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Une heure de prison

Une heure de prison ou la Lettre de recommandation, comédie en deux actes, mêlée de couplets (vaudevilles), de Sewrin, Dumersan et Merle, 24 juillet 1811.

Théâtre des Variétés.

Titre :

Une heure de prison, ou la lettre de recommandation

Genre :

comédie mêlée de couplets

Nombre d'actes :

2

Vers / prose

prose, couplets en vers

Musique : vaudevilles

Date de création :

24 juillet 1811

Théâtre :

Théâtre des Variétés

Auteur(s) des paroles :

Sewrin, Dumersan et Merle

Almanach des Muses 1812.

Sur la page de titre de la brochure, 2e édition, Paris, chez J. N. Barba, 1818 :

Une Heure de prison, ou la lettre de recommandation, comédie en un acte, mêlée de couplets, Par MM. Sewrin, Dumersan et Merle ; Représentée, pour la première fois, à Paris, sur le Théâtre des Variétés, le 24 Juillet 1811.

La brochure de la première édition de 1811, chez Barba, tout comme celle de la deuxième édition, chez J.-N. Barba, indique sur la page de titre que la pièce est en un acte, mais le décor est présenté ainsi sur la page suivante :

La scène se passe, au premier acte, chez M. Pincé ; au deuxième acte, dans la prison.

Journal de l’Empire, du 27 juillet 1811, p. 2-4 :

[Le titre de la pièce nouvelle est sur le modèle de celui des pièces du moment, mais cela ne suffit pas pour qu'elle soit la pire. Son intirgue reprend un tour souvent mis en scène : un nigaud venant pour épouser une jeune fille qui a déjà un amant qu’elle épouserait volontiers. Car les amours de théâtre reposent toujours sur cette situation, et le gendre que le père a choisi, toujours un imbécile, ne peut rivaliser avec l’amant choisi par sa fille , joli garçon plein d’esprit, et qui finit toujours par épouser, tandis que le père se montre aussi bête que le gendre qu’il souhaitait avoir. Le critique suggère ironiquement que c’est cette morale qu’on veut inculquer aux jeunes filles qu’on mène au théâtre. On a donc un père au nom prédestiné, dentiste en province, dont le fils, « un petit fat » est venu chez son père voir sa cousine, dont le père est le tuteur. Le critique voit là un amas d’invraisemblances selon une conception du vraisemblable au théâtre qu’il est permis de ne pas partager. Mais le père a choisi un autre que son fils pour marier sa pupille. Pour l’évincer, le jeune homme utilise sa ruse : au lieu de remettre lui-même à la prison la lettre demandant de retenir le porteur, il y envoie son rival, qui se retrouve en prison. Autre invraisemblance : le concierge de la prison retient sans mandat un homme sur la recommandation d’un ami. Il faut bien finir la pièce, et c’est ce que le critique voit comme un changement de caractère du père qui met fin à l’intrigue : il devient aussi sot que celui qu’il s’était choisi comme gendre, et il donne sa pupille à son fils et renvoie son rival malheureux, après avoir goûté à une heure de prison. Cette fin se justifie de ce que « la bêtise est un des plus grands ressorts des farces ». Cette farce est drôle, et elle est bien jouée par Brunet, aux qualités de comique remarquables. L’article finit par une annonce hors sujet, mais ce n’est pas grave.]

THÉÂTRE DES VARIÉTÉS.

Une Heure de Prison, ou la Lettre de Recommandation.

Nous avons une Heure de Mariage, une Heure d'Absence, une Heure ou un Quart-d'Heure de Silence : voici une Heure de Prison ; et il n'est pas sûr que ce soit la plus mauvaise heure. Cette Heure de Prison est un des cent mille tours, qu'on a déjà joués sur la scène, aux nigauds qui arrivent pour épouser une jolie fille déjà pourvue d’un amant chéri. De temps immémorial, c'est l’amour qui s'est chargé de faire les mariages de théâtre, et il ne fait plus que ceux-là : il faut les lui laisser. Toute fille à qui son père a choisi un mari, a d'avance choisi un amant : c’est la première règle de la comédie. L'époux choisi par le père a toujours tort de venir pour épouser ; c'est toujours, et de droit, un imbécille, un benêt, un animal indigne d'approcher d'une jolie fille, et fait pour être berné. Au contraire l’amant choisi par la fille a toujours beaucoup d'esprit, c'est toujours un joli garçon et tout s'arrange à la fin pour qu’il soit l’époux. Cette coutume du théâtre ne fait pas d’honneur à l’intelligence, au tact, au goût des pères, où les pères eux-mêmes sont aussi sots et aussi bêtes que leurs gendres ; telle est la constitution de la scène disposée exprès de cette manière pour apprendre aux jeunes filles à respecter leurs pères et à leur obéir ; et c’est pour recevoir ces salutaires leçons qu'on les mène si souvent à la comédie.

