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Boniface Carré, ou l'Habit de Voltaire

Boniface Carré, ou l'Habit de Voltaire, vaudeville en un acte, de Dumersan et Lafortelle,  22 novembre 1806.

Théâtre Montansier.

Almanach des Muses 1807.

Journal de Paris, n° 321 du 17 novembre 1806, p. 2355 :

Annonce d’une soirée exceptionnelle « au bénéfice de mademoiselle Caroline ». C’est au cours de cette fête que sera jouée la nouvelle pièce de Boniface Carré ou l’Habit de Voltaire » :

L’autre pièce nous offrira Boniface carré ou l’habit de Voltaire : cet habit-là doit porter bonheur, & promet une foule de saillies ingénieuses.

Le succès attendu ne s’est pas vraiment réalisé, et si la pièce, effectivement jouée le 22 novembre, est bien annoncée pour le 23 novembre, sa chute figure dans le journal du 25, p. 2410 (en notant que le titre est modifié en mettant le nom de l'acteur jouant Voltaire à la place de son habit) :

Dans la même soirée où des bouffonneries d’ailleurs fort gaies, obtenoient au théâtre Feydeau un très-grand succès, d’autre bouffoneries sans doute moins spirituelles, étoient sifflées impitoyablement au théâtre Montansier, leur domicile naturel. On a déjà remarqué que le goût des habitués de ce dernier théâtre, s’épure de jour en jour ; & la soirée de samedi en a offert une double preuve, d’abord par la chûte de Boniface Carré, ou Voltaire travesti en Brunet, ensuite par le succès brillant de Gallet ou l’Epicier droguiste ; pièce d’un bon ton & dans le genre des Chevilles de Maître Adam : elle est des mêmes auteurs, MM. Francis et Moreau.

La pièce n'ayant pas été chevée, les auteurs n'ont pas été nommés. Elle est de Dumersan à la production si prolifique et Lafortelle, mais elle n'a pas été imprimée (source : la Littérature française contemporaine, volume 3 (1848), p. 347).

Gallet ou l’Epicier droguiste : le titre donné ici est inexact, il s’agit de Gallet, ou le Chansonnier droguiste.

Courrier des spectacles, n° 3576 du 24 novembre 1806, p. 2-3 :

[La soirée du 22 novembre était une représentation an bénéfice. de deux actrices. Elle est composée surtout de deux pièces nouvelles, dont cet article doit rendre compte, Gallet ou le Chansonnier droguiste et Boniface Carré ou l'Habit de Voltaire. Mais avant de parler des deux nouveautés, le critique commence par analyser la révolution que connaît le Théâtre Montansier, passé de sturlupinades et auxtres calembours un genre de pièces tout différent, cultivant « la décence unie à la gaîté » qui le rend fréquentable à un public de « la société honnête ». La représentation du 22 novembre faisait alterner pièces connues et nouveautés. Après le Diable en vacance, c'est Boniface quarré, ou l'Habit de Voltaire qui a affronté le public, et a subi son courroux. Car la pièce, dont le critique résume l'intrigue (un sujet assez mince, autour d'un personnage pris pour Voltaire parce qu'il en porte l'habit, tandis que Voltaire passe inaperçu « dans un négligé du matin », jusqu'à ce que le malentendu se dissipe : le critique le suppose du moins, parce que la pièce n'est pas allée à son terme.

L'article traite ensuite de la deuxième nouveauté, Gallet, ou le Chansonnier Droguiste, dont le destin est différent.]

Théâtre Montansier.

Représentation au bénéfice de mesd. Caroline et Barroyer.

Depuis que ce Théâtre sacrifie moins aux turlupinades, aux calembourgs, depuis que l’on voit régner dans les nouvelles pièces de [s]on répertoire la décence unie à la gaîté, la société honnête ne rougit plus d’aller s'y délasser, et même elle pardonne en faveur des ouvrages du bon ton ceux qui conservent encore quelque levain d'impureté. La réforme ne s’achève pas en un jour ; on a dû ménager certains goûts, certaines habitudes ; mais elles meurent insensiblement avec le genre qui les a fait naître, les auteurs de facéties burlesques se retirent et cèdent la place à ceux qui offrent des ouvrages moins propres à affliger les Muses et les Grâces ; administrateurs, acteurs, auteur, public, tout le monde y a gagné. Tant de suffrages en faveur de la décence pourroient-ils être balancés par ceux d’une poignée d'amateurs de calembourgs, de farces et de turlupinades qui voudroient en vain ranimer les restes d’un parti expirant ? La réputation d’honneur que vient d'acquérir Thalie-Montansier a parfaitement servi les inté- de [sic] mesd. Caroline et Barroyer. Les loges et le parterre étoient garnis d’une société nombreuse et choisie, qui a dû être étonnée d'y trouver toutes les pièces de la soirée du meilleur ton. On avoit écarté celles qui fournissent à tant de jeunes gens le faux esprit, les pointes, les jeux de mots avec lesquels ils vont faire fortune dans les salons du tiers ordre. Le spectacle a commencé par le Diable en vacance, joli opéra dont plusieurs airs ont fait fortune, comme ceux du Diable couleur de rose. Est venu ensuite Boniface quarré, ou l'Habit de Voltaire. Cette bleuette a été très-mal accueillie, et s’il est difficile de trouver ouvrage plus foible, plus mal conduit, il est rare d’entendre des sifflets plus aigus et plus acharnés que ceux qui ont fait tomber le rideau et la pièce.

Voltaire, revenant à Paris après son exil, s’arrête à Moulins. Le sénéchal du lieu, M. Gauchat découvre que son hôte est le personnage célèbre dont les vers occupent toute la France. Aussi-tôt il ordonne qu’on lui apporte sa large perruque, son habit de cérémonie ; il va préparer son compliment, et recommande à sa sœur, Mlle. Gauchat, et à ses voisins de se réunir à lui pour fêter le grand poète. Dans cet intervalle arrive à Moulins M. Boniface-Carré, ancien amant de Mlle. Gauchat. Couvert de dettes, sans habit, il entre dans la maison, et trouvant M. de Voltaire prend pitié de lui, et . lui prête un de ses habits. Boniface-Carré sort de l’appartement tout chamarré d’or, et à l’instant maître Gauchat, qui ne le reconnoît pas, et tous les Moulinais l'environnent et célèbrent son arrivée. Boniface-Carré se laisse faire, il joue le personnage important, accorde des audiences à Mad. Gauchat et à Mlle. Gauchat, et quand Voltaire paroît dans un négligé du matin, on le prend pour Boniface-Carré. Bientôt tout s’explique, du moins cela est probable, nous ne l'assurons pas ; car la pièce en est restée là. Le parterre n’a plus permis de rien entendre, et a renvoyé les auteurs à Moulins.

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