouée en cinq jours. Elle a fait rire ; c'est à quoi se bornait la prétention des auteurs, connus par des ouvrages plus recommandables.

Courrier des spectacles, n° 1165 du 23 floréal an 8 [13 mai 1800], p. 2 :

Théâtre des Troubadours.

Rancune, ou les Chaircuitiers de Troyes, parodie d'Hécube, donnée avant-hier sur ce théâtre, a obtenu le succès le plus complet. Cette folie agréable, semée de jolis couplets, dont plusieurs ont été redemandés, est assaisonnée d’une critique fine et légère ; au surplus dans ces sortes d’impromptus, c’est à qui mettra du sien, et l’on doit ce bouquet de saillies aux cit. Léger, Guilbert-Pixérécourt, Armand-Gouffé, Georges-Duval, Villiers et Vieillard.

Madame Delisle et Bosquier-Gavaudan ont joué de la manière la plus piquante et la plus originale, l’une le rôle de Proxilène et l’autre celui de Fragile.

On donnera dans le prochain numéro l’analyse de cette parodie, qui ne peut manquer d’amuser beaucoup ceux qui auront vu ou qui verront Hécube.

B * * *.

La promesse d’une « analyse de cette parodie », qui se jouait pourtant tous les soirs, n’est pas parue le lendemain, ni les jours suivants. Le 18 mai, c’est à la nouvelle pièce du Théâtre des Troubadours, Momus à Paris, que le Courrier des spectacles consacre un article.

La Décade philosophique, littéraire et politique, an 8, 2e trimestre, n° 24, 30 floréal an 8 ; p. 366-367 :

[Il suffit pour le critique de résumer l'intrigue de la parodie pour montrer « qu'il n'y a pas un grand effort d'imagination dans cette folie », simple « mélange assez gai de pointes, de jeux de mots et de trivialités, parmi quelques traits satyriques ou spirituels » : ce n'est pas un jugement très positif.]

Théâtre des Troubadours.

Rancune ou les Charcutiers de Troyes, parodie d'Hécune, en un acte, représentée le 21 floral.

Les Citoyens Leger, Villière, Guilbert-Pexericourt, Armand Gouffé, Georges Duval et Vieillard ont fait, et les acteurs ont appris cette parodie de l'opéra d'Hécube en cinq jours. On y a ri et on y a beaucoup applaudi ; c'est tout ce qu'on peut raisonnablement espérer d'un ouvrage de ce genre, composé tellement à la hâte.

Hector est ici parodié par Retare, fils du charcutier Criam.

Fragile, élève en chirurgie, lui a donné la mort par une saignée un peu trop copieuse.

De-là est survenu une dissention civile entre tous les garçons charcutiers et les élèves en chirurgie de Troyes en Champagne.

Pour réconcilier les deux parties, Criam se résout à marier sa fille Prolixène avec Fragile.

Mais Rancune son épouse, ne pouvant rompre cet hymen, veut engager sa fille à se venger de Fragile, en l'endormant avec de l'opium.

Prolixène préfère de se poignarder avec un couteau au moment où l'hymen se prépare.

Cependant, une rixe est survenue dans la ville entre les deux parties ; on les appaise, tout se concilie ; la douce paix se conclut, et le mariage de Prolixène et de Fragile réunit tous les partis divisés.

On voit qu'il n'y a pas un grand effort d'imagination dans cette folie, où l'on trouve un mélange assez gai de pointes, de jeux de mots et de trivialités, parmi quelques traits satyriques ou spirituels.

R. P. D.

L’Esprit des journaux français et étrangers, vingt-neuvième année, tome 8, floréal an 8 [avril-mai 1800], p. 194-196 :

[La parodie d’Hécube a eu du succès. Montée en quelques jours, elle « offre beaucoup de traits satyriques & des plaisanteries fort gaies, quoique d'un genre trop trivial » et constitue une critique pertinente aussi bien la forme (l’emploi des roulades dans la bouche de Priam), que le traitement des personnages (le rôle de Priam devenu nul, celui d’Achille, caricaturé en personnage de l’Astrée. Il y a des jeux de mots « bons ou mauvais » que le public a applaudis. La suite du compte rendu cite de nombreux couplets remarqués. Liste des auteurs, mention des deux acteurs principaux, remarquables.]

THÉATRE DES TROUBADOURS.

Rancune, parodie d'Hécube.

La parodie d'Hécube a obtenu dernièrement à ce théâtre un grand nombre d'applaudissemens. Cette bluette, faite, apprise & jouée dans l'espace de cinq jours, offre beaucoup de traits satyriques & des plaisanteries fort gaies, quoique d'un genre trop trivial. Les auteurs y critiquent d'une manière assez ingénieuse l'ariette à roulades, qui paroît si déplacée à l'opéra dans la bouche du vénérable Priam ; ils font sentir la nullité de ce personnage (si intéressant dans l'Iliade), & ils s'égaient, surtout, avec succès aux dépens du moderne Achille, qui a toute la galanterie & toute la fadeur des héros de l'Astrée. Le couplet suivant a obtenu les honneurs du bis.

ACHILLE.

AIR : Demain matin.

J'étois brouillon, colère ;
Je suis doux comme un mouton ;
J'ai perdu mon caractère,
Et n'ai gardé que mon nom.
Je me croyois invincible ;
Mais près de vous, beau tendron,
J'ai le cœur aussi sensible
            Que le talon.

Plusieurs jeux de mots, bons ou mauvais, ont aussi excité des applaudissemens. On annonce au père Criam, charcutier, que sa cuisine est dévastée par les amis de Fragile. « Adieu, mes lards ! » s'écrie-t-il douloureusement, pour parodier Priam regrettant ses dieux pénates.

Parmi les couplets qui terminent la pièce ; nous avons remarqué les suivans, dont le dernier a été répété.

CRIAM.

AIR du Vaudeville de l'Opéra-Comique.

La colère ne mène à rien,
Souvent le remords l'accompagne ;
Pour moi j'ai le cœur d'un Troyen...
Le cœur d'un Troyen de Champagne.
Un bon cœur est un bien si doux ,
Que quand je songe à ma fortune,
Je trouve heureux tous les époux
    Qui n'ont pas de rancune.

FRAGILE à Criam.

On vous a pillé, mais cela
Fort communément se pratique ;
Souvent les auteurs d'opéra
Pillent paroles et musique.
En pillant on se fait un nom,
Comme en pillant on fait fortune ;
Pour beaucoup de gens il est bon
    Qu'on n'ait pas de
rancune.

PROLIXÈNE au Public.

Courez en foule à l'Opéra,
Applaudir le chant et la danse ;
Les grands talens qu'on trouve là,
Doivent être chers à la France.
Puis, pour rire quelques instans,
Rendez-vous ici sur la brune,
Et permettez-nous quelque temps
    De vous garder rancune

Les auteurs de cette parodie ont été demandés & nommés ; ce sont les CC. Leger, Villiers, Guilbert-Pixerecour, Armand Gouffé, Georges Duval & Vieillard.

Le rôle de Fragile a été joué fort plaisamment par le C. Bosquier-Gavaudan ; le C. Bellement a fait de celui de Criam une excellente caricature,

 

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