Dans cette petite farce nouvelle, les noms et qualités des personnages sont ce qu'il y a de plus comique : le père s’appelle M. Pincé, nom dont le ridicule paroît avoir été épuisé par Destouches dans le Tambour Nocturne. Ce M. Pincé exerce la profession de dentiste à la Flèche, très petite ville de province, tandis que son fils Jules se livre, à Paris, à son goût pour les arts. Ce Jules est un petit fat revenu depuis huit jours à la Flèche pour voir sa cousine Marianne dont.il est amoureux. On ne cherche pas même l’ombre de vraisemblance dans ces bagatelles ; car on voit bien qu’il est impossible que M. Pincé, dentiste à la Flèche, quand il dépeupleroit toutes les bouches du pays, arrache assez de dents aux malheureux habitans de cette petite ville pour fournir aux [sic] luxe et aux plaisirs de son fils dans la capitale, à moins qu'on ne suppose que ce fils est joueur ou chevalier d'industrie. Il n’est pas moins incroyable qu’un jeune homme dissipé, gâté par le séjour de Paris abandonne cette ville si féconde en ressources. pour faire lacour une petite provinciale qui ne vaut pas les frais du voyage.

Déjà M. Jules Pincé médite son retour à Paris. M. Pincé, son très honore père déjà très scandalisé du ton de son fils le Parisien et des airs qu’il se donne, médite une punition digne du coupable : il commence par déclarer à son fils que sa nièce n’est pas faite pour un écervelé tel que lui ; qu'il a choisi pour Marianne un neveu Bas-Normand, homme prudent et sage, qui doit incessamment arriver d’Isigny pour épouser. Le bonhomme Pincé ne borne point là sa vengeance ; et en effet. pour un étourdi et un fat, c’est un bonheur de ne pas s’engager dans les liens de l’hymen. Il est bien plus utile pour son amendement de lui procurer ure retraite sûre et paisible, où il puisse, à l’abri du monde, faire-de mûres réflexions sur ses égaremens. Heureusement M Pincé a pour ami un certain Clément, homme assez mal nommé, lequel est concierge de la prison de la Flèche : il charge son fils de remettre à ce Clément une lettre dans laquelle il le recommande aux bontés et à l’attention de son ami le concierge. Mais le fils, à qui le message et l’homme qui en est l’objet inspirent quelque défiance, charge un autre du soin d’aller à la prison remettre une lettre aussi suspecte ; et quel est cet autre, sinon le sot, le niais, le Jocrisse arrivant d'Isigny pour épouser Marianne. M. Jules lui persuade de courir à la prison, avant même de voir son oncle, avant de se débotter, pour porter au bénin concierge la lettre de recommandation. Clément y fait droit: à la première vue, en s'assurant de la personne du porteur : ceci passe la raillerie ; et M. Clément expose lui-même sa liberté, lorsqu’il attente à celle d'autrui de son autorité privée. Mais les auteurs d’opéra-comiques ne se piquent ps d’observer les lois d el’Etat plus que celles de la vraisemblance.

Pendant que Fanfant-Mignonnet (c'est le nom du Normand prisonnier; et je ne conçois pas comment je l’avois oublié), pendant que Fanfan-Mignonnet se creuse l'esprit pour expliquer sa bizarre aventure, M. Jules Pincé travaille à son bonheur. Son père, qui d'abord avoit montré du sens et quelque vigueur, devient aussi imbécille que Fanfan-Mignonnet d’Isigny. pour le besoin du dénoûment : car, sans cette métamorphose du caractère de M. Pincé le père, il n’eût pas récompensé celui qu’il vouloit punir en le mariant avec sa nièce, et il n'eût pas puni celui qu’il vouloit récompenser en le renvoyant après lui avoir fait subir une heure de prison. La bêtise est un des plus grands ressorts des farces : celle-ci-est réjouissante ; Brunet la fait beaucoup valoir. Brunet a ce que voudroient bien avoir la plupart des auteurs : il réussit toujours ; il n'a besoin pour cela que de se montrer. On joue à ce théâtre une autre pièce dont Bosquier-Gavaudan est le Brunet : il y est en Arlequin ce que Brunet est en Jocrisse. La pièce a pour titre : Le Vin, le Jeu et les Femmes ; titre qui dit beaucoup en trois mots.

La pièce semble reposer sur une anecdote concernant Frédéric-Guillaume, roi de Prusse, et sa manie de marier ses soldats avec de belles grandes filles pour obtenir de beaux bébés, futurs grenadiers de sa garde. Voir la Belle Allemande, ou le Grenadier de Frédéric-Guillaume, si on en croit le compte rendu de cette pièce dans le Magasin encyclopédique de 1812 : un jeune homme qu'on envoie porter une lettre à la prison, lettre dans laquelle on intime au geôlier l'ordre de mettre le porteur en détention, mais celui-ci a confié la lettre à un autre.

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